Conte zen

Publié par concombremasqué le 09.06.2015
663 lectures

Les deux moines et la jeune femme

Conte Japonais

 Utagawa Kunisada

Deux moines, l’un jeune, l’autre vieux, robes safran, crânes rasés, sandales aux pieds nus, rentrent en leur couvent un beau soir d’été.

« Notre journée a été longue et fatigante, frère Ushi, dit le plus jeune, mais nous avons bien honoré Bouddha, et récolté en mendiant notre content de riz et de pièces de cuivre. Le maître nous félicitera certainement.

-Oui…, fait distraitement le moine plus âgé, et il ajoute avec bonté : Ne soyez pas inquiet, frère Toshibu, le maître apprécie votre zèle.

Les saints hommes poursuivent leur voyage en silence. Sur le bas-côté, une jeune séduisante aux vêtements coûteux est assise sur une grosse pierre, et semble attendre du secours. Ni barque, ni passeur.

Le moine plus âgé, avec simplicité, prend la femme dans ses bras et lui fait traverser la rivière sans qu’elle se souille le bout des souliers. La délicieuse créature le remercie d’un sourire et s’en vas. Les deux moines continuent leur chemin.

Long silence. Brusquement, n’y tenant plus, le plus jeune s’écrie :

« Frère Ushi ! Ne savez-vous pas que la règle nous interdit strictement tout contact et tout commerce avec les femmes ! »

Le vieux moine poursuit son chemin sans répondre :

« Frère Ushi !dit le jeune moine, qui s’échauffe, comment avez-vous pu porter dans vos bras une femme belle et parfumé, et lui faire traverser la rivière ?

-Frère Toshibu, dit le vieux moine. Serait-ce que vous sentez encore le poids de cette femme ? Il y a pourtant longtemps que nous l’avons laissé derrière nous ! »

 Famous Places in Edo, Hundred Beautiful Women, Horikiri Shōbu (Edo Meisho Hyaku-nin Bijo Horikiri Shōbu)

Estampes: Utagawa Kunisada (Toyokuni III)

Henry Brunel

Les plus beaux contes Zen