Piqûre de rappel pour Harper

Publié par jfl-seronet le 05.02.2010
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programme d’échange de seringueprison
Dans une interview au journal Métro à Montréal (3 février), le Réseau juridique canadien VIH/sida demande au gouvernement de Stephen Harper d’offrir des seringues stériles aux personnes détenues. Deux Rapports, intitulés "Sous la peau" et "Pour changer net", comprenant de nombreux témoignages de personnes concernées, demandent, une nouvelle fois, un changement de politique. Extraits.
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"La prévalence du VIH et de l’hépatite C est de 10 à 20 fois plus élevée que la moyenne nationale au sein de la population incarcérée, rappelle Gilles Marchildon, porte-parole du Réseau. Et plus de 90 % des personnes en prison vont éventuellement réintégrer la communauté. Les infections qu’elles pourraient avoir contractées à l’intérieur des murs risquent de se propager davantage dans la collectivité à leur sortie. C’est donc une question d’intérêt public." Pour Gilles Marchildon : "Le gouvernement préfère passer des lois qui vont provoquer une augmentation du nombre de personnes arrêtées et emprisonnées. Il a investi beaucoup d’argent et de ressources pour empêcher que les drogues pénètrent dans les prisons. Et ça ne fonctionne pas (…) C’est dommage parce que l’approche de réduction des méfaits serait beaucoup plus productive, coûterait moins cher et réduirait la propagation des virus." Lorsqu'on lui demande si les programmes d'échange des seringues ont fait leurs preuves, Gilles Marchildon rappelle qu'il y "a plus de 60 programmes dans 11 pays différents qui en ont un. En Suisse, ils ont commencé le programme en 1992. Les gardiens étaient très récalcitrants au début, mais maintenant, ils appuient le programme. Ils constatent qu'il y a moins d'incidents où le personnel se pique par accident. Les prisonniers ne sont pas obligés de cacher les seringues et ils sont moins infectés."

Parallèlement à cette interview, la presse canadienne s'est largement fait l'écho de la publication de "Sous la peau", le tout récent Rapport du Réseau juridique canadien VIH/sida qui présente des déclarations sous serment et des témoignages de personnes qui ont connu l'usage de drogue ou le partage de seringues dans des prisons fédérales, aux quatre coins du Canada et de celui intitulé "Pour changer net". Comme le précise le site canadien d'information CNW : ces "témoignages personnels donnent un visage humain à la dépendance et à l'usage de drogue dans les prisons du Canada", mais surtout les personnes qui témoignent "ajoutent leurs voix à celles des experts de plus en plus nombreux qui exhortent le gouvernement à mettre en œuvre des programmes d'échange de seringues dans les prisons du Canada. "J'ai vu des prisonniers s'injecter de l'héroïne, de la cocaïne et du speed avec des seringues fabriquées à partir de stylos ou d'autres objets. La plupart des personnes (qui s'injectaient) partageaient des seringues, en prison", explique un témoin de "Sous la Peau". Un autre affirme que "dans le système carcéral, il y a tellement de drogues aux alentours et tellement de personnes qui en consomment, qu'il est très difficile d'échapper à l'usage de drogue." "Je dirais qu'environ un tiers de la population de la prison en prenait par injection. C'était facile d'obtenir de la drogue. Une fois la drogue entrée dans la prison, les gardiens ne s'en préoccupaient pas vraiment, parce qu'on était déjà dans la pire situation possible dans notre vie", raconte un troisième témoin.

"Les voix de ces femmes et hommes courageux brossent un portrait de la souffrance évitable et d'une discrimination systémique qui sont en contradiction avec les lignes directrices internationales pertinentes ainsi qu'avec la Charte canadienne des droits et libertés", affirme Sandra Ka Hon Chu, avocate, analyste principale des politiques au Réseau juridique. C'est elle qui a rédigé le rapport. "Les preuves scientifiques et justifications légales à l'appui de la mise en œuvre des programmes d'échange de seringues en prison sont depuis longtemps établies (…) mais le gouvernement canadien se refuse encore à mettre en œuvre ce service de santé dont l'efficacité est démontrée (…) Nos législateurs doivent entendre ces témoignages troublants et répondre à l'urgent appel en faveur de la dignité, de la santé et des droits humains."
Les rapports "Sous la peau" et "Pour changer net" sont accessibles sur www.aidslaw.ca/lespublications