Le droit d'Existrans

Publié par Mathieu Brancourt le 20.10.2013
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Initiativeexistrans 2013trans

Ce samedi 19 octobre, plus d'un millier de personnes ont marché pour qu'enfin une loi viennent reconnaitre des droits à la communauté trans. Sous le signe de l'union des militants de l'égalité.

Autour de la buvette de la station Invalides, les ralliés à la cause de la lettre la plus oubliée de l'acronyme LGBT attendent le départ de la marche Existrans, dix-septième du nom. Cette année comme les précédentes, la revendication que partagent les signataires du collectif est simple : "Trans, intersexes : une loi des droits". Car il y a urgence à inscrire légalement les libertés fondamentales de celles et ceux qui vivent pour l'heure dans une précarité sociale et juridique affolantes.

Changement d'état-civil quasi-impossible, stérilisation forcée et jurisprudence au bon gré des juges, le quotidien des transgenres relève du parcours du combattant. Sans compter les humiliations répétées quand la réalité de leurs papiers leur est renvoyée en pleine face. "C'est un ressenti très personnel. Mais la violence est là", explique Neil, 25 ans. "La précarité sociale est forte et le parcours difficile, médicalisé, marginalisé et sans tribunes dans lesquelles les trans peuvent s'exprimer directement". En tant que F to X, il "ne se reconnait pas dans la binarité du genre" et souhaite tout simplement la disparition de la mention du sexe des papiers d'identité. Avec son groupe transidentitaire nantais Purple Block, créé l'été dernier, il participe à sa première existrans : "c'est un premier acte de visibilité que je souhaite voir se propager en province".

Le droit aux droits

Des Invalides à la place de la Bastille, c'est un long cortège bariolé et bruyant qui a traversé Paris. Dans le millier de participants à l'Existrans, les amis des trans ont l'occasion d'exprimer leur solidarité face à ce déni de droits qui leur est opposé. Pour le collectif Oui oui oui, se trouver aux côtés des personnes directement concernées, c'est donner sens à la lutte collective d'une communauté, comme durant les débats sur le mariage pour tous. "Il n'y a pas de débat sur le fait d'être solidaire des mobilisations des personnes trans", explique Alix Béranger, porte-parole du collectif pour l'égalité. "Nous sommes là pour les droits d'une communauté qui ne doit pas être cloisonnée. Donner voix au chapitre des "T", c'est le sens d'un mouvement pour l'égalité holistique, mais qui doit laisser la parole à ces derniers" explique-t-elle. Il faut être vigilant et ne pas accaparer l'espace ni reproduire l'invisibilisation que l'on a connue pour les lesbiennes", précise Patrick Comoy, également militant à Oui Oui Oui. "On doit se tenir à disposition des assos trans et recréer du discours à la première personne. Nous devons être alliés, mobilisés sur des projets communs", conclut le jeune homme. Promouvoir les réalités plurielles des trans, dans un mouvement solidaire et engagé, tel est l'objectif des participants de cette Existrans 2013. Radical, le Purple Block regrette la vision parfois "stéréotypée" de la transition, même s'il s'accorde sur le bénéfice d'une loi. En attendant, "il est important de rassembler toutes les transidentités", ajoute-t-il.

Il est temps !

Dans un contexte de renoncement du gouvernement sur ces questions de société (PMA comprise), se battre pour une loi posant les premiers jalons d'une amélioration du parcours des personnes est indispensable. Tous espèrent un texte dans les prochains mois, après l'avis de la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH), rendu en juin dernier. "Enfin, une institution impartiale et reconnue vient rappeler aux pouvoirs publics ses engagements sur la question trans", se félicite Dorothée Delaunay, membre du groupe LGBT à Amnesty International France. "Le sujet devient de plus en plus important et cette Existrans tombe à pic". Lors du débat sur la loi sur l'égalité femme/homme, les amendements en faveur d'une reconnaissance de leurs droits avaient été retirés ou refusés. Alors, la perspective d'une proposition de loi pour le premier semestre 2014 sera décisive. "La position de la CNCDH, dont Amnesty est membre, défend un changement d'état-civil clair, avec une procédure simplifiée, accessible et surtout démédicalisée. Et surtout devra mettre fin aux stérilisations forcées", indique encore Dorothée Delaunay.

Le mouvement Existrans va plus loin et prône le modèle argentin, où le changement est libre et gratuit devant un officier d'Etat-civil, ainsi qu'une sensibilisation des institutions et des médias aux questions trans. Aussi, le collectif soutient la campagne internationale "Stop Trans Pathologization" pour l'arrêt de la pathologisation de la diversité du genre dès l'enfance. Pour Act Up-Paris, cette "transphobie d'Etat" coûte chère à la santé des personnes, particulièrement les femmes trans migrantes. Selon l'association, elles sont un des groupes les plus touchés par le sida. "Les politiques répressives en matière de travail du sexe et d'immigration" les frappent de plein fouet, ajoutent les activistes d'Act Up-Paris. Deux ans après la proposition de loi de Michèle Delaunay, aujourd'hui ministre délégué à l'autonomie, il est temps que cette dernière soit accordée à la communauté trans.

Commentaires

Portrait de valoo

Quelle belle journée avons nous passé !

Et cela malgré les regards interrogatifs, les sourires .... les remarques ou les gestes déplacés... Ou cette femme qui nous a applaudie !

Mais combien cela faisait plaisir d'être ensemble pour sortir des tristes clichés sur les TRANS...

Nous avions aussi plein de différence entre nous, FtM ou MtF, look décalé ou non, ... Mais nous étions belles et beaux ...  !