Croi 2014 : Traitement comme prévention : aucune transmission dans l’étude Partner (y compris dans les couples gays)

Publié par Renaud Persiaux et Emmanuel Trénado le 05.03.2014
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ThérapeutiqueTasPtraitement comme préventionindétectabilité

L’étude Partner évalue, dans la vraie vie, le risque de transmission du VIH au sein de couples sérodifférents qui ont fait le choix de ne pas utiliser systématiquement de préservatifs parce que le partenaire séropositif prend un traitement antirétroviral. Originalité : un tiers de couples gays. Aucune transmission n’a été observée, ce qui est rassurant pour tous les couples qui ont adopté cette méthode préventive.

C’est un nouvel élément rassurant pour les couples sérodifférents qui n’utilisent pas systématiquement la capote parce que le partenaire séropositif est traité et a une charge virale indétectable, une méthode baptisée TasP (traitement comme prévention).

Une méthode introduite par le célèbre avis suisse de janvier 2008 qui définissait trois critères (charge virale indétectable depuis 6 mois, bonne observance, pas d'autres infections sexuellement transmissibles) permettant à une personne vivant avec le VIH de ne plus être à risque de transmettre le VIH. Le risque résiduel de transmission était estimé à moins de 1/100 000 par les médecins suisses portés par les professeurs Pietro Vernazza et Bernard Hirschel, soit à l'équivalent de la vie courante (comme se faire écraser en traversant la route, par exemple). Ce qui avait sucité de nombreux débats.

En 2011, l’essai HPTN 052 était venu confirmer cet avis en démontrant une réduction de 96 % du risque de transmission du simple fait de la mise sous traitement. La seule transmission observée à partir d’un partenaire traité (celle qui donne 96 % et non 100 %) avait eu lieu au moment de la mise sous traitement (juste avant ou juste après), c’est-à-dire, selon les investigateurs, avant que le traitement n’ait permis de réduire la charge virale.

Une étude très attendue

Mais HPTN 052 portaient principalement sur des couples hétérosexuels, et la question de la transposition de ses résultats aux couples gays fait débat, même si l’investigateur de HPTN 052, Myron Cohen estimait que beaucoup d’arguments plaidaient en sa faveur.

En janvier 2013, le groupe d’experts anglais estimait que tant que les critères suisses sont respectés (charge virale indétectable depuis 6 mois, bonne observance, pas d’autres infections sexuellement transmissibles), il y avait tout lieu de penser que le TasP était efficace pour les rapports anaux.

C’est dire que les résultats de Partner étaient attendus, et d’ailleurs AIDES, a fait le choix d’y participer et de permettre les inclusions de participants à cette étude.

Qu’est-ce que Partner ?

Partner est une cohorte internationale qui suit des couples sérodifférents hétérosexuels ou gays qui ont des pénétrations vaginales ou anales sans préservatif alors que le partenaire prend un traitement et a une charge virale inférieure à 200 copies/ml (un critère moins strict qu’avec les 50 copies/ml, qui est le seuil admis d’indétectabilité de la charge virale en France.

Tous les 6 mois, chaque partenaire remplit un questionnaire et le partenaire séronégatif fait un dépistage. La charge virale du partenaire vivant avec le VIH doit être inférieure à 200 copies/ml. En cas de dépistage positif du partenaire qui était séronégatif à son entrée dans Partner, des analyses génétiques du virus permettent de voir si les séquences de virus sont comparables, pour éliminer les cas de transmission en dehors du couple (un risque non négligeable, un quart des contaminations dans HPTN 052 avaient eu lieu en dehors du couple, les trois autres quarts ayant eu lieu à partir du partenaire non traité).

Plus de 44 000 relations sexuelles sans préservatif

Au 1er novembre 2013, 1 110 couples étaient inclus dans l’étude, pour un suivi de 1 151 couples-année (en clair, un couple suivi pendant une année = un couple-année ; un couple suivi pendant deux années = deux couples-année, etc.) Au final, 894 couples étaient éligibles : 586 hétérosexuels et 308 couples gays (34 %). Au début de l’essai, la durée de traitement était d’environ 5 ans (allant de 2 ans à 11 ans) et les couples rapportaient des rapports sans préservatif depuis en médiane 2 ans (de 6 mois à 6 ans).

Durant le suivi, les couples avaient des rapports sans préservatif en médiane 45 fois/an (entre 16 et 90). Au total, l’étude porte sur plus de 44 500 relations sexuelles sans préservatif, dont 21 000 rapport anaux (avec ou sans éjaculation).

Avec ces chiffres, on estime qu’il y aurait dû y avoir 15 infections au sein des couples hétérosexuels et 86 au sein des couples gays si le partenaire séropositif ne prenait pas de traitement. Mais dans l’étude, aucune transmission n’a été observée.

Pas de transmission au sein du couple, des transmissions en dehors

Bien que certains partenaires séronégatifs se soient infectés durant le suivi, aucune infection n’était liée à leur partenaire stable. Ces personnes se sont contaminées en dehors du couple. En dehors du couple, les rapports sans préservatifs étaient fréquents chez les partenaires séronégatifs gays (27 %) et beaucoup moins chez les hétéros (2 %).

D’ailleurs, 4 % des hétérosexuels ont présenté des IST et 16 % pour les homosexuels (que ce soit parmi les partenaires séronégatifs ou les partenaires séropositifs). Malgré cela, aucune transmission n’a été observée à partir d’un partenaire traité. Ce résultat va dans le sens d’études qui montraient qu’en cas de traitement antirétroviral efficace, les IST ne faisaient pas augmenter significativement la charge virale, dans le sperme, ni le rectum.

Pas de nécessité d'un TPE en cas de rupture du préservatif

L’absence de transmission pendant cette première durée de l’étude ne signifie pas que le risque soit nul. En effet, si le taux de transmission est bien de zéro, sur le plan statistique, les intervalles de confiance ne permettent pas de conclure à un risque nul certain. "La démonstration d’un risque nul est tout simplement impossible sur le plan statistique, il y a toujours un intervalle de confiance, la recherche est toujours une approximation", explique l’investigateur principal Jens Lundgren, de l’Université de Copenhague. "Partner montre une nouvelle fois que le traitement est un outil préventif très efficace", poursuit-il. "Le traitement comme prévention fonctionne".

Questionnée sur le risque de transmission lorsque le partenaire séropositif est traité, Alison Rodger (University College London), qui présentait ces résultats, a d’ailleurs répondu : “Zéro risque transmission est notre meilleure estimation". Même si plus de données permettront d’affiner cette estimation.

"C’est vraiment aux personnes elles-mêmes de juger si ce qu’elles font dans leur vie est sûr ou pas sûr”, a souligné Jens Lundgren. Cela dit, “aucune poursuite judiciaire ne devrait être menée contre des personnes qui n’utilisent pas de préservatif et dont la charge virale est indétectable". De plus, "il n’y a pas d’inquiétude concernant les ruptures de préservatif : il n’y a certainement pas une indication pour la mise en route d’un TPE" (traitement post exposition).

L'étude se poursuit

Les auteurs restent prudents, ils parlent d’un risque "extrêmement faible" et ne souhaitent pas apparaitre comme faisant la promotion de rapports sans préservatif. Il n’empêche que ce nouveau résultat est très rassurant pour les couples. Les études s’accumulent et dans la littérature scientifique, toujours aucune transmission n’a été reportée au sein de couples, hétérosexuels ou gays, qui ont opté pour le TasP.

L’étude se poursuit et apportera sans doute de nouveaux éléments. L’équipe souhaite à présent inclure 450 nouveaux couples gays. Participez !

Commentaires

Portrait de Muffin64

Même si le risque nul est inexistant. Excellente nouvelle pour les couples sero-different. 

Portrait de nokia

voila que je savais bien car je suis résté 8ans en couple et on ne se protégé pas toujour mes seullement quan il y avais un troisiéme dans notre couple bref ! jen es eu la preuve qu'on ne transmé pas étan traité héllas je peux pas conseillé de pas vous protégé mes si jais fais sa sais juste que la capote fesais débendais et mon partenére aussi donc on avais décidé sa tou les deux en bien que 8ans apres il es toujour negativ voila apres quan tu trouve un nouveau mec va ten faire conprendre sa au autre  il on toujour peur  moi jaimerais qui trouve pour tuer  cet merde de virus !!

Portrait de reba

il manque un élément de comparaison, critère important dans une étude, non ?

 

il aurait fallu des données claires de transmission soit en cas d'absence de traitement, soit en cas de charge virale dite détectable...ou autre!

 

le ......"Avec ces chiffres, on estime qu’il y aurait dû y avoir 15 infections au sein des couples hétérosexuels et 86 au sein des couples gays si le partenaire séropositif ne prenait pas de traitement. Mais dans l’étude, aucune transmission n’a été observée." ...n'est pas une observation scientifique, c'est une estimation et d'ailleurs, d'où sort elle ?

 

 

 

 

Portrait de Yomi

@ Reba:

Les resultats avec ou sans tritherapie, detectable ou indetectable, le seuil de contamination a pu être observé il y a 15 ans avec l'étude Rakai de 1999:

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http://ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/10738050

"We identified 415 couples in which one partner was HIV-1-positive and one was initially HIV-1-negative and followed them prospectively for up to 30 months."

"There were no instances of transmission among the 51 subjects with serum HIV-1 RNA levels of less than 1500 copies per milliliter"

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http://aides.org/actu/les-ist-n-augmentent-pas-la-charge-virale-dans-le-...

"Bernard Hirschel disait qu’il n’y avait guère de raisons pour que la méthode ne puisse s’appliquer aux gays. Soulignant, avec une pointe d’humour, que certains oubliaient un peu vite que des hétérosexuels pratiquent aussi la sodomie."

"Rappelons tout de même que dans la première étude, celle menée à Rakai en Ouganda et publiée en 1999, avec les tout premiers traitements ARV disponibles, les chercheurs n’avaient pas pu observer de transmission en dessous de 1500 copies. Cela ne veut pas dire qu’il s’agit d’un seuil absolu, mais cela indique qu’il y a une marge de manœuvre au-delà des 50 copies."

Portrait de reba

merci Yomi, mais l'étude ne dit pas combien de séroconversions sans traitement il y a eu! elle dit ce que voulait lui faire dire son concepteur (et parions que c'est une des industries des arv!!! j'exagère)! :  moins de charge virale , moins de contaminations etc....

 

je n'ai jamais vu une étude avec un  bras sans ttmt et un autre avec!  et toi?

 

 

Portrait de hunckut

@Reba

C'est bien de jouer les "lanceurs d'alerte" à pas cher mais as-tu réfléchi une seconde avant d'écrire? :-D

Comme TOUTE transmission provient fatalement d'un séropo contaminant (en couple ou pas), le "bras manquant" de l'étude... c'est tous les chiffres de contamination depuis 35ans !!!

TU dis "combien de contaminations sans traitement" ? Réponse : TOUTES

Alors dans le détail, on a jamais pu déterminer combien de rapports sexuels avec combien de partenaires contaminants et à quel niveau de virus, bien sûr, il faudrait une boite noire dans le cul de chaque personne !

Mais as-tu réfléchi une seconde :

-Penses-tu que tu serais d'accord pour participer à une étude ou tu baises sans précaution avec des (ou un) partenaire ultra-contaminant pour voir à quel moment tu vas te le choper???

Peut-être pas, hein? :-D

Ben les autres, c'est la même chose, tout le monde n'a pas envie de se sacrifier pour l'avancement de la science!!!

Il serait bien difficile de réunir un panel de seronegs prêts à se faire contaminer pour avoir un "bras" de l'étude témoin, difficile, inutile et même pas très conforme à l'ethique médicale  (qui consiste rarement à rendre les gens malades ou morts!)

Mais je te rasure, on parle tous parfois avant de réfléchir ;-)

Portrait de hunckut

En science, il est généralement impossible de démontrer que quelquechose n'existe pas !

On peut mesurer et décrire quelquechose qui est, on peu difficilement dépontrer l'inverse.

Je ne sais plus quel auteur (Asimov?) disait:

"il existe peut-être dans une galaxie très lointaine une planéte en forme de ballon de foot géant entièrement en chocolat. Hélas, si peut raisonablement douter qu'elle existe, on  ne pourra jamais démontrer qu'elle n'existe pas! "

Idem, dieu, le père Noêl ou la contamination par un seropo indétectable !

L'article cite très justement "En effet, si le taux de transmission est bien de zéro, sur le plan statistique, les intervalles de confiance ne permettent pas de conclure à un risque nul certain".

On ne pourra jamais atteindre le zéro en language scientifique ! (d'autant que la médecine reste un art et non une science exacte)

La question à se poser n'est pas "est-ce que le risque est bien nul?"

La question à se poser c'est "pourquoi se poser la question" ou "est-ce que je ne prendrais pas des risques autrement plus grands dans des tas d'actes de la vie sans me poser la question" (comme rouler en voiture par exemple)

Autrement dit, si le risque dans l'état actuel des études est bien inférieur à 1/100.000 comme il me semble avoir lu ailleurs, on ne continue les études que parce que le sujet fait toujours très peur tout simplement ! (et que "l'avancement de la science se fait au rythme de la mort des maîtres de chaire ou de conférence" ;-)

Est-ce que vous vous inquiétez autant de la grippe dont le risque de mortalité est pourtant bien supérieur?

Non

De la mort par accident auto, infiniment plus risqué?

Non

Du risque de chopper un SRAS à l'hôpital ?

Non

Et tant mieux, c'est ce qui nous permet de vivre et d'avancer (si vous avez répondu "oui" aux trois questions, c'est que vous êtes parano -comme moi! ;-)

La plupart des gens ont peur si on leur parle du très faible risque d'accident d'avion au moment du décollage. C'est très illogique pourtant! Mais c'est humain!

Et c'est là qu'est la différence entre un "zéro risque" en language scientifique et un zéro risque en language courrant!

Les scientifiques se basent sur des chiffres formels, le commun des mortels se base sur des peurs irraisonnées!

Si on avait eu les traitements actuels à l'apparition du virus, on aurait parlé de maladie chronique, et en l'absence de contamination par des seropos indétectables... on ne se serait simplement pas posé la question ni fait d'étude sur le sujet (on étudie pas un phénomène jamais observé, on a assez à faire avec ceux observables sans explication!).

Ce qui est très dommage, c'est que le rôle du journalisme de vulgarisation n'est pas rempli dans ce domaine, traduire le language scientifique en language courrant!  Les auteurs de l'article de séronet ne sont pas en cause bien sûr mais plutôt tous les autres médias qui retiennent l'info depuis cinq ans! (pas seulement cette info là! ;)

En language courrant, en effet, ce qu'il faudrait clamer haut et fort, sans renvoyer au language utilisé par les scientifiques c'est en effet :

Il n'y a AUCUNE contamination avec un pârtenaire séropo indétectable !!!

ZERO RISQUE !!!

La question n'est pas sur le risque avec un indétectable !

La question est le peu de foi qu'on peut accorder aux simples dires de n'importe qui, conjoint y compris !!! ;)

J'avais pensé à une méthode pour diminuer le risque réel de façon positive :

Laisser traîner à la vue d'un amant de passage (sans capote^^) ses dernières anayses!

Bien sûr il y aura toujours des tarés pour faire des faux (comme pour faire des trous dans les capotes) mais ils sont heureusement très rares!

Si ça pouvait devenir une habitude comme offrir à boire, ça permettrait progressivement d'isoler les "tarés" qui contaminent volontairement (et les autruches bien plus nombreuses et ausi dangereuses, rien n'a évolué depuis les 80's de ce coté là hélas) du reste des partenaires à sexualité a risque.

Faudrait que je relance l'idée, ailleurs! (sans trop d'espoir non plus ;)