Nous sommes toujours les mieux placés pour savoir quels sont nos besoins

Publié par Sabine le 14.03.2017
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Je m’appelle Sabine, j’ai 45 ans et voici mon histoire...

Issue d’une fratrie de trois enfants dont deux garçons, j’ai très tôt cherché à attirer l'attention de mes parents sur moi, paradoxalement, en étant la plus discrète possible.

Mon père est sérieusement malade depuis nos jeunes années et ma mère a été gravement accidentée, j’ai donc grandi dans l’angoisse permanente.
Peu de communication parentale et des relations familiales épisodiques parce qu'une famille éloignée par les kilomètres ou fâchée avec mes parents. Personne avec qui me libérer de ce poids trop lourd pour l’enfant que j’étais.

Après avoir fini par obtenir mon bac en 1992 (je m’y suis reprise à trois fois !), j’entreprends des études de lettres modernes dans l’université la plus proche de chez moi. Juste après ma première année, passée avec succès, mes parents décident de déménager en Gironde, le département d’origine de mon père, et me laissent le libre choix de les suivre ou non. Privilégiant la famille aux amis, je décide de continuer mes études à Bordeaux et c’est là que je perds pied. Seule dans une immense université et une grande ville, je me suis perdue et laissée séduire par J en 1994. C'est ma première rencontre avec le sida et même si je n'en avais pas conscience à l'époque, je pense que j'étais déprimée et que je voulais mourir.
Jamais nous ne nous protégions lors de nos rapports et je ne souhaitais pas connaître mon statut sérologique.
J’ai accompagné J jusqu’à ses dernières heures de vie de 1997 : ce fut une souffrance de plus pour moi et une libération pour tous les deux.

Un ami, A, m’a accompagnée pendant cette épreuve alors qu’il venait de vivre la même chose l’année précédente avec son épouse, morte, elle aussi, du sida. Ces décès nous ont rapprochés et nous avons vécu ensemble deux années.

Presque un an après ma rupture avec A, en mai 2000, je signe mon premier contrat à durée indéterminée avec mon employeur actuel, et c'est bien sûr à ce moment-là que le sida me rattrape. Je n'ai pas encore 30 ans et je suis déjà à deux doigts de passer l’arme à gauche. Grâce aux nouvelles trithérapies, je remonte la pente et je décide alors de VIVRE !!!! Je prends mon traitement quotidiennement : c’est sûrement ce qui m’a sauvée. C’est vrai, aussi, que je le supporte plutôt bien, sans trop d’effets indésirables.

Après deux ans de célibat nécessaire à ma reconstruction physique et psychique, je rencontre P qui me supporte encore à ce jour. Il est séronégatif et c’est tant mieux ! Nous nous soutenons mutuellement quotidiennement dans tous nos combats (les miens, les siens et les nôtres). Il m’a toujours acceptée telle que je suis et sans crainte.
Nous avons choisi de ne pas avoir d’enfant, non pas à cause du VIH mais pour d’autres raisons (sociétales, financières...) C’est un vrai choix de vie. Rien ne nous empêche de mener à bien des projets à plus ou moins long terme, à notre rythme. Nous sommes devenus, d’ailleurs, propriétaires de notre logement, ce qui, de prime abord, n’allait pas de soi puisque nous ne l'avions absolument pas envisagé au départ. Aujourd’hui, nous sommes pleinement satisfaits, heureux et fiers de vivre dans NOTRE MAISON (...enfin quand nous aurons terminé de rembourser le prêt !).

Peu de personnes sont informées de mes soucis de santé. Je le regrette souvent, mais la vie m’a appris à rester sur mes gardes. Cependant, j’aimerai pouvoir partager mon vécu... Evidemment, j'ai déjà subi de la discrimination dans un laboratoire d’analyses, chez un dentiste, sans oublier ce que j’appellerais la discrimination administrative (lors de la demande de notre prêt immobilier, notamment auprès de la compagnie d’assurance). Ce qui me chagrine le plus, c’est qu’une personne, en qui je pensais pouvoir avoir confiance et à qui j’avais offert mon amitié, a rompu notre relation au prétexte que je suis malade. Elle est soi-disant triste pour moi. Pourtant si j'ai besoin d’une chose, c'est d'oublier que je suis malade.

La vie est bien assez difficile, triste aussi parfois mais je suis plutôt partisane du carpe diem : essayer de vivre le plus sereinement, le plus sainement possible et profiter des bons moments qui nous sont heureusement offerts !

Je souhaitais témoigner, non pas pour me mettre en avant, mais pour donner de l’espoir à des personnes qui se sentent au fond d’une impasse. Tout est possible, il faut croire en ses rêves, ses aspirations et prendre soin de soi le plus possible. Personne ne le fera à notre place. Nous sommes toujours les mieux placés pour savoir quels sont nos besoins.

Commentaires

Portrait de basique

beau témoignage... tu as bien résumé ta philosophie... et j'y adhère également.

Portrait de Butterfly

Hello oui une belle synthèse de votre life.. j'aimerais en faire  autant mais moi ça remonte à 84 qd j'ai su que gt seropositif Ma vie avait changé mais tjrs seule et n'a jamais pensé me trouver des amis ou pti copain ou plus sérieux.  La famille était fini depuis mes 6 ans donc .. bref pas la même vie plutôt chaotique sans vrai toit mais battante tjrs et tjrs là. . Jolie vote histoire.  Cordialement 

Portrait de ferrari

Très belle leçon de vie...

Tant qu'il y a la vie il y a espoir...

Portrait de barata

Je te félicite pour le courage que tu as gardé durant les différents obstacles de la vie. Félicitations en même temps de l'homme qui t'as accepté tel que tu es. Ce n'est pas toujours facile de trouver quelqu'un qui t,accepte avec le VIH, dis lui que c'est un homme extraordinaire, plein de bonté.

Je prie pour rencontrer un mari ou compagnon qui pourrait l'accepter avec la maladie, mais ce n'est pas facile.

Merci pour ce joli témoignage 

Portrait de Carine L.R

cc belle histoire avec beaucoup de courage

Mon histoire est un peu similaire à la tienne à une différence pret: je suis africaine vivant en Afrique et croyez moi, ici c'est 10 fois plus difficile de vivre avec le sida. Mais bon j'ai gardé courage jusqu'ici et aujourd'hui je suis marié depuis 10 mois avec un séropositif aussi et rassurez vous, je me demande si j'aurai rencontré un comme celui là si je n'avais pas rencontré le sida: elle est belle la vie avec mon homme. (juste pour rire, je dis merci au sida)

Bref, je prendrai le temps de vous la raconter mon histoire dans les prochains jours. juste garder courage et surtout marcher la tête haute malgré les regards les ignorants car nous avons droit au bonheur.

Portrait de Carine L.R

barata wrote:

Je te félicite pour le courage que tu as gardé durant les différents obstacles de la vie. Félicitations en même temps de l'homme qui t'as accepté tel que tu es. Ce n'est pas toujours facile de trouver quelqu'un qui t,accepte avec le VIH, dis lui que c'est un homme extraordinaire, plein de bonté.

Je prie pour rencontrer un mari ou compagnon qui pourrait l'accepter avec la maladie, mais ce n'est pas facile.

Merci pour ce joli témoignage 

Cc ma chére,

quand tu liras mon témoignage, tu comprendras que rien n'est terminé pour toi. Continu de revé et surtout fait des rencontres et tu trouveras surrement un homme fait pour toi.

Surtout reste avec celui que tu aimes et qui t'aime pour ce que tu es et non celui qui éprouvera de la pitié pour toi ou encore pire : ne reste pas avec quelcun juste parceque tu ne veux pas être seule ou pour fermer les gueules de  l'entourage

Courage et percévère dans la PRIERE

Portrait de Sabsab

Bonjour à toutes et tous,

Je suis très touchée par vos commentaires et vous remercie chaleureusement. Après avoir écrit ce témoignage, je ne m'attendais pas à autant de lectures et commentaires.

Je tiens à remercier également toutes les personnes que j'ai pu rencontrer au cours de ma vie : les mauvaises comme les bonnes, les présentes autant que les disparues... Elles se reconnaîtront !!!!! Elles ont toutes participé à faire de moi la personne que je suis aujourd'hui

Bon courage et bonne chance dans tout ce que vous entreprendrez.

Sincèrement.

Sabine

Portrait de Nadyne Mand

Coucou Sabine, ton témoignage me touche autant que ton histoire de la contamination est le même parcours que toi, mais la vie ne m'a donné encore la chance de retrouver une totale confiance en moi; j'ai par ailleurs la chance de ne sentir aucune descrimination lors de mes rendez-vous médicaux d'autant plus que je travaille au CHU où je suis suivie et je pense que 80% du personnel est au courant, j'ai la tête haute car personne ne connait notre histoire, alors avançons et arrêtons de se poser des questions...

Portrait de jean luc13320

oui  bonjour  sabine  sacré  témoignage, oui en général  nous gardons au fond de nous notre histoire ,ce qui n est pas toujours facile

amitié   jean luc

Portrait de jean luc13320

inscrit ici depuis pas mal de temps  sans y passer tous les jours, le grand  souhait  de rencontrer une personne  comme moi   je pense que se serait le mieux  ,afin de partager , a deux,rire a deux  , de vivre ,d avancer d être présent  pour les rires ,présent pour  les  bons et mauvais côterde la vie,  envie d aimer , d être aimer , d apporter  des sentiments envers ma compagne  

malgré   le  fait  d avoir poser des annonces ici  pour  rencontrer,  a ce jour  aucune rencontre de fait ,  je pense aussi beaucoup de faux profils ici, se permettent de profiter de la faiblesse de certaines personnes, c est grave .

de nature positif  sur ma maniere  d avancer dans la vie je ne désespère pas ,  peut qu un jour  je ferais le bonheur d une femme et que cela sera réciproque,,,,,

je pense  que beaucoup de personnes restent seul dans leurs coins  ,mais  nous avons les mçemes droits que tout autres personne malgré ce boulet  que nous traînons  tous depuis  des années    

être heureux  , et surtout rencontrer une personne  qui recherche la même chose

amitié    jean luc