Santé : "Libérez nos données !"

Publié par jfl-seronet le 15.02.2013
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Droit et socialbase de donnéessanté publique

Depuis plusieurs décennies maintenant des informations de santé sont collectées dans de nombreuses bases de données informatisées. Au premier rang desquelles figure le système national d’information inter-régimes de l’assurance maladie (SNIIRAM). "Libérez nos données !", réclame un communiqué du Collectif interassociatif sur la santé (24 janvier). Explications.

"Nous avons besoin de ces données. Non pas des données individuelles nominatives légitimement protégées par la loi, sous le contrôle de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, indique le CISS. Mais des données collectives anonymes qui constituent un bien commun, de connaissance et de savoirs potentiels, dont nous sommes privés alors que ces données ont été collectées par des services financés par nos impôts et nos cotisations. Nos données nous appartiennent ! Nous avons besoin de ces données parce que nous en avons tous assez d’attendre un scandale sanitaire pour nous apercevoir que nous aurions pu savoir, et donc l’éviter ou l’atténuer, si on nous avait laissé chercher. Qui peut croire que la dérive des prescriptions du Mediator ou des pilules de 3ème et 4ème générations n’était pas lisible pour qui pouvait et voulait le détecter ? On aurait du nous laisser voir et faire savoir", avance le CISS.

"Nous avons besoin de ces données pour plus de démocratie dans les décisions de santé publique car nous en avons assez d’un débat "formaté", sur la base d’analyses publiques contre lesquelles nous ne pouvons produire aucune contre-expertise fondée sur une approche citoyenne des faits. Ceux qui décident critiquent nos sondages et nos témoignages, mais ils ne nous donnent pas l’accès aux bases de données ! Ils ne nous laissent même pas la chance de confronter nos témoignages et notre approche de terrain avec des analyses statistiques en population globale, dénonce le Collectif. Nous avons besoin de ces données pour gagner nos combats. Récemment encore, le Conseil d’Etat rejetait une requête de notre collectif au motif que nous ne rapportions pas la preuve. Mais nous sommes privés d’un droit au procès équitable dans la mesure où nous sommes privés d’accès aux données publiques pour démonter que nous avons raison. Combien de fois pressentons-nous qu’une mesure décidée en vue de faire des économies et en fait une mesure coûteuse et combien de fois avons-nous été privés de le démontrer. Devant les juges comme devant l’opinion".

Et le CISS de compléter : "Nous avons besoin de ces données pour faire nos choix dans les prestations de soins, car elles ne sont pas toutes de même qualité. Et elles ne sont pas toutes pertinentes. Cela aussi, nous avons le droit de le savoir. Car nul n’a à être contraint à des soins inutiles. Et nul ne doit payer un prix disproportionné. Il en va de l’accès à des soins de qualité (….) Pour toutes ces raisons, le CISS, qui dispose en théorie d’un accès à certaines données par sa participation à l’Institut des Données de Santé mais pas des moyens de les exploiter, est membre de l’initiative Transparence Santé et appelle à signer son manifeste".

Commentaires

Portrait de ouhlala

Si on en croit la fin de l'article, le CISS, de par sa participation à l'Institut des données de santé, dispose d'un accès à certaines données mais pas des moyens de les exploiter. Ce qui signifie en clair qu'il a besoin d'argent pour payer des statisticiens pour analyser les données en questions. Au lieu de crier à la rétention d'informations, qu'il le dise franchement : encore plus de subventions !!!

Car les données collectés par les cram sont tout à fait accessibles (et sans même participer à ce fameux Institut), pour autant qu'on ait une étude sérieuse et précise à mener... J'ai participé avec l'association de recherche en santé mentale du nord-pas de calais à une étude sur la consommation de produits psychotropes, aucune difficulté à obtenir l'ensemble des données régionales anonymisées sur la consommation de benzo, de somnifères, de produits de substitution, d'antipsychotiques etc, accompagnées des quelques variables de base disponibles dans ces fichiers de l'Assurance maladie, le lieu de délivrance, le sexe (grace au n°de sécu 1=homme 2=femme), l'année de naissance etc...

La "sécu" dispose de ses propres statisticiens qui triturent les bases de données essentiellement dans le but d'établir les tableaux de bord et de débusquer des fraudeurs. A ma connaissance il n'est pas dans ses missions de faire des études en santé publique. Et comme chacun l'aura remarqué elle a quelques petits soucis de fin de mois, comme l'Etat.

Je doute que des scandales comme le médiator aient pu être évités grâce au recours à une sorte de veille statistique comme le suggère le CISS. D'abord parce que cette veille a déjà lieu. La sécu dispose de tableaux de bords statistiques très précis sur la délivrance et le remboursement de toutes les spécialités et n'a rien vu venir... Alors on peut toujours lui demander d'en faire plus, ou d'accorder plus de moyens au Sniiram, là le CISS serait dans son rôle il me semble.

Au lieu de mettre sur pied une xième usine à gaz statistique ultracouteuse, avec les statisticiens du CISS payés par l'état bien entendu (...), en doublon de ceux du ministère de la santé, de la cnam et du Sniiram (sans parler de l'Insee et des unités du cnrs grassement payés à produire des rapports que personne ne lit), peut-être serait-il plus judicieux de prendre des mesures en amont et de travailler sur des moyens permettant d'éviter qu'on accorde des autorisations de mise sur le marché indues.

Portrait de zut

cf la note du C.A.S. (Centre d'Analyse Stratégique) de nov 12 :

http://www.strategie.gouv.fr/content/fraude-indus-non-recours-juste-paiement-na-306

Portrait de zut

Quelles genre de difficultés rencontrez-vous dans l'accès aux données au niveau national ?

Portrait de ouhlala

Bien sûr qu'il faut plus de moyens pour étudier les données disponibles innombrables, mais des moyens mieux utilisés, et certainement pas pour rajouter une couche au mille-feuilles qui a déjà démontré son inaptitude à prévenir les scandales du type médiator, mais pour réorganiser complétement l'architecture et les objectifs de la recherche en lien avec les "fournisseurs de données" que sont les caf, les cram, les hôpitaux etc...

Pour mener cette réforme, moi je ferais confiance à une mission composée d'universitaires en sciences humaines, santé publique et statistique, et certainement pas aux acteurs et lobbys partisans, état, industrie pharmaceutique et même pseudo représentants des usagers, qui même si certains sont de bonne foi, sont bien souvent entrepreneurs d'eux-mêmes avant qu'entrepreneur social. (Cf l'extravagante notion d'administration délibérative mise en avant par le CISS lui-même http://www.seronet.info/article/strategie-nationale-de-sante-avec-les-us... )

Vu les corporatismes et les crispations dès qu'on évoque une réforme quelconque, ce n'est pas demain la veille qu'on aura le courage politique de tout mettre sur la table, et les choses se font à petit train, à coup de rustines bon marché, alors que la santé est devenue une des premières préoccupations des français.