Alcool : qui trinque ?

Publié par jfl-seronet le 23.06.2023
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Produitsalcool

Depuis des années des politiques publiques sont conduites pour limiter l’impact sur la santé de la consommation d'alcool. En 2017, des repères de consommation à moindre risque ont été élaborés. Différentes campagnes ont permis qu’ils soient connus du grand public et intégrés. Le 13 juin, Santé publique France a publié dans le cadre du BEH (Bulletin épidémiologique hebdomadaire) des données sur la consommation actuelle des Français-es, notamment sur la part de personnes adultes dépassant les repères de consommation à moindre risque. Explications.

Dépassements stables

La proportion d'adultes dépassant les repères de consommation à moindre n'a pas évolué entre 2017 et 2020, rappelle Santé publique France (SpF). L’objectif de l’étude dont les résultats viennent d’être publiés est d'actualiser cette estimation avec les données les plus récentes, ainsi que de fournir un panorama régional de cet indicateur. Alors quels sont les résultats ? Entre 2020 et 2021, dans l’hexagone, la proportion d'adultes déclarant une consommation d'alcool se situant au-dessus des repères de consommation à moindre risque a significativement diminué (de 23,7 % à 22 %). Cette baisse s'observe principalement parmi les hommes, les plus jeunes, les plus âgés et les personnes aux revenus les plus élevés. Le dépassement des repères apparaît significativement supérieur à la moyenne hexagonale en Bretagne, Pays de la Loire et Auvergne-Rhône-Alpes, tandis qu'il est inférieur en Île-de-France, Bourgogne-Franche-Comté et dans l'ensemble des DROM (départements et régions d'outre-mer).

Qui trinque ?

Voici ce que donnent les données concernant la France métropolitaine (hexagone). En 2021, la proportion d’adultes âgés-es de 18 à 75 ans déclarant avoir consommé de l’alcool au cours des sept derniers jours était de 54,1% ; une proportion stable par rapport à 2020. La proportion d’adultes déclarant une consommation au-delà des repères de consommation à moindre risque au cours de la dernière semaine était de 22 % : 30,6 % parmi les hommes et 13,8 % parmi les femmes. Cette part, restée stable entre 2017 et 2020, a significativement diminué entre 2020 et  2021, explique le BEH. Cette baisse entre 2020 et 2021 est portée par les hommes âgés de 18 à 75 ans, tandis que l’évolution n’apparaît pas significative parmi les femmes. Entre 2020 et 2021, la proportion d’adultes ayant consommé au-delà des repères de consommation au cours de la dernière semaine a significativement baissé parmi les hommes âgés de 18 à 24 ans et parmi les hommes et les femmes âgés de 65 à 75 ans.

Dépassements et repères

En 2021, comme c’était déjà le cas en 2017, parmi les trois dimensions composant les repères de consommation (voir encart), la plus fréquemment dépassée était celle des « deux verres maximum en une journée » (17,8 %), puis celle des « dix verres par semaine » (8,1%), et enfin celle des « cinq jours dans la semaine » (7,1 %). Seule, la proportion d’adultes dépassant les cinq jours de consommation par semaine a significativement diminué entre 2020 et 2021.

Profils socio-économiques

En 2021, l’écart selon le niveau de diplôme reste important : 24,9 % des personnes adultes diplômées du supérieur ont dépassé les repères lors des sept derniers jours contre 19,6 % des adultes ayant un diplôme inférieur au baccalauréat ou sans aucun diplôme, précise le BEH. Entre 2020 et 2021, une baisse de la proportion d’adultes dépassant les repères de consommation d’alcool à moindre risque est observée parmi les plus diplômés-es comme parmi les moins diplômés-es. En stratifiant par sexe, cette baisse s’observe seulement parmi les hommes. En 2021, les personnes adultes les plus aisées financièrement sont 27,6 % à consommer au-delà de ces repères, contre 17,6 % des personnes moins aisées financièrement. Entre 2020 et 2021 une baisse de la proportion d’adultes dépassant les repères de consommation d’alcool à moindre risque est également observée parmi les plus aisés-es financièrement. En stratifiant par sexe, cette baisse s’observe seulement parmi les hommes. Enfin, parmi les actifs de 18-64 ans, la proportion de personnes dépassant les repères en  2021 était de 23,2 % parmi les actifs occupés (en baisse significative par rapport à 2020, 24,7 %, (sans différence significative par rapport à 2020).

Perception des risques

En 2021, en France métropolitaine, parmi les adultes ayant consommé de l’alcool au cours des sept derniers jours, 83,8 % déclaraient que, pour limiter les risques pour sa santé, le nombre maximum de verres d’alcool à ne pas dépasser sur une journée était inférieur ou égal à 2 verres (76,8 % en 2020). De plus, 86,2 % des 18-75 ans ayant consommé de l’alcool au cours des sept derniers jours déclaraient que, sans prendre trop de risque pour sa santé, il est possible de boire de l’alcool entre 0 et 5 jours par semaine (83,2% en 2020). Au global, en 2021, 73,3 % des 18-75 ans ayant consommé de l’alcool au cours des sept derniers jours donnaient des seuils à la fois inférieurs ou égaux à deux verres par jour et entre 0 et 5 jours par semaine (65,6 % en  2020). Par ailleurs, 88 % des 18-75 ans se déclaraient tout à fait ou plutôt d’accord avec l’affirmation « la consommation de boissons alcoolisées peut augmenter le risque de cancer » (84 % en  2020). Enfin, 19 % des adultes ayant consommé de l’alcool lors des sept derniers jours déclaraient avoir envie de réduire leur consommation (14 % des adultes ne dépassant pas les repères et 25% de ceux les dépassant, différence significative).

Conclusions

La baisse entre 2020 et  2021 de la proportion de personnes adultes dépassant les repères de consommation d’alcool à moindre risque est un « signal encourageant ». Pour les auteurs et autrices, il « reste nécessaire de continuer à informer sur les risques de la consommation d’alcool, même à faibles doses, et à faire connaître les repères, sachant qu’environ un quart des Français-es considèrent que globalement, boire un peu de vin diminue le risque de cancer, plutôt que de ne pas en boire du tout ». Ils-elles recommandent la « poursuite des campagnes médiatiques d’information et de marketing social », mais aussi par « la mobilisation de nouveaux vecteurs comme l’apposition de messages sanitaires sur les contenants des boissons alcoolisées » ; cette mesure est en discussion au niveau européen. Autre piste : agir sur les prix. Les études le démontrent : cela fait partie des « mesures les plus prometteuses pour réduire la consommation d’alcool et  la  morbi-mortalité associée ».

Cette étude a été conduite par Raphaël Andler, Guillemette Quatremère, Arnaud Gautier, Viêt Nguyen-Thanh Viêt, François Beck. Source : Bulletin épidémiologique hebdomadaire, 2023, n°. 11, p. 178-186.

 

Repères de consommation à moindre risque
En 2017, un groupe d’experts-es mandaté par SpF et l’Institut national du cancer (INCa) a émis un avis présentant des repères de consommation d’alcool visant à en limiter les risques pour la santé. Ces repères ont été établis sur la base de l’analyse de la littérature scientifique, de modélisations du risque de mortalité attribuable à l’alcool pour la population française, et d’une étude qualitative ad hoc. Ils sont énoncés de la façon suivante : « Si vous consommez de l’alcool, il est recommandé pour limiter les risques pour votre santé au cours de votre vie : de ne pas consommer plus de dix verres standard par semaine et pas plus de deux verres standard par jour ; d’avoir des jours dans la semaine sans consommation. »

 

Méthode de l’enquête
Les données utilisées proviennent du Baromètre de Santé publique France 2021. Il s’agit d’une enquête téléphonique sur échantillon aléatoire réalisée auprès de personnes adultes résidant en France métropolitaine et dans les départements et régions d'outre-mer (DROM). Ce qui a été analysé concerne la consommation d'alcool au cours des sept derniers jours avant l’enquête.