Prostitution : les députés… résolus !

Publié par jfl-seronet le 28.06.2011
2 376 lectures
Notez l'article : 
0
 
pénalisationprostitution
Nouvelle salve parlementaire contre la prostitution. Cette fois, des députés de tous bord ont signé (20 juin) une proposition de résolution qui préconise l’abolition de la prostitution. Ce geste symbolique a suscité une vive réaction du Collectif Droits & Prostitution. Explications.
Prostitution1_0.jpg

Et voilà, une nouvelle couche ! Une proposition de résolution, signée par des députés de tous bord (PS, Parti de gauche, PCF, Verts, UMP, Nouveau Centre), qui affirme une position abolitionniste sur la prostitution, a été déposée à l'Assemblée nationale (20 juin) a annoncé la députée socialiste Danielle Bousquet. Cela "témoigne d'une large volonté politique de déclencher une réelle prise de conscience de ce qu'est la réalité de la prostitution aujourd'hui", déclare dans un communiqué la députée des Côtes-d'Armor qui a cosigné avec le député UMP Guy Geoffroy le rapport de la mission parlementaire sur la prostitution ou plutôt contre la prostitution. Pour rappel, ce rapport préconise, notamment de pénaliser les clients de la prostitution. Cette résolution a reçu le soutien de Jean-Marc Ayrault (patron des députés PS), de Martine Billard (députée et vice-présidente du Front de gauche), de Marie-George Buffet (députée PC), d’Yves Cochet (députés Verts), de Christian Jacob (patron des députés UMP), François Sauvadet (patron des députés du Nouveau centre) et Marie-Jo Zimmermann (UMP, présidente de la Délégation aux droits des femmes de l’Assemblée Nationale). "Nous refusons d'organiser et de promouvoir la marchandisation des êtres humains, et nous défendons le droit à ne pas se prostituer, quelles que soient les pressions physiques ou économiques", écrit Danielle Bousquet qui, comme à son habitude, n’évoque que la prostitution contrainte, jamais celle qui est librement exercée. Cela donne donc des formules du genre : "La prostitution est le produit d'une société patriarcale, de l'argent roi et où la liberté sexuelle est loin d'être atteinte. En cela, elle constitue une menace pour les plus vulnérables et une entrave à une société de liberté et d'égalité entre les femmes et les hommes". Cette résolution, qui n’a rien à voir avec un texte de loi (c’est plutôt un acte symbolique, une façon de marquer le coup), n’est pas inscrite à l'ordre du jour de l'Assemblée.
Cet acte symbolique n’a pas échappé au Collectif Droits & Prostitution. "Prétendant combattre des idées reçues sur la prostitution, cette résolution vise à "réaffirmer la détermination de la France à lutter contre la prostitution et à garantir les droits des personnes prostituées" ironise le collectif. Les travailleurs et travailleuses du sexe, les associations de santé communautaire, de prévention et de lutte contre le sida réunis au sein du collectif Droits & Prostitution redoutent que "cette nouvelle campagne contre la prostitution réduise, au contraire de ce qui est annoncé, non seulement les droits des prostitué(e)s, mais aussi leur accès à la santé et aux structures de prévention". Le Collectif estime que cette résolution "ouvrirait la porte à un arsenal de mesures visant à entraver le travail sexuel, voire à l’interdire. Dans l’immédiat, cette résolution prépare ainsi l’annonce d’une loi pénalisant les clients. Le collectif Droits & Prostitution a déjà dénoncé les conséquences d’une telle mesure : éloignement géographique et difficultés d’accès des structures de prévention, clandestinité accrue, exposition aux risques de transmission du VIH sida et des autres IST, recrudescence des violences. Ces parlementaires refusent obstinément d’écouter les arguments des associations qui travaillent tous les jours auprès des prostitué-e-s". Ce que critique, tout particulièrement, le collectif Droits & Prostitution, c’est que ces "arguments visent à présenter la prostitution comme une violence en soi et à nier toute notion de travail sexuel indépendant (…) Nous soutenons qu’aucune mesure de répression contre la prostitution, y compris contre les clients ne peut prétendre protéger les prostitué(e)s contre les viols et les violences".

Commentaires

Portrait de frabro

Nos députés de tous bords semblent ne plus savoir que faire pour redorer leur blason et le parer des couleurs de la vertu et des bonnes moeurs, après les dérapages que l'on sait des milieux politiques. Alors ils reviennent aux vieilles recettes qui ont toujours échoué, parmi lesquelles la prohibition : que l'on parle psychotropes ou prostitution, même combat, il faut interdire et ne jamais faire la part des choses. La lutte contre l'esclavage qu'est la prostitution forcée est bien entendu nécessaire, mais pousser l'ensemble de la profession à la clandestinité ne fera que renforcer les réseaux, la précarité, et la soumission des travailleurs du sexe à des pratiques dangereuses et violentes allant à l'encontre de la prévention. Hélas, en période électorale, le bon sens laisse la place au populisme...
Portrait de ZONOK

Encore une prétention totalement irréaliste, et franchement prétentieuse. Cela fait 5000 ans que la prostitution existe, dans tous les pays de la terre, et qu'aucun état, sauf peut-être des dictatures facho ou nazi, n'ont jamais réussi à "abolir". Bon courage, ... Ca va chauffer !!!
Portrait de communard2011

ZONOK wrote:
qu'aucun état, sauf peut-être des dictatures facho ou nazi, n'ont jamais réussi à "abolir".

Même sous ces régimes dont le plus mal famé d'entre eux, la prostitution n'a non seulement pas été interdite mais a été institutionnalisée, sous contrôle du Service de Santé des Armées. Lire cet excellent ouvrage historique sur cette question :

Wehrmacht et prostitution sous l'occupation, I. Meinen, Payot, 2006.

Pour moi, la question intéressante est celle de la distinction entre prostitution assumée par certain(e)s et prostitution imposée à d'autres qui viennent d'Europe de l'Est ou d'Afrique...  Comment lutter efficacement contre les marchands d'hommes responsables de cette seconde forme de prostitution ?

Portrait de romainparis

prostitution et personne n'y arrivera. Et tant mieux ! Ils me saoulent tous ces hypocrites qui prétendent défendre la liberté humaine en édifiant, ou en tentant d'édifier des prisons de penser et d'être. Si la lutte contre l'esclavagisme, de toute sorte, me semble même pas discutable par évidence, la liberté de disposer de son corps n'a pas à être réglementé, ni de loin ni de près. Même s'il existe des cas exceptionnels, la majorité des personnes qui se prostituent ne le font pas par plaisir. Faudrait plutôt se pencher sur les causes qui les amènent à la prostitution...