Loi de Santé : le Sénat doit faire mieux

Publié par jfl-seronet le 20.04.2015
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PolitiqueLoi de santé 2015

Adopté par l’Assemblée Nationale, mardi 14 avril, par 311 voix contre 241 et 10 abstentions, le projet de loi Santé a passé une première étape décisive. Il est attendu pour un unique passage au Sénat, en juillet ou en septembre 2015. En attendant, ces nouveaux débats, ultime cession de rattrapage, voici les avancées (celles qui concernent plus directement le VIH, les hépatites virales et l’accès aux soins) de la loi Santé à l’issue de son vote par l’Assemblée Nationale. C’est parti !

Des heures et des heures de débats en commission des Affaires sociales, puis en séance à l’Assemblée Nationale, des manifestations et des journées de grève, près de 2 400 amendements déposés… ouf ! La loi Santé a franchi sa première étape. Ce texte a donné lieu à une mobilisation d'ampleur des professionnels de santé, mobilisation qui ne devrait d’ailleurs pas cesser si on en croit les syndicats de médecins. C’est d’ailleurs la généralisation du tiers payant — LE sujet de discorde avec les médecins —, une disposition phare du texte, qui a fait passer au second plan des mesures importantes et mêmes des progrès notables permis par ce texte complexe. C’est du reste dommage que ce sujet de conflit entre les blouses blanches et le gouvernement, ait largement éclipsé les autres volets de la loi : la lutte contre les ruptures d’approvisionnement, la politique de réduction des risques, les innovations dans le domaine du dépistage, etc.

Le tiers payant généralisé… par étapes

Commençons par ça, le sujet sera clos. Le tiers payant généralisé a été adopté. Au 1er juillet 2016, les professionnels de santé en ville pourront dispenser d'avance de frais les personnes prises en charge à 100 % par l'Assurance maladie (personnes en ALD, femmes enceintes). Puis au 1er janvier 2017, le tiers payant pourra être appliqué sur la base du volontariat à tous les assurés. Enfin au 30 novembre 2017, le tiers payant sera un droit pour tous les assurés. Constatons qu’aucune sanction n'est fixée pour les professionnels de santé récalcitrants. Le paiement de la part prise en charge par l'Assurance maladie est garanti au professionnel de santé, dans un délai maximum qui devrait être de sept jours.

Dépistages

Les tests de dépistage rapide d’orientation diagnostique (TROD) vont être accessibles aux mineurs, sans autorisation parentale préalable (comme c’est déjà le cas pour la contraception). Reste que le dépistage rapide des mineurs par les acteurs associatifs ne pourra pas se faire sur l’ensemble du territoire, mais là où cela se justifie au regard de la situation épidémiologique, sur la base d’un arrêté. Par exemple en Guyane.

La loi ouvre aussi la voie aux autotests du VIH en France. Ils seront vendus (sans ordonnance) en pharmacies de ville. Un certain nombre d’autotests sera accessible, gratuitement cette fois, dans les associations de lutte contre le sida. Reste à attendre la publication de l’arrêter après le vote définitif de la loi.

Usage de produits et réduction des risques

Autant le dire, c’est dans ces domaines que les avancées sont nettes et cela a des niveaux différents. La loi avec ses avancées sur les notions de parcours social ou de santé renforce la reconnaissance de la réduction des risques (RDR). Avancées aussi sur la définition de la RDR, les moyens de la RDR et son extension au milieu carcéral. Pour être plus clair, la loi fait une place à des produits qui concourent à la RDR en complément du matériel (seringues propres…). La loi crée une nouvelle mission sur l’analyse des produits (compositions, évolutions des usages et des consommations, dangerosité des substances, etc.). L’accompagnement à l’injection est reconnu. Par ailleurs, des articles de la loi assurent enfin une sécurisation des intervenants de la RDR… Enfin, l’expérimentation de salles de consommation de drogues à moindre risque (SCMR) pendant six ans est validée. Ces structures destinées aux consommateurs de produits les plus précarisés ont enfin un cadre légal.

Actions de groupe dans le domaine de la santé

La loi permettra de regrouper dans une seule procédure les demandes de réparations concernant un grand nombre de personnes victimes de dommages dus à leurs traitements. L’action de groupe reste cependant limitée aux produits de santé, et n’a pu être élargie aux lacunes dans l’accès aux droits en santé… ce qui est bien dommage.

Le "droit à l’oubli" pour les assurances

Pas de majorations de tarifs ni d'exclusion de garanties pour les anciens malades du cancer souscrivant une assurance ou un emprunt. Le dispositif a été élargi "aux pathologies autres que cancéreuses, notamment les pathologies chroniques, dès lors que les progrès thérapeutiques et les données de la science attestent de la capacité des traitements concernés de circonscrire significativement et durablement leurs effets".

Les soins funéraires

Les conditions sont créées afin de lever enfin l'interdiction des soins funéraires pour les personnes séropositives pour le VIH et les hépatites virales très prochainement

Dons du sang et orientation sexuelle

Le texte indique que : "Nul ne peut être exclu du don de sang en raison de son orientation sexuelle". L’interdiction actuelle faite aux homosexuels sera donc levée. La ministre de la Santé a d’ailleurs annoncé qu’une évolution dans ce sens du questionnaire fait lors d’un don de sang sera rapidement mise en œuvre.

Refus de soins

Bon ! La loi ne permet pas les avancées espérées. Alors que le texte prévoyait des "tests" dans les cabinets médicaux à cette fin, les députés ont adopté à l'unanimité un amendement socialiste supprimant cette idée et prévoyant que les conseils nationaux des ordres médicaux pourront utiliser "les moyens qu'ils jugent appropriés" afin de "mesurer l'importance et la nature des pratiques de refus de soins". Notons qu’ils sont déjà charger de cela et qu’ils s’en acquittent fort mal. Comme lors des débats pour la loi HPST, le lobby médical a joué à plein. Résultat : on a donc une évaluation du phénomène des refus de soins par les conseils de l’ordre des médecins, avec la réintroduction, à l’arrachée, des représentants des patients dans ce travail d’évaluation. "Concernant les refus de soins, le projet de loi est (…)  largement insuffisant", a expliqué Bruno Spire, président de Aides, dans un communiqué. "Malgré nos alertes, nous constatons que l'électrochoc n'a pas eu lieu. Aides sera donc bientôt en mesure de dévoiler ce que vivent au quotidien les personnes séropositives, et les stratégies pernicieuses mises en place par certains soignants pour les éloigner de leurs cabinets. Des situations intolérables qui, nous l'espérons, pousseront enfin les parlementaires à réagir".

Ruptures d’approvisionnement et fixation du prix des médicaments

Les précisions importantes défendues par les associations n’ont pas franchi le cap de la commission des Affaires sociales notamment sur la prise en compte des ruptures d’approvisionnement comme la mise en place de stocks pivots, seule l’information via les associations a été votée. Reste qu’un décret d’application sur les ruptures d’approvisionnement est déjà bien avancé et comporte de nombreuses avancées par rapport à la situation actuelle.
"Sur la fixation du prix des médicaments, malgré quelques avancées sur la transparence et la place des associations, le texte manque cruellement d'ambition. Quand un médicament innovant contre l’hépatite C coute 41 000 euros pour une cure, l'enjeu pour notre système de santé est considérable", a relevé Bruno Spire dans son communiqué.

Lutte contre le tabagisme

On passe, a priori, une vitesse supplémentaire dans la lutte contre le tabac puisque la loi débouche sur les paquets neutres — mêmes forme, taille et typographie, sans logo, mais avec la marque en petits caractères —, qui seront obligatoires à partir du 20 mai 2016. De nouvelles interdictions ont été prises : interdiction de fumer dans les voitures transportant des mineurs, des arômes artificiels comme le menthol à partir de 2020, du vapotage dans certains lieux publics, notamment au travail, de la publicité pour les produits du tabac dans les points de vente, de la publicité pour les cigarettes électroniques à partir de mai 2016, etc. Par ailleurs, médecins du travail et infirmiers pourront prescrire des substituts nicotiniques.

Et maintenant ?

Si de nombreuses avancées ont été obtenues, "des pans entiers du projet de loi n'ont pas été traités avec l'ambition et la rigueur qu'ils méritent", a expliqué Aides. Pour Bruno Spire, son président, il "revient maintenant au Sénat et au Ministère de la Santé d'y remédier". L’association qui a travaillé souvent en partenariat avec d’autres structures comme le TRT-5, Médecins du Monde, le Collectif interassociatif sur la santé (CISS) entend rester mobilisée et "fera rapidement de nouvelles propositions au gouvernement et aux sénateurs, afin de renforcer ce texte et conforter les avancées obtenues".

Remerciements à Théau Brigand, Fabrice Pilorgé et Adeline Toullier.

Commentaires

Portrait de IMIM

Cette mesure qui persiste à faire "évaluer" les médecins par leurs pairs est d'une extrème hyppocrisie........

On connait le "LObby médical".....

Pourquoi ne pas faire juger les boulangers par des boulangers, ou des cordonniers par des cordonniers et les voyous par d'autres voyous MDR!!!!!?????? 

Non, mais faut arréter !

Ils ne devraient être consultés que sur la seule partie purement médicale

Le refus de soin n'est pas une erreur médicale, c'est une DISCRIMINATION !

Pourquoi bénéficieraient-ils d'un tribunal spécial ??? D'autant qu'ils le possèdent déjà, tt à leurs avantages.......


Fixation du prix des médicaments

Cela semble également "impossible" disons mm impensable face au lobby des labos !!!........


Alors, c'est vrai je constate qq avancées

Et notament en matière de toxicomanie Mais g aussi envie de dire " ben il était temps !!!"


Ou encore pour les soins funéraires Mais les chiropracteurs montent aux créneaux Information + éducation = ?


Alors, politiquement parlant, DECEVANTE la gauche

L'extrème gauche en Grèce n'arrive pas à faire plier notre p.... d'"Europe" Celle là mm que la consultation ds les urnes française avait rejetée...

G un regard tellemnt lucide sur la situation que ça en est désespérant

J'en viens mm à me demander si, comme beaucoup, je ne finirais pas par voter fn en 2017 (en total contradiction avec mes idéaux, je précise),  juste histoire que ça explose une bonne fois pour toute !!!!Yell

En dernier recours,  solution extrème.......


Portrait de barberousse

La loi a réellement voté la vente d'autotest en pharmacie?

Que disent les associations comme Aides là dessus?

Perso, ça me fait frémir..supposons qu'un employeur, peu scrupuleux, demande à faire faire le test du "sida" pour avoir le job (en cuisine, crèche,soignants).

Vu la crise et le chômage, le fichier des patients, le rôle de la médecine du travail etc

Les dérives me semblent inévitables; à supprimer par le prochain gouvernement.

La victime est si belle et le crime est si gai....

Portrait de IMIM

Super dangereux cet auto-test......

Perso g t contre Tout comme le truvada avant et après un rapport

Mais bon, aucune de ces 2 dispositions ne me concernent directement........

Alors, lets go !!....

Portrait de Charles-Edouard

24 euros en Pharmacie, sans ordonnance, non remboursé, avec toute la chianterie que represente le fait de s'auto tester

24 euros en Labo d'analyse médicale, sans ordonnance, (*) avec toute la sécurité sanitaire de vrais professionnel

Mais cette dernière option, on n'en parle jamais. Il suffirait de donner à chaque personne un bon pour analyse gratuite, un peu comme on recoit un bon pour vacination anti-gripale gratuite. (suffit de mettre ce droit une fois par an sur la puce de carte vitale)

(*) non remboursé mais on peut se faire faire une ordonnance (antidatée) lors d'une visite au médecin et se faire rembourser