Brésil : Abbott veut prolonger ses brevets anti-VIH

Publié par Emy-seronet le 24.01.2012
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Le laboratoire Abbot souhaite déposer un nouveau brevet sur le lopinavir/ritonavir (Kaletra) pour garder le monopole sur cette combinaison jusqu'en 2024 et retrouver, par la même occasion, le monopole sur le ritonavir (Norvir) qui est libre de droits depuis plusieurs années. Les associations locales de lutte contre le sida rappellent que cette stratégie empêchera la fabrication et la vente de versions génériques de ces molécules alors que le pays en a besoin.
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Le Brazilian Patent Office (INPI), organisme qui accorde les brevets de médicaments anti-VIH au Brésil, doit se pencher sur une nouvelle demande du laboratoire Abbott. Le géant pharmaceutique détient le brevet de Kaletra (un médicament anti-VIH composé de deux molécules : lopinavir et ritonavir) et ce brevet expire en 2017 au Brésil. Après cette date, il est censé pouvoir être partagé avec les fabricants de génériques pour permettre une commercialisation moins coûteuse de ce médicament, plus abordable pour les pays émergents, dont le Brésil. Peu prêteur et guère altruiste, Abbott a déposé une demande pour que ce brevet soit prolongé jusqu'en 2024.


S'opposant à ce qu'ils considèrent comme une stratégie "indécente", les militants du Groupe de travail sur la propriété intellectuelle (GTPI) du Réseau brésilien pour l'intégration des populations ont rejoint la "Global Kaletra Campaign", un mouvement lancé par les activistes de nombreux pays dans le but de faciliter l'accès au lopinavir/ritonavir. Le 10 novembre 2011, ils ont présenté un texte au Brazilian Patent Office : "Les arguments d'Abbott ne permettent pas d'invoquer la loi brésilienne sur la propriété industrielle (…) Cette demande doit être rejetée". Le dossier déposé par Abbott comprend également une demande de brevet pour le ritonavir (Norvir) dans sa forme isolée alors que cette molécule est libre de droits depuis plusieurs années. "Si ce brevet est accordé, Abbott reprendra le monopole du ritonavir", continue le GTPI. "Ces deux molécules sont indispensables au traitement du VIH/sida et un nombre encore plus important de patients en auront bientôt besoin au Brésil".


Le GTPI, qui souhaite stopper le problème à sa source, se bat également contre le fait que les détenteurs de médicaments essentiels puissent déposer un tel brevet, ceci depuis le renforcement des lois sur la propriété intellectuelle et industrielle par l'Organisation mondiale du commerce dans les années 1990. La requête qu'ils ont déposée auprès de la Cour Suprême brésilienne en 2009, pour demander la fin de ce mécanisme et l'annulation de tous les brevets qui en ont découlés, est toujours en attente d'examen.

Commentaires

Portrait de jeanlouis

Je ne veux pas prendre la défense de celui qu'on peut facilement diaboliser. Mais ne demandons pas à une entreprise privée "à caractère lucratif" d'être contre nature. Naturellement, son objectif est d'optimiser le profit en rémunération du capital investi par ses actionnaires. Naturellement elle recherche à allonger la durée de vie des brevets qu'elle a déposé à travers le monde. Aussi naturellement, c'est le rôle de la société civile de modifier ou de rappeler le cadre "collectif" dans lequel travaille ce laboratoire. Chacun est dans son rôle. L'intérêt bien compris à long terme du laboratoire n'est sans doute pas de s'arc bouter sur la propriété de ces brevets mais en même temps, il lui faut réinvestir dans de nouvelles molécules ne serait- ce que pour perdurer...il a une stratégie qui forcément ne correspond pas à une démarche publique. Mais un conflit ouvert peut permettre de faire bouger la ligne. Au fait, de façon plus discrète, il faudrait savoir si ces laboratoires ont des liens avec les génériqueurs et les différences de tarifs après passage du brevet dans le domaine public. Un dernier sujet en parrallèle du premier est le mode de constitution des prix de ces médicaments et génériques. est ce de la liberté unique du laboratoire ou est ce que les autorités publiques sont responsables du prix des médicaments notamment remboursés par leur système de sécu. Je crois que le débat porte aussi sur le mode de construction des prix des médicaments
Portrait de maestro

Ceci veut-il dire que jusqu'à cette date, la seule option possible pour les séropos sera d'ingurgiter des médocs encore et encore...? Donc pas de perspective de guérison?? Waohhhhh!
Portrait de hugox

LES LABOS. Oui je sais on va entendre. Oui mais sans les labos on serait tous morts etc... OUi ok. Mais ce n'est pas une raison pour tout gober... C'est là le vrai combat à mener aujourd'hui pour simplifier les médocs et surtout faire sortir des nouveaux médocs. Tant que les brevets couvrent les médocs, pas de nouveautés. Et surtout pas la peine de chercher plus vite. Alors on va dire: oui mais les labos se battent pour sortir les premiers des nouveautés. Ah oui? Et bien non. Vous savez c'est le même process que les 3 opérateurs télécom mobile qui organisaient une fausse concurrence mais qui se laissaient le soin de sortir respectivement un nouveau truc. Donc, qui sera le Free mobile du VIH? Alors évidemment on est avec la santé dans des sphères très hautes...Et ce n'est pas un nouvel acteur pharmaceutique qui changera les choses... Comme on ne peut compter sur les associations qui sont désormais noyées dans le système... Que faire? une prise de conscience déjà...