Faire un enfant : l'annonce suisse change t-elle quelque chose ?

Publié par olivier-seronet le 23.07.2008
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L'annonce suisse soulève bien des questions. L'une d'elle concerne l'intérêt des techniques actuelles d'assistance médicale à la procréation (AMP) utilisées pour concevoir un enfant sans risque de contaminer son conjoint. Ont-elles toujours un intérêt ?

Pour un couple sérodifférent souhaitant concevoir un enfant et ne voulant courir aucun risque de contamination, il existe deux méthodes à risque nul de transmission du VIH au conjoint ou partenaire ou à l'enfant. Il s'agit de l'AMP avec "lavage de sperme" (si l'homme est séropositif) et de l'auto-insémination (si la femme est séropositive). La première méthode est accessible depuis 2001 en France pour les personnes séropositives. Elle est particulièrement bien encadrée et prise en charge, après accord, à 100 % par la Caisse primaire d'assurance maladie. L'AMP est également ouverte aux couples dont les deux partenaires sont séropositifs qui souhaitent avoir un enfant et qui ne veulent courir aucun risque de surcontamination. Ces méthodes ont tout leur intérêt dans le contexte français qui assure la gratuité de la prise en charge et un accès relativement facile aux centres qui les pratiquent. Ce n'est pas le cas en Suisse où le contexte de l'AMP est très différent : la prise en charge est extrêmement coûteuse, les services spécialisés peu nombreux. Par ailleurs, il y a une différence d'interprétation des données sur le risque de contamination entre les spécialistes en France et ceux en Suisse. Les autorités sanitaires suisses indiquent donc dans leurs recommandations officielles que "l'insémination avec lavage de sperme n'est plus indiquée en présence d'un traitement antirétroviral efficace, lorsqu'elle a pour seul but d'éviter une transmission du VIH". Ce que Bernard Hirschel, évoquant la situation en Suisse, traduisait ainsi dans une interview (1) : "Aujourd'hui, nous pouvons dire à un couple dont l'un des partenaires est séropositif traité avec un taux de virus indétectable qu'ils peuvent avoir un enfant sans avoir à s'inquiéter de la contamination du partenaire non infecté". La différence de contextes explique que les recommandations françaises et suisses diffèrent.


Si le couple sérodifférent ne peut ou ne veut pas recourir à l'AMP, cette information concernant la charge virale entre dans une stratégie de réduction des risques. Autrement dit, le risque de contamination, lors de rapports sexuels non protégés, sera moindre si la personne séropositive a une charge virale durablement indétectable, qu'aucun des deux partenaires n'a d'infection sexuellement transmissible, que le rapport sexuel n'est pas irritant pour les muqueuses (c'est-à-dire que le rapport soit lubrifié, pas trop long et sans brutalité), qu'il y a le moins possible de rapports non protégés (c'est-à-dire que le rapport non protégé destiné à concevoir un enfant le soit en période de fécondité maximale de la femme). Il est possible de se faire aider par un gynécologue pour déterminer cette période.
(1) Le Temps, 3 décembre 2007