HAS : le TRT-5 donne son avis sur Descovy

Publié par Rédacteur-seronet le 04.07.2017
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ThérapeutiqueDescovy

Depuis six mois, la Haute autorité de santé (HAS) permet aux associations de malades, d’usagers de la santé, de contribuer à l’évaluation des médicaments via une procédure expérimentale. A cette occasion, le TRT-5 a participé à l’évaluation du remboursement de Descovy (emtricitabine + ténofovir alafénamide/Gilead), un traitement du VIH.

"En décembre 2016, le laboratoire Gilead Sciences retire sa demande d’inscription de l’antirétroviral Descovy des médicaments remboursables suite à la note insuffisante à ses yeux obtenue par la nouvelle combinaison d’emtricitabine et de ténofovir alafénamide [au niveau de la HAS, ndlr] qui ne reconnaitrait pas la plus-value du produit. Suite à ce retrait, le TRT-5 avait livré son analyse de la situation à Seronet. En février 2017, le laboratoire dépose auprès de la Haute autorité de Santé, une seconde demande d’inscription pour Descovy. Dans le cadre de la procédure de contribution des associations à l’évaluation du médicament, le TRT-5 a fait part de son avis auprès de la Haute Autorité de Santé.

Avis du TRT-5 – Evaluation de Descovy

"Descovy est une nouvelle association antirétrovirale combinant de l’emtricitabine (FTC) avec du ténofovir alafénamide (TAF). Le ténofovir alafénamide a une pénétration renforcée dans les cellules tout en diminuant ses niveaux circulants dans le sang d’environ 90 % par rapport au ténofovir disoproxil fumarate (TDF). Son introduction vise une efficacité équivalente au TDF tout en réduisant la toxicité rénale et osseuse grâce à ces propriétés originales. Le TAF aurait ainsi vocation à se substituer au TDF.

Des essais présentés lors de la Croi 2017 viennent étayer les premiers résultats déposés lors de la première demande d’AMM [autorisation de mise sur le marché, ndlr] du laboratoire et vont dans ce sens. Comparé au TDF, le TAF montre une moindre altération des paramètres rénaux et osseux à 48 semaines. Les résultats à 144 semaines confortent cette moindre toxicité chez des [personnes n’ayant jamais pris de traitement] comme lors de switch de TDF au TAF.

Pourtant en fin d’année 2016, des publications mettent en évidence des effets indésirables (EI) survenus et déclarés dans les essais de la firme. Mis en évidence dans une méta-analyse, ces effets indésirables groupés dans la classe des troubles neuro-cognitifs s’avèrent être des maux de tête durant les premières semaines du passage de Truvada à Descovy. Lorsque nous avons interrogé le laboratoire sur cette question, celui a nous a informés de la disparition de ces effets indésirables après quelques semaines de traitement. D’autres effets, comme des troubles lipidiques, sont mis en évidence, car il a été observé une augmentation significativement plus importante des paramètres lipidiques (cholestérol total, fractions LDL et HDL et triglycérides) sous TAF que sous TDF. Il nous apparait essentiel de rester vigilants sur ces effets indésirables. Nous soulevons la nécessité d’une étude à long terme de phase IV, afin de clarifier cet aspect. D’autant que le plan de développement ne permet pas d’observer en vie réelle les effets indésirables du TAF, mais seulement de l’observer en combinaison avec des antirétroviraux connus pour leurs effets indésirables (elvitégravir, cobicistat, rilpivirine). Nous estimons que la mise en place d’un plan de gestion des risques est indispensable.

Aussi, il nous semble important de rappeler que le calendrier de sortie du TAF et globalement la stratégie de la firme nous questionnent. En termes de calendrier, l’arrivée de cette optimisation de traitement semble tomber à point nommé. En effet, le TAF a été évoqué il y a plusieurs années et sa commercialisation par le laboratoire n’est effective que récemment. Quel calendrier doit-être considéré ? Le calendrier des brevets plutôt que celui de l’intérêt des personnes. D’autant que l’arrêt de l’ATU [autorisation temporaire d’utilisation] du Vemlidy [ténofovir alafénamide], refus de prolongation de trois mois après l’obtention de son AMM pour l’indication de traitement VHB, nous a surpris. En effet, des personnes co-infectées dont l’état nécessitait le TAF n’ont pas pu accéder à la molécule. Pour finir, le TRT-5 s’interroge sur le prix du Descovy et nous resterons vigilants à ce que le prix ne crée pas des inégalités d’accès aux molécules."