VIH/sida : tout se joue dans les cinq ans qui viennent

Publié par jfl-seronet le 27.07.2015
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Mondeépidémiologie

Les cinq prochaines années seront cruciales pour éviter un rebond de l'épidémie de VIH/sida favorisé par des taux élevés d'infections et une croissance rapide de la population mondiale. Cet avertissement est le fait d’experts du VIH réunis à l’initiative de l’Onusida et de la revue scientifique "The Lancet". Que s’est-il dit ?

Les mots sont pesés. "Les cinq prochaines années offrent une opportunité fragile pour accélérer la réponse à l'épidémie de sida et y mettre fin d'ici 2030", explique ainsi Michel Sidibé, directeur général exécutif de l'Onusida. "Si nous ne le faisons pas, les conséquences humaines et financières seront catastrophiques", souligne-t-il. A l’appui de ses propos, un rapport, réalisé par l'Onusida et la revue médicale "The Lancet" ; rapport qui appelle à donner à la maladie une haute priorité dans les objectifs de développement de l'Onu après 2015. Ce document pointe les bonnes nouvelles, à commencer par l'avènement en 1996 des trithérapies antirétrovirales, qui ont sauvé des millions de vies, en permettant de contrôler l'infection.

Pas de quoi être rassurés…

"De 2001 à 2013, l'incidence annuelle des infections dues au VIH a diminué de 38 %, passant de 3,4 millions en 2001 à 2,1 millions en 2013". Chez les enfants, entre 2002 et 2013, elle a "diminué de 58 %, avec 240 000 nouvelles infections en 2013, contre 580 000 en 2002", note le rapport. En Afrique du Sud, l'un des pays les plus touchés, l'espérance de vie moyenne a augmenté en 2005 pour la première fois depuis 1997. Le rapport ne peut que constater que "des progrès sans précédent" ont été "accomplis dans le monde pour élargir l’accès au traitement contre le VIH", mais il indique surtout que le "rythme des nouvelles infections à VIH ne se réduit pas suffisamment vite".

"Combinée à une croissance démographique élevée dans certains des pays les plus durement touchés, cette situation contribue à l’augmentation du nombre de personnes vivant avec le VIH qui auront besoin d’un traitement antirétroviral pour rester en vie", note le rapport. "Nous devons agir maintenant (…) Sans cela, les conséquences humaines et financières seront catastrophiques", a expliqué Michel Sidibé.

Des sujets de préoccupation demeurent

En 2013, 1,5 million de personnes sont mortes de causes liées au sida, plus de 10 millions n'avaient pas encore commencé le traitement antirétroviral, et, sur les 35 millions de personnes vivant avec le VIH, 19 millions ignoraient qu'elles étaient infectées, rappellent l’Onusida et "The Lancet". "Elargir l'accès durable au traitement est essentiel", selon Peter Piot, directeur de la London School of Hygiene and Tropical Medicine et ancien directeur de l’Onusida. "Nous devons aussi relancer les efforts de prévention, en particulier parmi les populations les plus à risque, tout en éliminant la discrimination juridique et sociétale", ajoute-t-il.

Des fonds manquent cruellement

"Bien que bon nombre de pays disposent d’une marge de manœuvre pour assumer une plus grande responsabilité partagée en augmentant leurs financements alloués à la riposte au VIH, le rapport indique clairement que l’on a besoin de toute urgence d’une solidarité mondiale d’ampleur pour investir dès le début de cette fenêtre d’opportunité. Le besoin d’investissements se fait particulièrement sentir dans les pays à revenu faible durement affectés par le VIH", note-t-il. Fort logiquement, le rapport insiste beaucoup sur le financement. "Il faudra 36 milliards de dollars chaque année pour atteindre l'objectif des Nations Unies pour 2030". L’effort actuel est de l'ordre 19 milliards de dollars (17 milliards d’euros) par an. On voit le gouffre entre les deux chiffres. Dans les pays africains pauvres, durement frappés, la lutte contre le VIH/sida exigera jusqu'à 2,1 % du produit intérieur brut (PIB) par an et au moins un tiers des dépenses de santé du gouvernement et un "soutien international" sera "nécessaire pour de nombreuses années à venir", explique le Rapport. Une chose est sure, selon la Commission Onusida-"The Lancet", le monde doit accélérer ses efforts de riposte au sida de façon radicale ou sera confronté à plus d’infections à VIH et de décès qu’il y a cinq ans.

La Commission Onusida "The Lancet"
Créée au début 2013 par l’Onusida et "The Lancet", la Commission réunit 38 chefs d’Etat et responsables politiques, spécialistes du VIH et de la santé, jeunes, activistes, scientifiques et représentants du secteur privé pour faire en sorte que les enseignements tirés de la riposte au VIH/sida puissent être appliqués pour transformer les approches des pays et des partenaires en matière de santé et de développement.