Mariage pour tous : la droite en plein divorce

Publié par jfl-seronet le 17.07.2012
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Autant le dire, on peut avoir du mal à comprendre la position de l’actuelle opposition sur la question du mariage pour tous et celle, corollaire, de l’adoption par les couples de même sexe. En différentes occasions, en marge des Marches des fiertés et surtout parce que le gouvernement socialiste compte bien avancer sur son projet, la droite a émis des signaux contradictoires. Petit panorama pas forcément exhaustif de celles et ceux qui se sont prononcés.
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Le cas Morin
Il y a encore des gens qui connaissent Hervé Morin, plus que ceux qui le soutiennent sans doute. Hervé Morin est le président du Nouveau centre (les centristes d’appui à l’UMP). Il est membre du groupe centriste de l'Assemblée nationale. Il a été ministre de la Défense, s’est présenté à l’élection présidentielle contre Nicolas Sarkozy, puis a rapidement renoncé pour soutenir Nicolas Sarkozy. Le 5 juillet, il a fait deux sorties : l’une pour dire qu’il est contre le droit de vote des étrangers aux élections locales, l’autre pour dire qu’il est favorable à l'adoption par les couples homosexuels et "pour un contrat", pas pour le mariage. On voit mal comment il peut se sortir d’un tel choix puisque l’adoption est uniquement possible aux couples mariés et aux célibataires… mais il a sûrement une solution. "Nous sommes aujourd'hui dans un système de faux cul", a-t-il lancé. "Vous êtes homosexuel et vous voulez adopter, vous cachez votre compagnon ou votre compagne dans le placard, vous faites la procédure d'agrément en disant que vous êtes célibataire, vous adoptez et ensuite, vous re-sortez le compagnon ou la compagne du placard", a-t-il déploré. "Eh bien moi je dis, pour protéger les droits de l'enfant, faisons en sorte que l'enfant qui va être élevé par deux parents homosexuels puisse bénéficier des mêmes protections que les enfants issus de couples hétérosexuels", a-t-il plaidé.
 
Rachita Dati.. dit oui… au débat
Ancienne ministre UMP de la Justice, Rachida Dati a déclaré (29 juin) sur RMC/BFMTV qu'elle était "favorable" à un débat sur le mariage homosexuel, indissociable selon elle de la question de l'adoption par des couples de même sexe. "Que les personnes du même sexe qui vivent ensemble souhaitent avoir les mêmes droits que les couples hétérosexuels, c'est une évidence, c'est normal", a expliqué la députée européenne. "Dès lors que vous touchez au mariage, vous touchez à la famille et la famille veut dire aux enfants. Toutes ces questions doivent être débattues ensemble", a expliqué Rachida Dati en se disant "totalement favorable" à un débat. Mais elle, qu’en pense-t-elle ? Rien de spécial, mais l'ancienne garde des Sceaux avance qu'il "ne faut pas se déconnecter de l'évolution de la société" et qu'il faut, qu'on soit "pour ou contre", "donner des arguments".
 
L’UMP Jean-Frédéric Poisson, l’héritier de Christine Boutin
On connaît peu le député UMP Jean-Frédéric Poisson. C’est l’ancien suppléant de Christine Boutin. Comme l’ancienne ministre ne s’est pas représentée… il a pris sa suite. Cet héritage politique prend en compte l’opposition au mariage pour tous. Comme Christine Boutin, Jean-Frédéric Poisson est très contre. Il l’a d’ailleurs fait savoir en critiquant l’interview de Rachida Dati qui n’appelait pourtant qu’au débat. Manifestement, en parler, c’est déjà trop. Dans un communiqué, le député des Yvelines a "invité la droite à garder son calme, sa cohérence et son unité" sur ce sujet. "Rachida Dati affirme sans scrupule que l'UMP n'a jamais dit non à ce projet. Je rappelle à Mme Dati que l'engagement pris par la droite durant la campagne présidentielle était de préserver le mariage comme l'union d'un homme et d'une femme", a tonné Jean-Frédéric Poisson. "Le candidat Sarkozy et la droite ont toujours défendu cette conception de la famille. Les postures individuelles sur ce sujet sont de nature à semer le trouble dans notre famille politique qui a plus que jamais besoin d'unité", a-t-il encore lâché.  Et comme il a, ainsi que Christine Boutin, le sens de la nuance et de la mesure : il prévient qu'il "s'opposera à toute déconstruction de notre civilisation par la nouvelle majorité de gauche. Je sais déjà que plusieurs dizaines de parlementaires de droite comme de gauche ainsi que des millions de Français se rejoindront sur ce combat, qui est non seulement un enjeu national mais surtout un choix de civilisation", a-t-il asséné.
 
Chantal Jouanno, la sénatrice UMP pro gay !
Cas unique. Sénatrice UMP de Paris Chantal Jouanno "se félicite" de l'annonce du gouvernement de l'ouverture du mariage et de l'adoption aux couples homosexuels d'ici fin 2013. Elle indique (29 juin) avoir "toujours défendu" cette réforme. "Même si je suis en profond désaccord sur la plupart des réformes menées par l'actuel gouvernement, nous devons savoir, sur les grands sujets de société, laisser de côté les clivages purement politiques pour nous rassembler sur des valeurs modernes de liberté et d'égalité", assure l'ancienne ministre dans un communiqué. "Je tiens à saluer l'annonce de l'ouverture du mariage et de l'adoption pour les couples de même sexe. C'est une victoire décisive pour les libertés individuelles", ajoute-t-elle. "L'orientation sexuelle ne porte en rien atteinte à l'intérêt général ou à la sécurité collective, et les valeurs morales traditionnelles ne sauraient tenir lieu d'argument juridique", assène-t-elle. Concernant l'adoption, elle estime que "le maître-mot doit être l'intérêt supérieur de l'enfant, qui sera toujours mieux dans un couple équilibré que dans une institution. Il est temps de mettre fin à une aberration juridique, qui conduit à préférer un célibataire à un couple homosexuel", insiste-t-elle soulignant qu'au sein de l'Union européenne, six pays l'ont déjà autorisée.
 
Nathalie Kosciusko-Morizet : Non, c’est non !
Elle passait (mais ça c’était avant… la campagne présidentielle !) pour une illustration de la droite moderne et progressiste. On sait désormais à quoi s’en tenir : Nathalie Kosciusko-Morizet, députée UMP de l'Essonne, s'est exprimée sur la question de l'égalité des droits pour les couples de même sexe sur la chaîne LCP. Eh bien, ce sera sans elle puisque l’ancienne ministre se dit opposée au mariage pour les couples de même sexe, auquel elle préfère la signature d'une union en mairie. Très logiquement, elle se prononce contre l'ouverture de l'adoption pour ces mêmes couples.
 
Jean-François Copé : y a de la tension dans l’air !
Cela ne sera une surprise pour personne : le secrétaire général de l'UMP, Jean-François Copé, s'est déclaré (1er juillet au Grand Jury RTL-LCI-Le Figaro) opposé à l'ouverture du mariage aux couples homosexuels, promise par le gouvernement. "C'est un débat extrêmement difficile. A l'UMP, nous avons refusé d'ouvrir cette possibilité dans le projet que nous avons présenté pour la présidentielle et Nicolas Sarkozy lui-même était sur cette ligne, considérant - et je suis sur cette ligne aussi - que notre société connaît beaucoup de tensions et que ce débat, qui va générer beaucoup de tensions, nécessitait d'être traité dans des périodes plus apaisées". Une façon très politique de dire : jamais ! Bon prince malgré tout, Jean-François Copé s’est dit "favorable à ce qu'il y ait équité des droits". Comment ? Mystère.
 
Gay Lib s’inquiète… de l’UMP !
Evidemment, la nouvelle sortie du secrétaire général de l'UMP contre le mariage pour tous (ce n’est pas la première et d’autres suivront certainement) n’a pas beaucoup plu à GayLib (les personnes LGBT de l’UMP). Le groupe a donc demandé (3 juillet), par courrier, à Jean-François Copé si les homosexuels sont "encore les bienvenus" à l’UMP. "François Fillon a, lors de la campagne présidentielle, eu des mots extrêmement durs et sectaires à l'encontre des homosexuels. Si maintenant même vous, monsieur le secrétaire général, vous vous mettez dans une telle posture, je vous pose la question très solennellement : "Les homosexuels sont-ils encore les bienvenus à l'UMP ?". Les deux défaites électorales que nous venons de subir méritent pour le moins une remise en question de certaines options, dont le refus affiché de l'égalité des droits pour les homosexuels", écrit Emmanuel Blanc, président de GayLib. "En vous positionnant aussi fermement dans le refus de l'accès au mariage à tous les couples, vous fermez le débat et risquez de mettre notre famille politique dans la même impasse que lors du débat délétère sur le Pacs en 1998", juge-t-il.
 
Jean-François Copé répond à GayLib
Invité début juillet de l’émission Europe 1 Soir, Jean-François Copé a répondu à quelques questions d'auditeurs et d’auditrices dont, rappelle YAGG (5 juillet), la première portait sur le "mariage gay" (on lui préfèrera l’expression mariage pour tous, nettement plus juste sur le fond comme sur la forme). La seconde question reprenait l’interrogation de GayLib : "Les homosexuels sont-ils les bienvenus à l'UMP ?" Réponse de l’intéressé : "Je suis un peu étonné que vos auditeurs n'aient à me poser que ces questions-là (…) Je ne vois pas bien cette question, parce qu'en réalité tous les Français sont bienvenus à l'UMP, je ne crois pas que cela ait aucun rapport avec leur orientation sexuelle. Chacun sait le combat déterminé qui est le mien et celui de mes amis contre toute forme d'homophobie (…) Je trouve cette formule un peu excessive. Elle ne correspond pas à ma réalité de ce qu'est notre famille politique". Bon, pas certain que la réponse satisfasse les militants de GayLib, quant aux autres, ils savent déjà à quoi s’en tenir.