Nouvelles drogues : le rapport Trend 2015

Publié par jfl-seronet le 07.01.2017
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Le dispositif Trend (Tendances récentes et nouvelles drogues) vient en complément des grandes sources traditionnelles d’infos sur l’usage des drogues en population générale. Trend s’intéresse plus particulièrement aux groupes essentiellement consommateurs de produits psychoactifs. En décembre dernier, l’OFDT (Observatoire français des drogues et des toxicomanies) et l’association Charonne ont publié une synthèse des résultats 2015 de Trend. En voici quelques infos clefs.

De nombreuses données concernent les nouveaux lieux et nouvelles pratiques de revente. Ces changements sont la conséquence de la situation sécuritaire créée par la déclaration de l’état d’urgence en novembre 2015. Il reste encore en vigueur jusqu’en juillet 2017. L’état d’urgence a clairement eu un "impact sur les scènes de revente et d’usages de drogues", indique le document publié en décembre dernier. Les experts notent ainsi un net développement des contacts téléphoniques entre usagers et revendeurs.

Le crack en "inexorable expansion"

En 2015, l’accès au crack, du fait des pressions policières, n’est plus seulement cantonné au nord-est de la capitale, notent les experts. La mobilité des revendeurs touche des territoires jusqu’alors peu ou pas concernés par la revente de ce produit : nord-ouest, sud-ouest et sud-est de Paris. Un trafic se déploie principalement sur certaines lignes du métro. Parallèlement à l’augmentation de l’accessibilité du crack, une diversification des profils d’usagers est observée. Et le rapport Trend d’expliquer : "Ainsi, outre les profils de personnes "insérées" décrits antérieurement, on note la présence d’anciens héroïnomanes, de migrants d’Europe de l’Est, jusqu’alors exclusivement consommateurs d’opiacés (…) Ils inventent (ou réinventent) une sorte de speedball en mélangeant le crack et le Skenan". L’accès et la grande disponibilité du crack sont des facteurs favorisant cet élargissement du spectre des consommateurs.

Spécificité des usages dans le milieu "gay"

Dans le milieu des gays consommant des drogues en contexte sexuel, un durcissement des pratiques (sexuelles et de prises de drogues), en même temps qu’une domestication des usages, sont observés, avancent les experts. "Les pratiques extrêmes (slam) commencent ainsi à être autant mises en avant que rejetées, témoignant d’une autorégulation du phénomène par la communauté. Dans l’ensemble, l’usage de drogues apparaît comme moins festif et moins ludique. La présence du risque devient très prégnante et est intégrée dans la consommation. Ainsi, plusieurs cas d’overdoses mortelles liées à des consommations de cathinones ont marqué la communauté homosexuelle en 2015, en plus des divers accidents psychiatriques aigus rapportés (délires paranoïdes, chute ou précipitation par la fenêtre, etc.) dans le cadre du groupe focal sanitaire", explique le rapport Trend.

"MDMA/ecstasy : des stratégies marketing poussées"

La disponibilité et l’accessibilité de la MDMA, aussi bien sous sa forme "comprimé" que "cristal" ont considérablement augmenté dans l’espace festif ces dernières années, indiquent les experts. La stratégie marketing des fabricants s’avère efficace, notamment pour l’ecstasy. Ainsi, les comprimés de grande taille, colorés, en trois dimension se sont fait une place sur le marché ("Superman", "Domino", "Northface", etc.). De formes, de logos et de couleurs très variées, ils semblent "à chaque fois différents" aux yeux des personnes usagères, attirant la curiosité de nombreux consommateurs, à la recherche de nouveauté. En outre, ils portent souvent un trait de sécabilité au verso, facilitant le fractionnement des prises de la part d’usagers qui les considèrent souvent comme très concentrés. Le darkweb est une des sources d’approvisionnement des usagers comme des revendeurs, pouvant se procurer des comprimés pour des prix très bas (quelques euros l’unité) lors de commandes de plusieurs dizaines de comprimés, indique le rapport Trend.

"Un trafic de médicaments stable"

Les médicaments les plus revendus dans la rue (méthadone, Subutex, Skenan, Seresta, Valium, principalement) restent accessibles à des prix stables d’une année sur l’autre et peu de pénuries sont observées en 2015. Cependant, leurs disponibilités peuvent varier d’un jour, d’une semaine ou d’un mois à l’autre, impactant directement le prix de revente à l’unité. Les médicaments présents sur le marché parallèle font partie intégrante des drogues de rue et sont parfois préférés à ces dernières.

"Méthamphétamine... entre mythe et réalité"

Malgré les démantèlements de petits trafics réalisés par la police parisienne entre 2010 et 2014, le site n’observe toujours pas de réseau de revente organisé de méthamphétamine à Paris. En revanche, il existe des phénomènes d’usage-revente dans l’espace festif gay et notamment dans le cadre du chemsex, indique le rapport. Dans ces cas, la méthamphétamine est rapportée de l’étranger par une personne qui en fait profiter son réseau proche. Lorsqu’il est accessible à Paris, ce produit reste donc aujourd’hui très rare et se revend toujours très cher (220 à 250 € le gramme). Le darknet pourrait néanmoins bouleverser la donne en facilitant l’accès à ce produit (comme à d’autres) dans les années à venir, concluent les experts.