Comment les séropos québécois s'organisent pour aller aux Etats-Unis

Publié par olivier-seronet le 15.07.2008
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Destination prisée des Québécois, les Etats-Unis discriminent toujours les personnes séropositives qui ne peuvent entrer et séjourner aux Etats-Unis qu'à des conditions très précises. Explications.
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Depuis toujours, la côte Est américaine représente une destination de prédilection pour les touristes québécois. Outre l’impact de la proximité sur les coûts de transport et la durée des déplacements, il n’est pas nécessaire pour les Québécois d’avoir un visa de séjour. Ce qui permet ainsi d’organiser, à la dernière minute, des escapades de quelques jours pour skier, magasiner, visiter un ami ou même des séjours prolongés pour fuir l’hiver ou pour visiter de la famille. Mais en 1987, ce droit a été retiré aux personnes séropositives. En effet, à ce moment, les Etats-Unis ont fermé leurs frontières à toute personne vivant avec le VIH.

La politique des USA
"Si une personne séropositive passe la frontière sans déclarer son statut sérologique et qu’elle est arrêtée par un agent, elle sera refoulée sur-le-champ. Mais, entre le moment où un agent des douanes découvre la séropositivité d’une personne et sa déportation, cette dernière est sous la juridiction de la Homeland Defense Agency, le même département qui traite de la défense contre les actes de terrorisme, et, si un transport n'est pas immédiatement disponible, elle pourrait alors être détenue en attendant qu'on en trouve un.", indique un document officiel américain*. Pour autant, de nombreux Québécois séropositifs continuent à y voyager sans déclarer leur statut sérologique. Pour ce faire, ils ont développé des astuces pour ne pas être découverts et arrêtés. Certains dissimulent leurs traitements anti-VIH dans des contenants pour vitamines. D'autres envoient, quelques jours avant leur séjour, par courrier leurs pilules à leur hôtel ou à une connaissance.

Quelle est la situation actuelle ?
Aujourd’hui, la "position officielle des Etats-Unis à l'égard du visiteur séropositif reste relativement inchangée, et ce, malgré un amendement apporté au début de l'année 2008 accordant un visa de visiteur de trente jours sous conditions*. Il s'agit de :

  • "de fournir par écrit le détail de ses traitements ;
  • de se munir d'une assurance médicale reconnue par les services sociaux américains ;
  • de renoncer à tout droit de faire une demande de changement de statut de visa durant son séjour, fermant ainsi la porte aux demandeurs d'asile ;
  • de voyager avec tous les médicaments nécessaires ;
  • de ne pas excéder les trente jours permis ;
  • de prouver qu'il n'aura pas de comportement pouvant mettre le public américain à risque."

Cet amendement soulève plusieurs questions qui, du fait du caractère nouveau de la disposition, n’ont pas encore reçu de réponses. Ainsi, les Québécois séropositifs ont difficilement accès à une assurance médicale privée ; dans ce contexte, comment pourraient-ils avoir accès à une assurance médicale reconnue par les services sociaux américains ? Autre interrogation : qu'entendent les autorités américaines par "comportement pouvant mettre le public américain à risque" ?
En ce sens, les Québécois séropositifs continueront sûrement à traverser les douanes américaines "clandestinement" tout en soufflant très fort une fois rendus sur le sol américain. Tous les autres assez fortunés pour voyager continueront de choisir des pays qui les accueillent sans discrimination.


Par René Légaré, COCQ-Sida
(*) Adaptation et traduction libre de la source "Classes of Aliens Ineligible to Receive Visas"