Reste à charge : un observatoire citoyen

Publié par jfl-seronet le 11.06.2013
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Thérapeutiquereste à charge

Face à la montée des dépenses de santé non remboursables par l’Assurance maladie, le Collectif interassociatif sur la santé (CISS), le magazine "60 Millions de consommateurs" et la société Santéclair ont annoncé (27 mai) la création de l’Observatoire citoyen des restes à charge en santé. Son objectif est de suivre l’évolution des sommes restant à la charge de l’usager, notamment en lien avec la progression des tarifs médicaux. Explications.

"En 2012, les Français ont versé 40 milliards d’euros aux professionnels de santé exerçant à titre libéral, toutes professions de santé confondues : médecins généralistes et spécialistes, dentistes, auxiliaires médicaux (infirmiers, masseurs kinésithérapeutes, pédicures, orthophonistes…). Sur ce total, 13 milliards d’euros, non remboursés par l’assurance maladie obligatoire, sont restés à la charge des patients ou de leur assurance complémentaire", expliquent les créateurs de ce premier observatoire citoyen. Celui-ci, pour sa première présentation, s’est plus spécifiquement penché sur les dépassements d’honoraires des médecins spécialistes. "En 2012, ces derniers ont facturé plus de 2,3 milliards d’euros au-delà des tarifs de la Sécurité sociale, un total en augmentation de près de 9 % en deux ans", note l’Observatoire.

D’importantes disparités sectorielles et régionales

"L’analyse fait apparaître que, dans certaines spécialités (chirurgie, gynécologie-obstétrique, ophtalmologie, ORL), les médecins pratiquant des dépassements d’honoraires sont désormais majoritaires", avance l’Observatoire. "Et il existe de véritables zones noires pour les patients, en Ile-de-France et Rhône-Alpes notamment. A Paris, toutes spécialités confondues, un patient consultant un médecin spécialiste devra ainsi débourser en moyenne, pour chaque acte, 37,70 euros au-dessus du tarif de la Sécurité sociale, contre 15,90 euros en moyenne nationale !"

L’évolution des restes à charge en santé sous surveillance

"A de tels niveaux, les dépassements d’honoraires posent un véritable problème d’accès aux soins, notamment pour les personnes qui ne disposent pas d’une couverture complémentaire. Ils nécessitent, tout comme l’ensemble des tarifs des produits et prestations de santé, une véritable vigilance citoyenne à laquelle l’Observatoire entend contribuer en mettant sous surveillance l’évolution des restes à charge pour les usagers", note l’organisme.

Une augmentation des restes à charge pour les soins courants

"Si les pouvoirs publics mettent toujours en avant des chiffres globaux moyens sur la part des dépenses de santé prises en charge par l’Assurance maladie obligatoire qui montrent une relative stagnation aux alentours de 75 %, on sait qu’il s’agit là d’une moyenne qui cache une tendance à la baisse du niveau de couverture par l’Assurance maladie dans de nombreux domaines", note l’Observatoire. "D’abord, sur la durée, on se rend compte que la baisse, bien que marginale chaque année, est constante y compris sur le niveau moyen de prise en charge globale : ‐ 1,5 point entre 2004 et 2011. Ensuite, si on s’intéresse à la décomposition de la dépense de santé en fonction de ses différents postes (hôpital, médicaments, soins de ville), il s’avère que le taux de prise en charge des soins courants par l’Assurance maladie obligatoire n’est en fait que de l’ordre de 55 % (et même d’à peine plus de 50 % si on intègre dans le calcul les frais liés à l’optique). C’est ce qu’indiquait le rapport annuel du Haut Conseil pour l’Avenir de l’Assurance Maladie (HCAAM), publié en décembre 2011. D’autres chiffres évocateurs y précisaient cette analyse sur les restes à charge après remboursement par l’Assurance maladie :

- 70 % des assurés ayant consommé des soins en 2008 ont un reste à charge de 500 euros maximum (à peu près 40 euros par mois) ;
- environ 20 % des assurés ont à financer des restes à charge élevés, entre 500 euros et 1 000 euros ;
- 10 % ont un reste à charge "tout-à-fait substantiel" supérieur à 1 000 euros par an, et pour 5 % des assurés ce reste à charge dépasse 1500 euros ;
- plus édifiant encore, 1 % des patients, non bénéficiaires de la CMU complémentaire, doit même s’acquitter d’un montant pouvant être "supérieur à 3 000 euros par an".

"Des chiffres qui viennent confirmer les nombreux témoignages de personnes confrontées à des difficultés d’accès aux soins du fait de la multiplication et de l’augmentation régulière des participations financières imposées aux malades : forfaits, franchises, dépassements d’honoraires", note l’Observatoire.

D’autres focus à venir

L’Observatoire citoyen des restes à charge en santé est "une démarche dans le temps qui propose un suivi régulier de l’évolution des sources de dépenses de santé non prises en charge par le système d’assurance maladie. Le premier focus général proposé sur les dépassements d’honoraires fera l’objet de ce suivi, qui sera au fil du temps enrichi par des analyses ponctuelles sur certains aspects liés aux dépassements permettant d’en comprendre plus finement les mécanismes et les implications sur les restes à charge : la question des dépassements en secteur 1, celle des dépassements facturés dans le cadre de l’activité libérale à l’hôpital public, celle du lien entre niveau de dépassements et démographie médicale", indique l’Observatoire citoyen. "Par ailleurs, nous nous attacherons à réaliser d’autres focus complémentaires tout au long du développement de cet Observatoire citoyen, notamment pour : documenter d’autres sources de restes à charge comme ceux liés aux médicaments, aux transports médicaux, aux dispositifs médicaux, etc. ; analyser les situations spécifiques du dentaire et de l’optique ou de l’auditif, domaines peu investis par l’assurance maladie obligatoire ; s’interroger sur le rôle joué par les complémentaires santé pour réduire les restes à charge", expliquent les initiateurs de ce projet. Un gros chantier en perspective.