Financements VIH : Roselyne Bachelot a-t-elle menti ?

Publié par jfl-seronet le 31.03.2010
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Le 1er avril (ce n'est pas un canular), la ministre française de la Santé Roselyne Bachelot présente officiellement la mise en place des agences régionales de santé (ARS), une des grandes innovations de la loi HPST. Ces nouvelles structures auront notamment pour vocation de financer une partie de la lutte contre le sida. Mais voilà alors que la ministre de la Santé avait annoncé le 23 décembre dernier que les crédits alloués à la lutte contre le VIH ne baisseraient pas avec la mise en place des ARS, il se passe exactement le contraire.
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Une fois de plus, le gouvernement ne fait pas mentir le sinistre dicton qui veut que les promesses n'engagent que ceux qui les reçoivent… Le dernier exemple en date, on le doit à Roselyne Bachelot, la ministre de la Santé, qui avait promis que la mise en place des ARS (agences régionales de santé) en remplacement de feu les groupements régionaux de santé publique (GRSP) ne conduirait pas à une baisse des financements en matière de lutte contre le sida. Et bien, c'est tout le contraire qui se passe. Ce manquement à la parole ministérielle est aujourd'hui vivement dénoncé par AIDES dans un communiqué. "Selon les éléments en notre possession, les associations subissent des pertes de crédits pouvant aller jusqu’à 47 % dans certaines régions. AIDES subirait ainsi une perte de plus de 700 000 euros par rapport aux financements 2009. Avec des coupes conséquentes qui concernent des actions prioritaires comme celles menées auprès des publics gays et migrants. Cette baisse n’affectant pas seulement notre association, le montant des coupes budgétaires serait bien plus important", écrit l'association.

AIDES demande à Roselyne Bachelot : "De communiquer publiquement les montants alloués en 2010 à la lutte contre le sida dans chaque région" et d'autre part : De ne pas abandonner la lutte contre le sida et de garantir le maintien du soutien de l’Etat. "Sans la continuité du niveau de financement public, de nombreuses délégations AIDES, tout comme d'autres associations, fermeront leurs portes et des départements, voire des régions entières, risquent de se trouver totalement privés de toute action de prévention et de soutien !, annonce l'association. L'épidémie est toujours active, le nombre de personnes atteintes augmente chaque année, AIDES et les autres associations sont toujours sur le terrain au plus près de l’épidémie. L'Etat doit assumer ses responsabilités et avoir une politique de santé publique cohérente, tenant compte des recommandations de la Cour des Comptes. Il faut plus que jamais poursuivre la lutte contre le sida !"

Ce désengagement budgétaire massif est particulièrement préoccupant et tombe à un curieux moment. En effet, il y a quelques semaines, la Cour des Comptes a publié un rapport sur la politique de lutte contre le sida qui rappelle très clairement l'Etat à ses devoirs en matière de lutte contre le sida. Dans son rapport, la cour des comptes affirme qu'il "appartient à l’État de renforcer la prévention et le dépistage du VIH. L’ignorance de leur état de séropositivité par plusieurs dizaines de milliers de personnes, la propagation de l’épidémie qui en résulte, le coût élevé des traitements pour l’assurance maladie et leur caractère pénible pour les patients militent pour une politique plus active en ces deux domaines". Or ce travail de prévention et d'incitation au dépistage est très largement conduit par les associations de lutte contre le sida. La Cour des comptes préconise également "d’améliorer la connaissance par le ministère de la Santé des actions de prévention et d’accompagnement subventionnées au niveau local par les groupements régionaux de santé publique, dont les missions seront reprises en 2010 par les agences régionales de santé". "A ce rythme là, il n’y aura bientôt plus grand-chose à connaître !", dénonce AIDES.

Députée (PC) et présidente du groupe d'étude sue le sida à l'Assemblée nationale, Marie-George Buffet a adressé un courrier (31 mars) à la ministre de la Santé dans lequel elle fait part de son " inquiétude". "Dans le cadre du transfert des compétences des groupements régionaux de santé publique (GRSP) aux agences régionales de santé (ARS), le financement [des associations de lutte contre le sida] serait fortement revu à la baisse, le chiffre d'une réduction de 62 % ayant même été annoncé. Dans de telles conditions, ces associations seraient dans l'incapacité de maintenir un niveau d'activité pertinent. Elles auraient au contraire besoin de moyens accrus. Si elle venait à être confirmée, cette diminution des crédits fragiliserait l'ensemble de la politique de lutte contre le VIH/Sida. On ne peut en effet demander aux femmes et aux hommes de ce pays d'assumer leurs responsabilités individuelles si la collectivité, elle-même, ne remplit pas son rôle en matière d'éducation et de prévention. Je voudrais en conséquence vous demander, Madame la Ministre, quels engagements vous comptez prendre pour garantir la pérennité et l'accroissement du financement des associations de lutte contre le VIH/Sida, et ainsi renforcer la prévention comme le préconise un récent rapport de la Cour des Comptes", écrit Marie-George Buffet. A suivre.

Photo : Mattox