Aids 2022 : retour au présentiel

Publié par Sophie-seronet le 08.08.2022
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Chaque été, tous les deux ans, a lieu la conférence mondiale sur le VIH, organisée par l’IAS. Aids 2022 se déroule, cette année, à Montréal (Canada) du 29 juillet au 2 août. Une 24e édition qui revient au format présentiel, après deux années en virtuel.

Quels enjeux ?

Quatre ans. Cela fait quatre ans que la plus grande conférence mondiale sur le VIH n’avait pas eu lieu en présentiel. La dernière édition s’était déroulée à Amsterdam en juillet 2018. En quatre ans, le monde et par écho la lutte contre le sida ont subi de grands bouleversements et de nombreuses crises : une crise sanitaire avec une pandémie mondiale (toujours en cours n’en déplaise aux « rassuristes ») ; une crise écologique avec de nombreuses catastrophes causées par le réchauffement climatique ; une crise économique avec la guerre en Ukraine ou encore la récente et inquiétante épidémie de Monkeypox. La place de la lutte contre le VIH/sida dans ce contexte mondial saturé est un des enjeux de la conférence Aids 2022 et notamment de la plénière d’ouverture qui annonce la couleur : « Plus de 40 ans après le premier cas rapporté de sida, nous vivons dans un monde où le VIH est l’épidémie oubliée. Concernée par le manque d’intérêt et le rythme lent des progrès effectués dans la réponse au VIH, l’IAS appelle le monde à se remobiliser et suivre la science : follow the science » mantra de l’IAS. Plus qu’une conférence parmi d’autres, Aids 2022 est un moment de rencontres et de partages avec des scientifiques et activistes venus-es de toute la planète. Le lieu en lui-même est gigantesque, une ville dans la ville où, au total, 30 000 personnes sont attendues. Le programme, qui fait plus de 50 pages, donne le tournis. Cinq jours de conférence, 3 000 posters, plus de 100 sessions (plénières, ateliers, symposiums, présentations orales, etc.) mais aussi des actions militantes au Village associatif et même des événements culturels : un show de drag queens et le spectacle d’une compagnie de théâtre.
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Le sida est toujours là !

Les masques sont toujours là, mais la joie de se retrouver est palpable. Les activistes et scientifiques du monde entier se retrouvent enfin quatre ans après la conférence d’Amsterdam en 2018. Certains-es se prennent dans les bras ; d’autres font des selfies. Une ambiance un peu électrique règne dans les immenses couloirs du palais des congrès de Montréal. La grande métropole insulaire et portuaire du fleuve Saint-Laurent accueille la conférence mondiale sur le VIH pour la deuxième fois (1989 et 2022). Mais une fois passée la joie des retrouvailles, un sujet de discussion revient sur toutes les lèvres. Des centaines de participants-es, principalement originaires d’Afrique, d’Asie et d’Amérique du Sud, ont vu leurs demandes de visas rejetées, y compris certains-es qui avaient pourtant reçu des bourses en partie financées par le gouvernement fédéral canadien pour y assister. Dans un tweet daté du 26 juillet et très relayé, Winnie Byanyima, la directrice exécutive de l'Onusida, partageait son émoi après avoir failli rater son avion pour Montréal. « Tous les documents ont été scrutés encore et encore, des appels ont été effectués et j'ai pu embarquer en dernier. C’est injuste et raciste ! » Dans la foulée, Coalition PLUS tweetait « des centaines de militants-tes du Sud n'ont pas pu obtenir de visas pour assister à la conférence sur le sida à Montréal. La délégation de Coalition PLUS sera donc amputée de 15 % de ses membres ».
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Opioïdes, l’autre épidémie

La plénière d’ouverture de cette seconde journée s’est ouverte avec Doris Peltier, activiste autochtone très investie dans le mouvement autochtone de lutte contre le VIH au Canada et dans la recherche en santé communautaire autochtone depuis plus de dix ans. Cette mère, grand-mère et arrière-grand-mère vivant avec VIH, semble très émue en prenant la parole. Les populations autochtones ont connu discriminations, violations de leurs droits humains et sont affectées par le VIH de façon disproportionnée. « 95, 95, 95… Est-ce qu’on va atteindre cette cible en tant que peuple indigène ? », s’interroge Doris Peltier ? « Je ne pense pas et je vais vous dire pourquoi ». Et l’activiste d’énumérer les freins qui empêchent de mettre fin à l’épidémie de VIH dans la communauté autochtone. Il y a une forte sérophobie dans la communauté, mais aussi une forte réticence à aborder les sujets du VIH et de la sexualité en particulier dans les zones rurales les plus éloignées. « Je parle de ma séropositivité publiquement pour briser ce tabou », explique Doris Peltier. La militante insiste aussi sur la nécessité d’inclure la population indigène comme « population clé » dans la réponse globale du VIH avec des engagements pris auprès de ces peuples où qu’ils soient dans le monde.
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Fiers-ères dealers de RDR

Il est 8 heures du matin, mais les militants-es de Coalition PLUS sont nombreux-ses dans la salle, arborant fièrement un tee-shirt avec le slogan « Proud harm reduction dealers » (Fier-ères dealers de réduction des risques) de face et au dos « Support community health » (Soutenez la santé communautaire). Modéré par Camille Spire (présidente de AIDES), le symposium de Coalition PLUS porte sur le thème « Drogues, VIH et implication communautaire : une vision à 360 degrés sur comment approcher les pratiques et politiques de réduction des risques ». Vaste programme dont l’importance est rappelée par Camille Spire : « Les personnes usagères de drogue sont 35 fois plus exposées au VIH que n’importe quel autre groupe ». Elle prend également l’exemple du ballroom (concours de danse et de performances LGBT+) organisé la veille, dont une des catégories était « consommation de drogue » et montrait, avec des costumes utilisant métaphoriquement des outils de RDR, comment il est possible d’aborder la question avec innovation. Pour illustrer les lacunes du financement de la RDR (seulement 13 % du financement nécessaire est investi) et l’importance primordiale que le plaidoyer se construise sur les résultats de la recherche communautaire, trois présentations ont témoigné des innovations de la recherche menée avec et pour les communautés.
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Master class sur la santé communautaire

Rena Janamnuaysook est une activiste trans thaïlandaise qui a fait très forte impression en plénière du quatrième jour de la conférence Aids 2022, en délivrant une véritable master class sur la force de la santé communautaire. Une présentation puissante qui nous a donné envie de la rencontrer.
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Suivez les activistes !

Après cinq journées intenses de symposiums, plénières et satellites, la session de clôture vient résumer les enjeux et mettre un terme à la conférence Aids 2022. Une heure et demie avant la cérémonie, les rapporteurs-ses de l’IAS s’enchaînent pour analyser et apporter un regard critique aux thématiques et sujets principaux des cinq derniers jours. La cérémonie est modérée par Birgit Poniatowski, directrice exécutive de l’IAS et est démarrée par Jean-Pierre Routy, co-président local. Ce dernier entame le ballet des remerciements et rappelle l’importance du slogan qui « a résonné dans ces salles », celui du U = U. Alors qu’il cède sa place au ministre de la Santé canadien, Jean-Yves Duclos, les activistes canadiens-nes prennent possession de la scène en brandissant des pancartes « La promesse non tenue du Canada ». L’activiste au micro invective le ministre et la salle : « La réponse canadienne au VIH est bloquée dans le passé. Aidez-nous à avancer ».
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