Chronique ordinaire d’une sérologie à variation amoureuse - 2

Publié par Luc et Térence le 03.11.2011
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Le TASP. Térence : En fait, l’info de la "non-contaminance", on l’a eue assez tard, en décembre 2010.

Luc : c’est pendant la FIV [formation initiale des volontaires] que j’ai appris qu’en étant indétectable on n’était pas contaminant (enfin, quasiment pas !). Ça a été super important, ça a fait tilt. Une vraie révolution.
Térence : Moi, je bloquais sur la peur du traitement. Je me sentais trop anarchique. J’étais en dessous des 300, avec le pourcentage CD4/CD8 qui baissait.
Luc : La question se posait pour sa santé. Pour moi, c’était la visée préventive. Je voulais qu’on démarre le traitement ensemble, parce que je pensais qu’il aurait peut être du mal avec la prise des médicaments. Finalement, j’ai démarré avant, en janvier.
Térence : J’ai repoussé en février dans l’appréhension de la prise du traitement. Je me suis dis que j’y allais m’y préparer au mieux. Sans toutefois avoir le suivi ou le soutien de l’hôpital ou bien d’un autre organisme.


Dire. Luc : On manque un peu d’interlocuteurs quand on se "retrouve personne séroconvertie", même en étant volontaire. A AIDES, on ne parlait pas de notre statut. Savoir qui est séropo est paradoxalement encore tabou.
Térence : Les traitements VIH à visée de charge indétectable sont une arme plus que bénéfique pour modifier l’image du séropositif dans la société, ne plus être perçu comme des "human bomb" mais bien comme des personnes non contaminantes et en bonne santé. Avant, on n’était pas mis en confiance.
Térence : J’ai pris en loucedé mon traitement à un diner de AIDES. C’était un peu space. Je n’ai pas supporté le traitement, déprime. Et je ne pouvais pas en parler à AIDES.
Luc : On voulait relancer les groupes d’entraide généralistes. Mais en parler, alors que tout le monde savait qu’on est en couple, c’était compliqué. Je ne voulais pas mettre Térence en défaut. La famille, pareil. Je ne voulais pas le dire car mes parents sont âgés et ont eu leur dose de maladies. Et nos parents se connaissent.
Térence : On a eu des témoignages qui nous ont confortés dans le sens de ne pas l’annoncer à nos proches. Je n’ai pas regretté.
Luc : La compassion, ça va bien. On aurait pu le dire quand même à la mère de Térence. Mais un soir au resto, elle a dit en voyant un gamin en fauteuil roulant : "OHHH !!  Un handicapé !"
Luc : J’étais rassuré de pas l’avoir dit.
Térence : Ma mère est blonde, sorry !


Les traitements, tous les traitements. Luc : Les effets secondaires, c’est un truc qui dépend de chaque personne. On n’est pas comme les anciens séropos, on a de la chance.
Térence : En plus des ARV, pour reculer l’évolution de l’infection… - parce que je le vaux bien ! - je prends des compléments alimentaires, que je trouve sur le net. J’avais peur au début, mais je me suis auto-conditionné pour ne pas rester bloqué sur les effets secondaires. Un autre déclic pour moi, ça a été de prendre les médocs pour ne pas être malade. Rester en forme, en santé. On appelle les ARV : les cachous, les smarties. On se les rappelle tous les deux : "T’as pris tes cachous, chouchou ?"


"Clean ?" Térence : On est pratiquement comme des séronegs. On a des amis qui sont en couple sérodifférent, le séropo en charge indétectable jute dans le cul de son mec, qui est toujours nég à ce jour. En fait, on a deux sexualités... safe et unsafe. Avec le TASP, être indétectable depuis six mois, ça enlève la pression. Mais avec les séropos, pour nous, la sur-contamination ça reste assez flou. Si on couche avec un séropo qui n’est pas traité, notamment. Sinon, sur le net, y a souvent la question : "Vous êtes clean ?" Maintenant, c’est le sérotriage entre CV indétectable. On ne parle pas cul avec le médecin. Ça se résume à des résultats d’analyses et des prescriptions. On n’a pas besoin d’autre chose, c’est du suivi pur et dur, conjoint entre ville et hôpital. Ne pas parler cul, ça nous va. Le problème, c’est qu’aucun des deux médecins ne nous avaient parlé de CV indétectable et du risque de transmission.

Propos recueillis par Renaud Persiaux.