"AAH : le décret de la honte"

Publié par jfl-seronet le 21.11.2011
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Act Up-Paris a annoncé (10 novembre) avoir saisi le Conseil d’Etat pour demander l’annulation du décret relatif à l’attribution de l’Allocation aux Adultes Handicapés (AAH), aux personnes ayant un taux d’incapacité permanente compris entre 50% et 79% avec une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi. Explications.
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Dans un communiqué (10 novembre), Act Up-Paris explique pourquoi l’association a demandé l’annulation du décret (n°2011-974 du 16 août 2011) relatif à l’attribution de l’Allocation aux Adultes Handicapés (AAH), aux personnes ayant un taux d’incapacité permanente compris entre 50% et 79% avec une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi. L’association estime que ce décret est "entaché d’incompétence et de cynisme" d’une part parce qu’il "réduit la durée d’attribution de l’AAH de cinq ans à un ou deux ans maximum" et d’autre part parce qu’il redéfinit "d'une manière paperassière la notion de restriction substantielle à l’emploi".
"En fixant à un ou deux ans maximum – au lieu de cinq ans précédemment – la durée de l'attribution de l'AAH, le ministère de la Santé modifie d'une manière malfaisante l'esprit de la loi de 2009, avance l’association. Il ne tient pas compte de la réalité concrète des administrations qui instruisent les dossiers : il faut compter en moyenne trois mois pour remplir un dossier d'AAH, et un délai réel de 9 à 18 mois pour que les MDPH [maisons départementales des personnes en situation de handicap] et les CAF [Caisses d’allocations familiales… ce sont elles qui versent la prestation] l'instruisent. Cela signifie que le délai nécessaire à la constitution et à l’instruction du dossier équivaut à la totalité de la période de bénéfice de l’allocation, telle que fixée par le décret".
L’association estime aussi que : "De fait, la réduction de la durée de l'attribution de l'AAH à deux ans conduira les dizaines de milliers de personnes qui en bénéficient à être perpétuellement engagées dans la procédure administrative visant à prouver le degré de leur handicap". Act Up-Paris y voit une façon d’institutionnaliser "la précarité sociale des malades".
L’association met aussi en avant un autre argument : le décret redéfinirait de façon "cruelle et perverse" la notion de "restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi, compte tenu du handicap". Autrement dit, le gouvernement somme "les administrations concernées, au nom du principe de l'égalité de traitement, de ne pas considérer les contraintes subies par un travailleur valide pour accéder à l'emploi (transport, difficultés économiques régionales ou nationales d'un bassin de l'emploi, manque de formation, etc.), pour l'appréciation de l'incapacité durable et substantielle d'un handicapé bénéficiant de 50 à 79%. Or, si un travailleur valide bénéficie de tous ses moyens physiques pour surmonter ces contraintes, ce n'est évidemment pas le cas pour les personnes handicapées qui doivent faire face à d'autres contraintes qui font partie de leurs vies quotidiennes de malades (rendez-vous chez les médecins, suivi régulier dans les hôpitaux, prises de médicaments, effets secondaires etc.). Une personne handicapée n'a ni les mêmes ressources physiques ni la même disponibilité qu'un travailleur valide", explique l’association. "L’article 2 du décret que nous attaquons veut restreindre les possibilités d’obtention de l’AAH en redéfinissant de manière inique et criminelle la notion de restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi subie par une personne handicapée", avance Act Up-Paris pour qui ce "décret doit être annulé, sa mise en application mettrait en danger la santé de dizaine de milliers de malades".

Commentaires

Portrait de rudy84

Il était à prévoir que l'élan par la "crise" pour satisfaire les directives européennes que notre modèle social est jugé par l'oligarchie comme fort coûteux, et qu'il serait bienvenu de faire la part belle aux assurances privées. Les ARS comme les lois HPST vont à terme faire disparaitre les MDPH. Les partenaires sociaux deviennent des plate formes des appels et de ventilation des dossiers. CAF, CPAM, MSA, ces organismes sont appelés à se "déconcentrer" terme qui signifie qu'il y aura de moins en moins de travailleurs sociaux auprès des malades, qu'on appellera bientôt "client", le terme usager a déjà disparu de la SNCF vouée aussi à la privatisation. Il est certain que pour les bénéficiaires de services sociaux fragilisés par un système sans âme, une perte de papiers, un oubli administratif, le coup de tampon validant la démarche manquant, bref, l'accès aux droits deviendra non plus un parcours du combattant mais une "bataille" épuisante qui sera perdue d'avance par les plus isolés, puisqu'il s'agit bien d'une politique d'isolement du malade. Voilà le nouveau défi pour les associations qui peu à peu deviennent des substituts aux manquements de l'état et de la solidarité nationale, c'est inacceptable !