Avec ou sans casse ?

Publié par jfl-seronet le 25.01.2010
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AP-HP
Fusions, déménagements, regroupements, fermetures, licenciements, synergie… Le temps est aux grandes manœuvres dans les hôpitaux publics et plus précisément dans le domaine du VIH où les changements annoncés ou en cours sont multiples notamment à Paris. Alors que se passe t-il ?

Y a-t-il une réorganisation des services de prise en charge du VIH en Ile-de-France ?
Oui. C'est d'ailleurs un véritable bouleversement qui se déroule ou se prépare. Le premier signe, il y a de cela quelques mois, a été la fermeture du service VIH de l'hôpital Saint-Joseph à Paris, dont les patients, dans une impréparation totale, ont été obligés de se trouver quasiment seul une place pour être suivi ailleurs. Alors, que va-t-il se passer à Paris ? Libération (21 janvier) a un début de réponse : "Des fusions en cascades avec à la clé des fermetures. C’est le cas des services de l’hôpital Tenon et de Saint-Antoine, tout comme ceux de l’hôpital Lariboisière et de Saint-Louis (…) Le secteur des maladies infectieuses de l’hôpital du Kremlin-Bicêtre et celui de Paul-Brousse (Villejuif) vont être regroupés. Même sort pour l’hôpital Bichat et celui de Beaujon (Clichy). A l'Hôtel-Dieu, dont l’avenir reste incertain, il est prévu de créer un imposant centre de consultations anti-VIH… sans qu’il y ait le moindre lit d’hospitalisation". Il est prévu que les services VIH de trois hôpitaux (Cochin, Necker et Pompidou) s'y retrouvent. Cette situation suscite pas mal de craintes surtout chez les personnes malades. L'enjeu est d'autant plus important qu'il ne faut pas perdre de vue que la moitié des personnes touchées par le VIH en France sont prises en charge en Ile-de-France.

Quelles seront les conséquences pour les personnes suivies dans ces services ?
C'est un des principaux problèmes. On ne sait pas. Beaucoup vont changer d'hôpital et certains seront peut-être contraints (pour cause d'éloignement géographique par exemple) de changer de médecin, même s'ils n'en ont pas envie. Jean-Yves Fagon, directeur de la politique médicale à l’AP-HP (Assistance publique/Hôpitaux de Paris), a indiqué lors de la Journée COREVIH Ile-de-France : "On ne touchera pas à l'offre de soins" (Libération, 22 janvier). Il faut donc comprendre que, malgré les regroupements de services, il n'y aura pas moins de médecins ou d'infirmières… "Mais comment vous croire ? lui a répondu un médecin. Le seul objectif est de faire des économies." Libération affirme que selon "plusieurs estimations circulant au sein des services concernés, le nombre de lits d’hospitalisation pour le sida devrait diminuer de moitié."

Comment réagissent les médecins ?
Mal. Comme l'explique Eric Favereau dans Libération (22 janvier), les médecins ont le sentiment que "tout se déroule dans une relative opacité", ce qui suscite leur agacement. Un agacement dont le professeur Jean-Yves Fagon, directeur de la politique médicale à l’AP-HP (Assistance publique/Hôpitaux de Paris), a pu avoir un aperçu lors de la Journée du COREVIH Ile-de-France du 21 janvier. "C’est incroyable. Evidemment que l’on peut imaginer des regroupements, mais tout cela se fait sans concertation, et surtout sans aucune cohérence sur les filières de soins. Aucun d’entre nous n’y a été associé", a dénoncé le professeur Willy Rozenbaum de l’hôpital Saint-Louis, cité par Libération. "Qu’est-ce que je dois dire à mes malades ? Que, demain, on va aller à l’Hôtel-Dieu, mais que je ne pourrais pas les hospitaliser ?", critique un médecin lors de cette même réunion. "Regrouper les services de maladies infectieuses de l’hôpital Tenon et de Saint-Antoine, pourquoi pas , mais, avant même que le projet médical ne soit formalisé, certains en sont à se répartir le personnel et les lieux. Comment voulez vous motiver les équipes ?», a expliqué le professeur Gilles Pialoux (Hôpital Tenon).

Cette réorganisation ne concerne t-elle que les services VIH ?
Non. Elle concerne, pour Paris et l'Ile-de-France, l'ensemble des hôpitaux et des services (maternités, service des grands brûlés, ORL, etc.). Des réorganisations du même type existe aussi dans des villes comme Lyon ou Marseille. Pour l'Ile-de-France, il faut d'abord rappeler qu'en 2008, l'AP-HP a adopté le principe de regrouper les 37 établissements en 12 groupes de soins. C'est pour cette raison notamment que les services VIH connaissent un tel chambardement. Il va donc y avoir des fermetures, des regroupements et peut-être même de rares ouvertures… Ce mouvement touchera tout le monde ou presque. Une des difficultés, c'est que le travail en cours n'est pas un modèle de transparence. Cela donne donc des choses un peu étranges. Par exemple, lors de la réunion du COREVIH Ile-de-France, il a été dit que l’Hôtel-Dieu devrait accueillir les services VIH de trois hôpitaux parisiens (Cochin, Necker et Pompidou). Soit. Dans une interview au Parisien (23 ajnvier), le directeur de l'AP-HP explique que : "Du fait de la vétusté de certains locaux, moderniser en regroupant revient souvent moins cher que de rénover". Et il cite un exemple à Paris, celui de l’Hôtel-Dieu justement dont "la seule mise aux normes (…) coûterait ainsi 280 millions d’euros, alors que la création de 450 nouveaux lits à Necker ne représente que 180 millions d’euros." Alors que comprendre, cela se fera ou pas ?

Y aura-t-il des suppressions de postes dans les hôpitaux ?
Oui. D'abord trois chiffres pour comprendre : l'AP-HP compte aujourd'hui 37 hôpitaux et 676 services cliniques, soit 92 000 personnes salariées. Directeur de l'AP-HP Benoît Leclercq a confirmé la suppression d'ici 2012 de plusieurs milliers d'emplois. Il a d'ailleurs détaillé son plan de réorganisation dans une longue interview au "Parisien" (23 janvier). "Nous devons effectivement supprimer entre 3 000 et 4 000 postes sur un total de 92 000. La moitié environ concernera les soignants et les médecins, l'autre moitié le personnel administratif", a-t-il expliqué. L'AP-HP s'est fixée un objectif de 90 à 100 millions d'euros d'économies par an via des suppressions d'emplois. La finalité de cette stratégie est de retrouver un "équilibre budgétaire en 2012."  Avec ou sans casse ?