Le mariage homosexuel, sujet à réaction(naires)

Publié par Mathieu Brancourt le 20.06.2011
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mariageLGBT
Mardi 14 juin, la proposition de loi sur la légalisation du mariage gay, présentée par le député PS Patrick Bloche a été rejetée à l’Assemblée nationale. Avec 293 voix contre, pour 222 favorables, c’est un nouveau coup d’arrêt pour les revendications des LGBT dans leur quête de l’égalité des droits. Face à cette opposition, de nombreuses voix politiques et associatives s’élèvent contre une décision en contradiction avec l’évolution des mœurs de la société française.
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Le rejet de la proposition, mardi dernier, ne faisait plus aucun doute, mais la déception est grande. Le texte avait été débattu la semaine dernière, lors d’une séance d’initiative parlementaire, réservée aux députés socialistes et apparentés et la droite s’était alors positionnée contre cette proposition de loi. "La quasi-totalité des députés UMP votera contre le mariage homosexuel, même s’il y a liberté de vote sur ce sujet", avait prévenu Christian Jacob, président du groupe UMP à l’Assemblée. Mais le parti majoritaire "proposera un groupe de travail qui se penchera sur les questions liées aux droits des homosexuels". Le Nouveau centre estime lui aussi que le mariage homo n’est pas nécessaire, et juge que le PaCS (Pacte civil de solidarité) est déjà "une bonne réponse" au droit de vivre sa différence. Au final, la majorité a réussi à balayer le mariage homosexuel en un après-midi.
Durant les débats, les opposants au texte ont soigneusement évité tout débordement, en réaffirmant même leur volonté de lutter contre l’homophobie. Après la polémique sur les propos de Brigitte Barèges ("Et pourquoi pas le mariage pour les animaux ?"), l’UMP se devait d’élever (un peu) le débat. Le camp de la droite s’est finalement retranché derrière la notion de famille et  l’enjeu "impérieux" de l’intérêt de l’enfant. "Il ne faut pas aller dans le sens du vent ou céder à un effet de mode (…), ou altérer l’image et la fonction du mariage, institution chargée de la protection du plus faible, à commencer par la femme", a ainsi déclaré le député Michel Diefenbacher (UMP). Dès lors, pourquoi ne pas défendre le mariage pour deux "faibles" femmes ? Patrick Bloche, député PS auteur de la proposition, avait pourtant exhorté ses collègues à faire "tomber une discrimination". Il invitait également les parlementaires à ne pas mélanger "homo-conjugalité et homo-parentalité". Seuls quelques élus radicaux, dont Jean-Louis Borloo, et une infime partie de l’UMP l’ont entendu en votant pour cette proposition. Dans les couloirs de l’Assemblée, le discours était moins diplomate et les opposants historiques du PaCS se sont rappelés à nos mauvais souvenirs. Christian Vanneste, célèbre pourfendeur de la cause homosexuelle, a parlé du mariage entre personnes de même sexe comme d’une "aberration anthropologique", nuisible à la "pérennité de la société". Ce dernier accuse même la presse de relayer "des lobbies possédant manifestement beaucoup de pouvoir". Les déclarations sont certes violentes, mais elles n’étonnent plus de la part du député du Nord. La position du MoDem (Mouvement Démocrate) de François Bayrou est plus surprenante. Le parti centriste se déclare pour l’égalité totale des droits entre homo et hétérosexuel, mais en même temps se prononce en faveur d’une "union" pour les personnes de même sexe, plutôt que pour le "mariage". La sémantique comme paravent, on aura vraiment tout vu…
Par l’intermédiaire de leur porte-parole, Bruno Le Roux, les députés PS ont réagi, affirmant que le mariage pour les personnes de même sexe fera partie du "paquet" de réformes si la gauche arrivait au pouvoir en 2012. "Cet acte vaut engagement, demain, de gouvernement" a-t-il ajouté. Déplorant une droite "réactionnaire", ce dernier s’est cependant réjoui des quelques députés de la majorité (Franck Riester, Henriette Martinez ou encore Yves Jégo) ayant rejoint la gauche sur cette proposition. La réaction des acteurs associatifs ne s’est pas non plus fait attendre. SOS Homophobie s’est dit "révoltée et indignée" par ce rejet, rejointe par l’Association des familles homoparentales (ADFH). Dans un communiqué, l’association a déploré qu’en 2011, "les lesbiennes et gays français soient encore considérés comme des sous-citoyens". Homosexualité et Socialisme (HES) dénonce aussi "le retard injustifiable" que prend la France sur ces questions. Même GayLib, l’association LGBT des militants UMP, déclare "regretter qu’une majorité de ses députés refuse toujours l’égalité des droits pour les familles homosexuelles".
Il faut cependant s’interroger sur le contexte de la proposition. La Marche annuelle des fiertés approche et rend les enjeux LGBT plus visibles qu’a l’accoutumée. C’est également un appel du pied du parti socialiste à une communauté sensible à l’égalité des droits. Mais tout aussi symbolique que soit la proposition, le dépôt par la gauche de cette dernière à cette période du calendrier électoral, a offert un "excellent" argument à la droite, qui a taxé le mariage homosexuel, durant toutes les discussions, de sujet "électoraliste", en vue des échéances présidentielles. L’opposition, presque par principe, de tout ce qui peut provenir du camp adverse a certainement nui à la proposition. Exceptés certains ultra conservateurs, les députés de droite ont-ils voté contre le texte "en leur âme et conscience" ou simplement parce que la proposition émanait de la gauche ? Sur un sujet aussi clivant, le duel entre une gauche progressiste et une droite conservatrice était inévitable, permettant ainsi au PS de "ringardiser" une droite qui sait qu’elle devra évoluer sur ce point. La mise en place à l’UMP d’un groupe de travail, sur les questions LGBT, en atteste. Deux membres du gouvernement se sont même déclarés en faveur du mariage homosexuel, reflétant une évolution de la société. Un sondage Sofres de janvier dernier montre ainsi que  58% des Français sont favorables au mariage gay. Un tel débat de société aurait certainement nécessité (et mérité) plus de hauteur intellectuelle pour ne pas tomber dans une simple opposition partisane. Car la véritable perdante n’est pas la gauche, mais belle est bien la communauté LGBT.

Commentaires

Portrait de communard2011

Mathieu-seronet wrote:

 Car la véritable perdante n’est pas la gauche, mais belle est bien la communauté LGBT.

 

Ce n'est pas sûr... Ne sont-ce pas plutôt nos élus et la démocratie qui sont les véritables perdants ? En effet, après ce débat, le sentiment qui sort à nouveau renforcé dans la société, c'est que la représentation nationale semble vivre dans un autre monde que le monde réel. Et ce refus d'une évolution s'ajoute à toute une série de comportements, de déclarations, d'incidents... de la représentation nationale que l'opinion a condamnés moralement ces derniers mois. Le fossé se creuse... Espérons qu'il ne nous conduira pas sur la pente fatale du populisme de droite.

Portrait de Zagadoum

Le mariage entre personnes de même sexe me parait sémantiquement impossible puisque la finalité du mariage dans le droit français est la procréation. Les Homosexuels ne peuvent pas avoir d'enfants donc n'ont pas de raison de se marier. Pour autant quand on s'aime on veut se mettre ensemble : donc il n'ya pas de raison pour qu'un contrat ne régisse pas cela. Le Pacs ne suffit pas , tout simplement parce que les contraintes financières font que cela s'adresse à deux personnes qui ont forcément un revenu égal. Il organise la sucession et les rapports avec la famille , jadis durant les années noires les survivants étaient souvent mal lotis. Il est hors de question que l'adoption soit autorisée à mon sens : La loi n'est pas faite pour remédier aux incapacités biologiques de nature : pour un enfant il faut un ovule et un spermatoide . L'enfant n'est pas un objet , et ce n'est pas parce que les homosexuels le souhaitent que ça doit être autorisé. Maintenant si ça relève de la transgression : En clair un couple de même sexe à des enfants et sont de même sexe , il faut à mon sens laisser faire .
Portrait de romainparis

" la finalité du mariage dans le droit français est la procréation" Je suis curieux de savoir dans quel article de droit tu as pêché cela ? Connaissant les droits et devoirs du mariage civil, il n'est aucunement fait mention de cette finalité. " pour un enfant il faut un ovule et un spermatoide" Eh bien, les hommes homos ont des spermatozoïdes et les femmes lesbiennes des ovules... ils ont donc les capacités biologiques de la nature. Ah, bien sûr, si l'on part du principe que l'homme doit obligatoirement mettre son sexe dans le vagin... Mais il existe des hétérosexuels qui font avoir un problème alors, ceux qui ont recours à la PMA et cie. Sinon, pour être en phrase avec le monde actuel, les homos ne souhaitent pas et n'attendent pas une autorisation pour avoir des enfants : ils le font !!! Sinon, d'un point de vue juste républicain, comment nomme-t-on un droit accordé à certaines personnes et pas à d'autres ? Une discrimination. Pourtant, notre constitution l'interdit.
Portrait de gap26

... je ne m'imagine pas me **marier**; j'aurais l'impression de vouloir imiter les zétéros. Zagadoum a raison : la normalité du mariage c'est un homme avec une femme et - le plus souvent - une progéniture. J'ai du mal à comprendre et à m'inscrire dans cette revendication. Gap26
Portrait de guppy

Actuellement, si je ne me trompe pas, un couple lesbien qui a un ou des enfants, aux yeux du législateur il n'y a qu'un seul parent reconnu, il serait bon que celà change. Ce n'est pas parce que l'on accorde le mariage, que l'on va tous se précipiter à la Mairie.
Portrait de romainparis

fais pas une priorité, parce que la vraie question est : Etes-vous pour l'égalité des droits/devoirs ?
Portrait de frabro

Et rien que ça, que ça s'appelle mariage, PACS, ou union de je ne sais quoi m'est indifférents du moment que les droits sont les même. Et effectivement ça ne veut pas dire que nous soyons obligés de le faire ! Je ne vois pas en quoi le PACS imposerait des contraintes financières et l'égalité de revenus...Il s'agit d'un contrat entre deux personnes qui mettent dedans ce qu'ils souhaitent et qui peuvent choisir d'exister en "foyer fiscal" ou rester en impositions séparées. La seule différence entre l'union libre et le PACS est l'imposition sur l'héritage en cas d'absence de PACS.
Portrait de communard2011

si on peut s'en servir...

Aussi même si pour soi, on n'est pas intéressé par le mariage, pour autrui, c'est le seul moyen d'aboutir à une vrai égalité entre nous, LGBT, et les hétéros, le droit matrimonial étant un fondement de notre République. Les hétéros préfèrent au pacs le mariage parce qu'ils savent que le moment venu, ils pourront aussi se marier. Les LGBT ont délaissé le Pacs parce qu'l n'est qu'un pis-aller qui ne répond pas à leur aspiration à être reconnus comme des citoyens à part entière.

Le combat pour le mariage entre personnes de même sexe est donc in fine le combat pour l'égalité entre tous les citoyens.

C'est aussi sur le sentiment qu'il ne saurait y avoir de citoyens de seconde zone que se construit l'efficacité de la lutte contre l'épidémie à vih qui est l'objet de ce site. Alors que cette épidémie se nourrit toujours et encore des inégalités et des discriminations.

Plus de droits = plus d'égalité = moins de vih

Portrait de jean-rene

Tout à fait d'accord avec toi, Communard. Je soutiens l'idée que si l'on avait permis aux gays de se marier, ils auraient moins besoin de recourir à des partenaires sexuels multiples, et ils n'auraient pas été les premières victimes de l'épidémie de VIH/SIDA.
Portrait de alsaco

la fidélité n 'a jamais été l 'apanage des hommes . dans le mariage ou hors benediction . Sinon combien de morts évités
Portrait de jean-rene

Tu as raison, Alsaco, et je suis bien placé pour le savoir puisque, moi-même, c'est du fait de mon infidélité sexuelle alors que j'étais marié, que j'ai attrapé le VIH. Mais j'aime bien rappeler aux bourgeois cathos qui font l'amalgame VIH/gays, que si les gays avaient pu être mariés avant que n'apparaisse le VIH, le VIH se serait propagé moins vite dans leur communauté. Je reconnais que c'est un peu de la provocation;
Portrait de Doume29

C'est pour cette raison que je n'ai jamais cru au mariage entre deux hommes. Nous sommes programmés pour forniquer au quart de tour
Portrait de jarrod

Doume29 wrote:
C'est pour cette raison que je n'ai jamais cru au mariage entre deux hommes. Nous sommes programmés pour forniquer au quart de tour

Toi les hétéros ne baisent pas ? ou ne vont pas voir ailleurs?

tu n'es pas du tout dans la réalité, 

le mariage , le concubinage ou le pacs sont des choix qui doivent etre proposés à tous les couples et c est tout , on obligera personne à se marier ,  mais chaque individu doit disposer des memes droits....

Portrait de alsaco

il parlait des gays . no comprendo !!!!!!!!!
Portrait de jarrod

alsaco wrote:
il parlait des gays . no comprendo !!!!!!!!!
                                                        que l'on parle des gays ou pas gays c'est pareil .....
Portrait de jean-rene

Pour moi, le mariage, c'est une promesse de fidélité affective que deux êtres, homos ou hétéros, se font pour la vie. C'est vrai que c'est une promesse un peu folle mais certain(e) s s'aiment tant qu'ils ont envie de se la faire. Souvent, pendant une certaine période, cette fidélité affective s'accompagne de fidélité sexuelle. Des études ont été faites qui montrent que cette fidélité sexuelle est plus difficile à tenir dans les couples de gays que dans les autres couples. Je voulais simplement dire que, tant qu'un couple de gays tient la fidélité sexuelle, le VIH a moins de chance de se propager dans ce couple.
Portrait de gap26

jean-rene wrote:
Tout à fait d'accord avec toi, Communard. Je soutiens l'idée que si l'on avait permis aux gays de se marier, ils auraient moins besoin de recourir à des partenaires sexuels multiples, et ils n'auraient pas été les premières victimes de l'épidémie de VIH/SIDA.

Ha Ha Ha !

Franchement, vous êtes très drôle !

Gap26

Portrait de communard2011

jean-rene wrote:
Tout à fait d'accord avec toi, Communard. Je soutiens l'idée que si l'on avait permis aux gays de se marier, ils auraient moins besoin de recourir à des partenaires sexuels multiples, et ils n'auraient pas été les premières victimes de l'épidémie de VIH/SIDA.

Je n'ai pas écrit que je pensais que le mariage et la fidélité censée l'accompagner constituent un obstacle à l'épidémie.

J'ai écrit que l'égalité des droits et la lutte contre toutes les discriminations favorisent l'estime de soi de ceux qui ne bénéficient pas de ces droits ou qui sont victimas de ces discriminations. La légalisation du mariage entre personnes de même sexe est une étape incontournable pour nous permettre  de quitter le statut de sous-citoyen dans lequel nous sommes encore cantonnés même si fondamentalement une majorité d'entre nous ne souhaite pas ensuite recourir à ce droit. Or l'estime de soi est une donnée essentielle, à mon avis, d'un engagement dans une démarche de protection de soi et des autres et donc de lutte contre l'épidémie à vih.