LaNewGazettinaFerdyzkaïa # 6

Publié par Ferdy le 13.09.2009
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Pas de temps à perdre, c'est Dimanche. Délocalisée dans une zone prétendument touristique, thermale et balnéaire, la rédaction ne perçoit aucun bonus dominical ; c'était soit ça, soit la messe.

D'un commun accord avec la direction, ma rubrique gastronomique est déprogrammée. Des lecteurs se seraient plaints. D'autres se seraient empoisonnés. Et ce n'étaient pas les mêmes.

Donc, vaste programme que d'observer en long, en large et de travers, ce nouveau dimanche qu'il nous est donné de vivre. Affectionner ou, a contrario, haïr ce jour bizarre de la semaine ne sera pas le sujet de ce commentaire, tant il nous paraît évident que tout a déjà été dit et entendu à ce propos. Et que nous en sommes toujours au même point.

Pour la catégorie des désoeuvrés à laquelle j'ai l'honneur d'appartenir, je considère que c'est le jour idéal pour passer l'aspirateur. A part ça, mon programme habituel ne s'en trouve que très peu affecté.

Tout ce qui restait comme valeur refuge de la droite, des petits commerçants à la bourgeoisie industrielle, s'est vue littéralement conspuée par les nouveaux marchands du Temple qui estiment que ce jour béni en vaut bien un autre. Dans la même session parlementaire, il a été décidé que le travail dominical, en cette période de disette électorale et de chômage galopant, apporterait une réponse convaincante aux problèmes qui nous empoisonnent l'existence (et ils sont nombreux.), et puis ce serait optionnel, facultatif, comme la tva.

Il est vrai que depuis la désertification des campagnes et l'avènement de Benoît XVI, nos églises sont loin de fonctionner à flux tendus. Il y en a même, parmi ces édifices, qui s'écroulent ou menacent de le faire si la municipalité ne fait pas un geste. Je serai assez d'avis de les transformer en dortoirs ou en supérettes, en attendant un renouveau charismatique toujours possible.

Une journée, une seule, à ne rien branler. C'était stipulé dans notre contrat depuis Sa création. Alors, évidemment, quand le politique s'en prend à la glandouille, on s'attaque à un pan essentiel de l'humanité, son aspiration au bricolage et à la sieste cochonne. Certains cumulent (bricolage /cul / + dîner chez les beaux-parents de l'un ou de l'autre).

Je ne voudrais pas plonguer le blog, car j'ai aussi en mémoire de multiples exemples avérés de dimanches pourris, tristes à chier, sur les cimes du désespoir. C'était à l'époque où je pouvais encore grimper aux arbres. 

De ma cruelle enfance, au hasard. Evidemment, il y en aura toujours pour railler d'insipides plaies narcissiques récurrentes.

Le déguisement que ma mère m'obligeait à porter ce jour-là, ici je me dois de laisser au lecteur une panoplie de son choix, pourvu qu'on y trouve une chemise blanche et un blazer bleu marine ; le cheveu peigné avec cette raie à droite ridicule, dessinée avec une application toute professionnelle, légèrement gominée (tout à l'opposé de ma chevelure rebelle, hirsute des seventies) ; la DS rutilante, garée devant le portail, prête pour le cortège funèbre.

Je pense à mes amis qui ont organisé un pique-nique sur la plage. Pour nous, la direction, c'est Nice, quartier Cimiez, départ prévu (et, hélas, confirmé) : 11:45. Nous passons prendre l'aïeule. Elle aura encore voulu mettre presque la totalité de ses bijoux ; ma mère lui intimera l'ordre de trancher entre l'or jaune et le platine, quitte à ce que l'opération nous retarde un peu. Dans la voiture, une curieuse et assez détestable combinaison de parfums féminins qui se sont déclarés la guerre. Une longue route sinueuse avant de parvenir à un restaurant baptisé Auberge de Saint-(...), ou Moulin des (...), parce que ma mère adore tout ce qui est perché, les vastes panoramas, l'artisanat de l'arrière-pays et les langoustines.

Mes parents, par le truchement de l'aieule, ne fréquentent à titre privé et dominical, que la population extrêmement vieillissante qui prolifère sur la Côte d'Azur. D'antiques veuves, pareillement bijoutées et parfumées, nous ont rejoint. Les chauffeurs demeurent dans les autos, ou à proximité ; je crois savoir qu'on leur a servi un déjeuner et j'avoue que cela ne me regarde pas. Les vieilles dames me dévisagent aimablement, et me confondent avec mon frère. Ma mère rectifie l'arbre généalogique, l'aîné est dispensé de faire de la figuration depuis ses quatorze ans. On me demandera, à un moment ou à un autre, ce que je compte faire plus tard. Certainement pas comme mon père, seule certitude. Déjà, la nuit tombe, ou est déjà tombée (selon arrivage) ; nous, c'est le moment que l'on choisit pour se relever. Ineffable arthrose, sournoise digestion. Que diriez-vous d'aller prendre un thé chez Maud ? Perso, je m'étais fait à l'idée que cette journée serait définitivement perdue le matin même, alors maintenant, ça m'est égal, Maud ou pas Maud. Ce sera décompté en heures sup.