Pour 2012... l’ANRS est morte, vive l’ANRSH !

Publié par Renaud Persiaux le 11.01.2012
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ThérapeutiqueANRS

Un petit "H" qui fera toute la différence ? L’Agence nationale de recherches sur le sida et les hépatites virales (ANRS) va changer de nom courant 2012, rendant visible son implication croissante sur les maladies du foie. Elle va devenir l’ANRSH. Mais un autre changement a déjà eu lieu...

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Jean-François Delfraissy, son directeur, l’a annoncé plusieurs fois en public : l’ANRS deviendra dans le courant de l’année 2012, l’ANRSH. Ce qui occasionnera un changement de logo. Que l’agence rende visible son engagement croissant sur les hépatites virales était une demande de longue date des associations de patients. "En 2011, les hépatites virales représentent 22% du budget de l’agence. C’était seulement 5% en 2005, souligne Jean-François Delfraisssy. Une augmentation qui s’est faite à budget constant". Lequel stagne autour de 50 millions d’euros.

La recherche VIH – hépatites française en 2e place mondiale

Malgré, donc, ce budget relativement modeste, l’ANRS est une structure très performante. Qui a permis une réussite exceptionnelle pour la recherche française : la 2e place mondiale dans les deux domaines du VIH et des hépatites virales ! Après les Etats-Unis bien sûr, dont les budgets de recherches sont sans équivalents. En termes de recherches sur les hépatites, les deux essais sur l’utilisation des nouvelles molécules anti-VHC chez les personnes co-infectées par le VIH et le VHC, TELAPEVIH et BOCEPREVIH, sont sur le point de finir leurs recrutements.

Une grande cohorte hépatites en 2012

Le dossier majeur pour 2012, c’est la création de la cohorte nationale HEPATHER, équivalent pour les hépatites de ce qui existe déjà pour le VIH (la FHDH, base de données hospitalière française, regroupe en 2011 près de 60 000 personnes vivant avec le VIH). HEPATHER pourrait réunir à terme une trentaine de centres de prises en charge, en commençant par deux en avril 2012. Cette cohorte permettra de répondre à des questions majeures. Citons le suivi à très long-terme, le devenir après la guérison de l’infection (qui ne signifie pas guérison des dommages causés par le virus), les questions de sciences humaines et sociales… HEPATHER, dont le financement n'est pas bouclé, fait l’objet d’une demande via le Grand Emprunt.

Intégrée à l’Inserm depuis le 1er janvier

Autre changement, moins visible, mais tout aussi important : l’ANRS, jusque là autonome, a été intégrée le 1er janvier à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale, l’Inserm. Jusqu’alors, il s’agissait d’un groupement d’intérêt public (GIP), qui a été dissous au 31 décembre. "Elle sera autonome en matière de direction scientifique, de coordination et en terme budgétaire avec un budget spécifique au sein de l’Inserm, nous rassurait il y a quelques mois Jean-François Delfraissy pour VIH.org. Sur le plan administratif, il y aura quelques changements pour tenir compte des modalités de fonctionnement de l’Inserm". Mais "l’ANRS restera une agence d’objectifs et de moyens" au sein de l’Inserm.

Des associations partenaires

Déjà menacée en 2005, l’existence de l’ANRS, considérée par certains comme un OVNI dans le paysage de la recherche française, avait été sauvée par la mobilisation conjointe des chercheurs et des associations de patients. Lesquelles ont pu très tôt y trouver une place, notamment par le biais des collectifs inter-associatifs TRT-5 (créé en 1992, dont AIDES est un des membres fondateurs) et Collectif Hépatites Virales (CHV). Une place qui sera conservée dans la nouvelle ANRSH, notamment au sein du conseil d’orientation qui succèdera au conseil d’administration. C’est que les associations ont su gagner que l’Agence les considère comme des partenaires à part entière. AIDES notamment s’est impliquée dans de nombreux projets de recherche : les tests rapides (ANRS-COM’TEST et ANRS-DRAG’TEST), la PREP (ANRS-Ipergay) et les séances d'accompagnement et d'éducation aux risques liés l'injection de drogues (ANRS-AERLI). Chercheur et clinicien respecté (il est à la tête du service de médecine interne de l’hôpital Bicêtre et à celle de l’ANRS depuis 2005), Jean-François Delfraissy, devrait en garder la direction. La nouvelle ANRSH sera proche de l’Institut de microbiologie et des maladies infectieuses, un des dix instituts thématiques de l’Inserm, dont il est aussi directeur.

2 millions en moins en 2011

Mauvaise nouvelle : on apprenait mi-novembre que la réserve budgétaire de l’ANRS (5% de son budget, non versé au début de l’année, et qui sert de variable d’ajustement au gouvernement) ne serait pas versée en 2011. C’est deux millions d’euros en moins pour les personnes atteintes par le VIH et les hépatites virales. Dénoncée notamment par le TRT-5, cette coupe claire dans le budget, se traduira par le report de plusieurs projets de recherches. Fin 2010, c’est précisément le versement de la réserve qui avait permis à l’Agence de décider le lancement des phases pilotes des essais ANRS-Tasp (qui évalue en Afrique du Sud l’impact sur l’épidémie d’une proposition généralisée de dépistage et de traitement antirétroviral) et ANRS-Ipergay (qui évalue l’intérêt de la prise d’antirétroviraux dans un but préventif par des gays séronégatifs avant et après des rapports sexuels). Le premier doit démarrer en ce début 2012, le second a été officiellement lancé le 4 janvier… Reste qu'au-delà des phases pilote, aucun financement n’est assuré.

Une agence inscrite dans les réalités du terrain
L’ANRS a à cœur d’inscrire ses recherches dans le travail de terrain. Exemple avec les études ANRS COM’TEST et DRAG’TEST, sur les nouvelles conditions de dépistage par tests à résultats rapides, réalisées en partenariat avec AIDES. "Elles ont permis d’ouvrir les portes alors que toutes étaient bloquées, et ont abouti à la publication du décret autorisant l’utilisation du test rapide, en novembre 2010, tient à souligner Jean-François Delfraissy. Je crois que cet exemple illustre bien comment on part du ministère vers un organisme de recherche, puis vers les chercheurs, puis vers les associations. Et comment on retourne vers le ministère avec des réponses !" En 2012, l’ANRSH devrait accroître son implication sur les champs de l’organisation des soins, les questions épidémiologiques en lien avec la maitrise de l’épidémie, les sciences économiques.