Sortie de vestiaire

Chaque nouveau coming-out d'un sportif de haut niveau, s'il nous réjouit, vient aussi nous rappeler l'archaIsme qui prévaut encore dans ce milieu surexposé, hétéronormé et clinquant.

On se réjouit, et en même temps, à chaque fois, on réalise la part de courage qu'il leur aura fallu pour sortir du placard (du vestiaire), car même dans ce monde occidental civilisé de 2014, l'orientation sexuelle ne va jamais de soi.

Revendiquer pour exister, pour aspirer peut-être à une certaine tranquillité, demeure un exercice salué par tous mais vécu par chacun comme un progrès sur le chemin de la tolérance, un gage de liberté apporté à la foule anonyme des supporteurs, des sponsors, des jeunes gays, des médias, bref, de tout ce qui peut au bout du compte réformer l'opinion publique.

Il est intéressant de constater que cette avancée prudente mais irréversible se produit à quelques mois de l'inauguration des J.O. de Sotchi et à quelques encablures du mondial de foot (Brésil) et du barnum de Dubaï... 

autant de scènes potentiellement sensibles où il ne fait pas bon être gay ni lesbienne, euphémisme lorsque la législation ne condamne pas tout simplement à la prison, au châtiment voire à la peine de mort. L'olympisme saura-t-il se diluer dans le système Poutine, les drapeaux arc-en-ciel viendront-ils contrarier le spectacle planétaire d'un tsar qui en est encore à rêver d'un empire docile, hétérosexué et orthodoxe ?

Pour aller un peu plus loin dans ce constat morose, l'Union Européenne n'aurait-elle pas loupé, une fois de plus, l'occasion de manifester son attachement aux valeurs démocratiques qu'elle est censée défendre en faisant valoir auprès des autorités russes son refus collectif de participer à ces agapes dans ce contexte liberticide ? Evidemment, niet, l'odeur gazière du pétrole est plus forte que l'aspiration à la défense des droits de l'Homme.

Et puis l'UE n'a pas d'âme... l'Espagne est sur le point de rétablir une loi franquiste contre l'avortement, dans une indifférence européenne pour le moins troublante.

Enfin, il n'y a pas que les LGBT ni le sport dans la vie. Il y a aussi le VIH !... rappelons au passage que ce site lui est dédié ainsi qu'aux hépatites, et à défaut de pouvoir s'en féliciter, nous sommes nombreux ici à avoir l'un ou l'autre de ces virus en partage.

Sans rien retirer à l'audace, ni au courage qu'il faut encore avoir pour révéler publiquement ce qui, au demeurant, relève de l'intimité, il me semble que toutes ces festivités sportives internationales seraient une vitrine idéale pour les associations de "lutte" (je ne sais plus soudain comment les définir, tellement leur rôle m'apparaît diffus ou inaudible) contre le sida.

Je veux dire, au-delà de la petite prise de parole dans un point presse aléatoire ou un stand invisible perdu dans la masse d'un village olympique, inviter les pays participants, à chaque occasion qui leur offerte de gravir un podium, de rappeler aux médias l'étendue de l'épidémie, son impact et la politique mise en oeuvre pour la prévention et l'accès aux soins.

Convertir les médailles d'or ou d'argent en autant d'engagements en faveur des populations concernées, soulagerait plus efficacement les peuples en voie de disparition, notamment sur le continent africain, mais pas que, dont les performances si souvent célébrées finissent par nous faire oublier l'hécatombe.