VIH : l’indispensable légèreté de l’être

Publié par Mathieu Brancourt le 12.10.2018
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ConférencesSFLS 2018allègement

Hier, s’est ouverte le congrès annuel de la Société française de lutte contre le sida (SFLS), à Reims. Au programme de cette édition, l’allègement sous toutes ses formes. Et lors de la première journée, on se rend compte que c’est l’ensemble de la vie avec le VIH qui peut, doit s’alléger ou s’allège déjà. Le traitement reste un enjeu central, mais à la lumière des présentations et témoignages, pas seulement. Retour sur une cascade de possibilités, à partir du Tasp vers l'au-delà.

« Pour la génération de médecins qui, comme moi, a découvert en tant qu’externe les premiers malades du sida, parler d’allégement montre le chemin parcouru depuis cette période ». C’est par ces mots forts que le professeure Firouzé Bani-Sadr, présidente de cette édition rémoise, a ouvert, jeudi 11 octobre, le congrès de la Société française de lutte contre le sida (SFLS), sur une thématique impensable il y a encore dix ans. Alléger son traitement, alors qu’il y moins de vingt ans, on ignorait comment faire vivre les personnes séropositives au VIH. Ce changement de paradigme illustre l’avancée immense de la thérapeutique en la matière. Mais comme elle le disait déjà dans une interview, il serait incorrect d’envisager l’allègement de la vie avec le VIH seulement à l’aune des antirétroviraux. C’est ce qu’a répété Willy Rozembaum, professeur et clinicien historique de la lutte contre le sida, infatigable observateur des évolutions médicales. « Beaucoup résument l’allègement au thérapeutique, mais cela concerne bien d’autres choses. Le premier poids à l’époque, c’était l’incertitude de la survie. Il a fallu lever depuis bien des poids dans la vie des personnes », explique l’ancien président du CNS. C’est sur ce constat que la SFLS a construit ses deux journées annuelles, dont la première fut riche d’enseignements et d’éclairages sur l’enjeu d’une prise en compte médicale des freins et des obstacles à réduire au maximum la présence du virus dans la vie des personnes.

Alléger les traitements

Le docteur Pierre de Truchis est le successeur de Jacques Leibowitch, un des premiers pères de l’allégement en France. Il revient sur le sens même d’alléger : face à des traitements à vie avec des effets indésirables à long terme et un impact sur la qualité de vie des personnes, il fallait trouver des réponses pour améliorer le quotidien et réduire la toxicité des médicaments au long cours. Pour le système de santé, il y a aussi une brèche de réduction des coûts et surtout d’adaptation de la posologie à ce qui est le plus juste. A la tribune, il tient à faire un point de précision et à distinguer simplification et allègement : la diminution du nombre de prises quotidiennes et la réduction du nombre de molécules est un axe déjà exploré depuis longtemps par les clinicien-nes avec leurs patients-es. Les études de bithérapies et de réduction du nombre de molécules ont prouvé le maintien de l’efficacité virologique, mais également la réduction de la toxicité et des effets indésirables sur des paramètres de santé (rein, os). En revanche, l’allègement par la réduction du nombre de jours de prises reste un chantier à consolider. Les premières expériences du docteur Jacques Leibowitch ont été confortées en 2015 par l’essai ANRS-4D, qui évaluait l’efficacité d’une trithérapie classique avec une prise quatre jours sur sept.

Sauf pour un cas de sous-utilisation du médicament, le maintien de l’efficacité est total et surtout sans effet problématique pour la personne. L’observance est restée très bonne durant l’essai 4D qui a amené à élargir la cohorte évaluée en lançant Quatuor qui étudie dans un essai randomisé l’efficacité des trithérapies avec anti-intégrases, sept jours sur sept versus quatre jours sur sept. L’affaire est à suivre, mais les experts-es semblent confiants-es dans l’émergence de cette possibilité pour certains-es patients-es. « Pour l’instant, l’allègement universel est une tendance à vérifier auprès de toutes les classes de médicaments. La moindre exposition aux ARV devra être contrôlée au long terme sur la toxicité », nuance Pierre de Truchis. C’est un point crucial et objet de recherches intenses, sur lequel la France est plutôt proactive.

La présentation de Dominique Costagliola, professeure, biomathématicienne et épidémiologiste (Inserm), a permis de faire un point sur la mise en place concrète de stratégies thérapeutiques alternatives à la classique trithérapie. A partir des données de la base FHDH (base officielle sur la prise en charge des personnes vivant avec le VIH et suivies à l’hôpital) jusqu’en 2016, cette dernière a pu décrire les combinaisons de traitements prescrites aux personnes prises en charges et traitées en France. Les trithérapies restent ultra majoritaires à l’initiation du traitement (90 %), sans évolution récente concernant les monos ou bithérapies, même si Dominique Costagliola indique que depuis 2016 et la sortie de nouvelles études validant l’intérêt et l’efficacité des bithérapies, les choses risquent de bouger. Dans la prise en charge au long cours, en termes de changement ou switch de traitement, on atteint 5-6 % de monothérapies ou bithérapies au total. Concernant le darunavir, une des molécules utilisées en bithérapie, on atteint près de 10 % de personnes passées en bithérapie comportant du darunavir après un switch qui s’est avéré  être un succès virologique. Pour le dolutégravir, on remarque aussi plus de 10 % de switchs avec succès en bithérapie. En termes d’échecs, on voit très peu de différences entre bithérapies et trithérapies, contrairement à la monothérapie, qui reste délicate dans sa mise en œuvre. Dominique Costagliola note également  que le taux d’échec est corrélé au nombre d’années de contrôle virologique. Plus le VIH est contrôlé par un traitement depuis longtemps, plus le taux d’échec est bas après un switch vers une mono ou une bithérapie.

Alléger le risque

On a donc allégé parfois le traitement, mais pas forcément la vie, avec les effets indésirables longtemps très nombreux, mais surtout sur la perception du risque et de la culpabilité de la transmission. Ce pan social et psychologique d’une maladie sexuelle transmissible demeure une autre bataille à mener par la communauté de lutte contre le sida. « L’épidémie fut à l’origine d’une conscience générale. Il fallait une collaboration de tous les acteurs-trices, des patients-es aux associations, des médecins à la société civile, des cliniciens-nes aux politiques nationaux et internationaux », a expliqué Firouzé Bani-Sadr. L’indétectabilité du VIH dans le sang, avec trithérapie ou bithérapie, est atteignable depuis longtemps et tient en une véritable révolution positive. Depuis dix ans maintenant : il est connu et validé qu’une personne séropositive sous traitement efficace et avec une charge virale contrôlée à des niveaux indétectables ne transmet pas le VIH. Ce fait scientifique est valable pour les homos comme les hétéros. Pourtant, ce fait reste injustement peu connu des personnes vivant avec. « Alléger le risque, c’était aussi lutter contre les fantasmes et la panique sur les modes de contaminations, très souvent injustifiés. On a cru parfois revenir au Moyen Âge en termes de paranoïa concernant la protection vis-à-vis des personnes séropositives », a rappelé Willy Rozembaum. Alors travailler sur les représentations reste tout autant crucial que travailler sur le champ thérapeutique, pour un impact sur tous les espaces de vie des personnes. Ce dernier a tenu d’ailleurs à montrer par l’exemple, frappant, à quel point la donne avait changé en matière de prise de risque réelle ou supposée entre séropos et séronégatifs. Dans une dernière slide, le professeur a défendu que « la manière la plus sûre de ne pas contracter le VIH au cours d’une relation sexuelle était d’avoir cette relation sexuelle avec une personne contaminée au VIH et traitée depuis plus de six mois. Et que celle-ci est plus « attrayante » qu’une personne séro-interrogative. En d’autres termes, coucher avec une personne séropositive traitée avec succès vous permettra de rester séronégatif. De quoi souffler un grand coup et faire s’envoler les discriminations ?

Alléger la vie

Le combat contre le VIH se situe aussi dans la défense des droits humains, des femmes, des homosexuels et des personnes séropositives dans leur ensemble. Ces luttes sont loin d’être gagnées. Et les personnes vivant avec le virus sont les plus à mêmes de conter à quel point il reste difficile de parler, dire, évoquer sa propre séropositivité. Évoquant la journée de la Disance et son propre parcours, Florence Thune, directrice de Sidaction mais également femme vivant avec le VIH depuis 20 ans, a livré son témoignage, ce qui restera le point d’orgue de la journée. Elle évoque sans fard ce que le VIH lui a fait sur sa vie affective et sexuelle. Sur les discriminations qui demeurent et qui l’énervent encore, les clichés, mais aussi tout le chemin parcouru en termes d’allégement de la vie avec le VIH/sida. « Je ne peux que dire que le seul et unique véritable allègement arrivera le jour où je pourrais dire : « Je suis séronégative ». Ce qui se résumera, au final, à ne plus rien avoir à dire, à ne rien avoir à annoncer, à ne rien avoir à avouer, à ne pas avoir à partager, à ne pas avoir à témoigner. Ne plus avoir de secret, ne plus dissimuler, ne plus être accusée de cacher quelque chose, ne plus se voir refuser un prêt, ne plus se voir reléguer en dernière position pour une opération, et surtout ne plus entendre : « Mais comment ça t’est arrivé ? ». Ce vœu pas si pieu est la ligne directrice commune de tous les travaux entrepris dans la lutte contre le sida pour réussir à atteindre, certes la fin du sida et des contaminations, mais aussi et surtout la fin d’un fardeau bien trop lourd à porter par qui que ce soit.

 

Commentaires

Portrait de Butterfly

Pour qu'il y est pas de contamination .. faudra attendre 6 mois pour savoir si le partenaire est positif ou pas .. si il est séronégatif donc ne peut pas contaminé même si il a la maladie ok .. l'autre avec sa charge indétectable pourra avoir avec celui là un rapport non protégé - En espérant que le ou les partenaires se fassent faire le dépistage pour jouir d'avoir des rapports non protégés et qu'il ne parte pas en courant si il apprend qu'on est séropositif pfiouu Encore des mentalités a changer quand même - 

Si j'ai bien compris l'article je pense que oui. A débattre -

Qd aux traitements comme vous l'avait dit et c'est ce que je m'évertue a dire depuis des décennies , il y a toxicité c'est logique même si certains n'ont toujours pas d'effet secondaire sur leurs détérioration de leurs organismes ou donc foi rein estomac hypotrophie des membres et j'en passe de ces effets secondaires reconnu . 

Faudrait aussi donner des formations pour les sécurité sociale ou mdph etc de cette toxicité car pour eux même si le sang est contaminé par le sida , ça ne détériore pas le reste de l'organisme et mdr - le sang véhicule dans tout le corps mais bref .. tout est fait pour nous faire payer des consultations parfois couteuse et si on peut et d'éviter de nous faire reconnaitre victime par économie pour les droits fiscaux pour se faire reconnaitre handicapé et a 80% quand on voit les dégats physique ou moral que font les traitements voir la maladie en elle même - Ceci est une honte alors qu'il y a 30 maladies en ALD et que certains que je connais n'ont rien  de contaminant et sont reconnu a 80% en ayant donc moins que ce que j'ai eu par exemple en maladies opportuniste du a la maladie. 

Article interressant merci encore ... Mais oui le dire est encore tabou et frustrant quand ta une personne ou des personnes qui te racontes leurs calvaires quand elles ont un ou des cancers ou que ceux là sont en rémission- ça démange de ne rien dire pour raconter les souffrances eu , par des hépatites du au vih aussi ou des cancers du au vih ou de la perte des cheveux du a un lourd traitements en + de celui du vih ou que l'on peut presque pas pour certains marcher ou d'avoir le diabète rapidement ou pbl de tyroides bref de vivre avec un cancer a vie qui ne déclarent ses pathologie sur le long terme. Je ne peux comparer une personne qui peut dire qu'elle a un cancer et une autre qui a le vih ou peu - un qui peut mourrir plus rapidement ou l'autre aussi avec le vih ou moins vite qu'avec un vih stable a vie .. impossible de dire si c'est pas mieux de mourrir pour certains plus vite - mais bon comme pour les personnes agées , ils ont des traitements pour vivre plus longtemps ma foi .. Et ça coute plus cher a l'état .. bref .. 

Qd a avoir un traitement que 4 jrs par semaine ce serais mieux car l'esprit est moins embués - moi je suis a 5 jrs par semaines et je ressent la différence .. qd je les prends pas le week end et les reprends que le lundi soir wow je suis ko 5 jours et mon cerveau est au ralenti et plus de mal a la mémoire ou concentration et pour parler trouver ses mots mais bon .. J'attend le dernier qui emglobe encore plusieurs molécules si mon corps en veut aussi - il arrivera fin de l'année.. je suis tjrs dans les derniers traitements nouveaux et tant mieux - car oui au bout de quelques années l'organisme fait barrière a certaines molécule donc c'est pas gagné mais continuons a tester pour soi. 

Moi même si charge indétectable ou t4 trés haut je continuerai pour le moment tant qu'il n'y aura pas de vrai preuve qu'on ne peut pas contaminer une personne saine , a me protéger par les préservatifs - 

( si mes phrases ou mot sont longs c'est effet traitements désolé ou j'ai pas a être désolé) a chacun ses ressenties.

 

Au revoir Bonne fin de semaine et kiss au professeur banisadr mon ex docteur.. qui a bien évolué pour être maintenant professeur.