Plateformes vibrantes : pour ou contre ?

Publié par olivier-seronet le 09.06.2008
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sport
Les plateformes vibrantes (Power plate, Engy, Hypergravity, Vibe-trainer, etc.) sont à la mode. Bénéfiques selon certains utilisateurs, elles sont faciles d'accès, mais coûteuses et contre-indiquées chez nombre de personnes vivant avec le VIH. Alors, outil miracle ou pratique à risques ? Laura, utilisatrice, et Yves, kinésithérapeute, donnent leur avis.

Laura : mes nouveaux muscles

Je suis coinfectée VIH/VHC, depuis plus de 25 ans. Les trithérapies sont arrivées à temps pour me sauver… Mais j'avais perdu tous mes muscles. Je me suis retapée, j'ai regrossi, mais je n'étais pas en état de faire du sport ! Je me suis remise à travailler. J'ai eu une lipoatrophie sévère ; la graisse est partie, les jambes toutes maigres, plus de fesses, des bras squelettiques, crevée… Je me suis retapée encore. J'ai un peu regrossi au fil du temps, mais je ne suis plus très sportive. Je suis flemmarde. J'ai essayé, il y a déjà 2 ans, la Power plate. J'ai vérifié que je n'avais pas de contre-indications. J'ai essayé et n'ai pas eu de courbatures. Je ressentais un effet "tonique". J'ai pris un forfait de 60 séances (900 euros répartis sur l'année). J'y allais 2 fois par semaine. Il m'a fallu une vingtaine de séances pour obtenir des résultats visibles, avoir plus de mollets, remplacer les graisses des fesses par un peu de muscles, me redresser le dos, avoir des bras corrects et plus de force aussi, plus de tonus… Je continue, mais je n'y vais qu'une fois par semaine, pour entretenir. Depuis 10 mois, je suis en plus le traitement de l'hépatite C, et là, de nouveau amaigrissement, refonte des muscles chèrement gagnés. Je suis fatiguée, plus souvent malade. Je saute des séances (en prévenant), mais quand je peux, j'y vais quand même pour que mes petits nouveaux muscles ne partent pas. J'y retournerais 2 fois/semaine quand j'aurais fini ce traitement pour les récupérer.

 

La femme qui tient ce mini centre est très sympa. Elle me conseille sur les zones à travailler plus et surveille mes progrès. Je ne fais pas ça pour le cœur, ni pour des problèmes métaboliques que je n'ai pas. Je fais ça en remplacement du sport que je ne ferais pas de toute façon, pour retrouver une meilleure image de mon corps. J'appelle ça "ma gym" et j'assume son côté feignasse…


Yves : Coûteux et inutile, voire contre-indiqué

Obtenir en 20 minutes d'exercice "passif" le même résultat qu'en une heure d'exercice actif : une telle pratique, séduisante au premier abord, s'avère être une vraie mauvaise idée pour certaines personnes en traitement. L'exercice physique régulier, d'intensité modérée, d'environ une heure 3 à 4 fois par semaine est recommandé pour compenser les conséquences des lipodystrophies (accumulation ou perte de graisse) et répondre aux désordres provoqués par les multithérapies anti-VIH. Dans ce type d'activité (marche rapide, jogging, vélo, natation, etc.), il y a consommation d'oxygène pour produire de l'énergie à partir du glucose (les sucres) et des acides gras (les graisses). L'entraînement sur plateforme vibrante vise à provoquer la contraction réflexe d'un maximum de fibres musculaires en réaction aux vibrations de la machine. L'impact sur le métabolisme lipidique est bien moindre.

Autre différence: lors des activités physiques, les muscles travaillent surtout en mode dynamique et sont tout à fait adaptés à ce mode de fonctionnement. Sur plateforme vibrante, ils travaillent en mode statique et en résistance à l'étirement provoqué par chaque vibration. Ils sont physiologiquement moins adaptés à ce type d'effort qui provoque des micro lésions. Ces lésions ressenties sous formes de courbatures donnent alors l'illusion d'avoir travaillé efficacement. L'intérêt de l'exercice physique est d'entretenir et d'enrichir les schémas moteurs. Il prévient de cette façon l'enraidissement et la perte de mobilité liés au vieillissement ou à la diminution d'activité.

Outre le risque de dépenser beaucoup d'argent pour pas grand-chose, les contre-indications médicales sont nombreuses et peuvent concerner certaines personnes vivant avec le VIH. Par exemple, la grossesse, les risques de thrombose (caillot dans un vaisseau sanguin) ou de phlébite (inflammation d'une veine), les maladies cardiovasculaires, les calculs rénaux, les plaies suite à une opération récente, les prothèses, le diabète sévère, les migraines, les tumeurs (cancers), etc. Alors bougez, marchez, courrez, dansez, nagez.
Yves Gilles, kinésithérapeute
Retrouvez l’intégralité du dossier dans Remaides n°67 (mars 2008)
À consulter aussi : « Une activité physique adaptée… », InfosTraitements n°165 (2007)