L’assurance maladie sous conditions ?

Publié par jfl-seronet le 04.05.2014
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Droit et socialobservanceassurance maladie

"Pour une abrogation définitive de l’arrêté instituant une conditionnalité d’observance à l’accès aux soins pour les personnes malades", c’est ce que réclament dans un communiqué (24 avril) le TRT-5 et le collectif [im]Patients, Chroniques & Associés. Explications dans le communiqué que voici.

"Le 14 février 2014, le Conseil d’Etat a suspendu en référé un arrêté de la ministre de la Santé qui conditionnait le remboursement d’un dispositif de prise en charge de malades souffrant d’apnée du sommeil à son utilisation réelle par les patients. Cette décision du Conseil d’Etat est passée relativement inaperçue dans le débat public alors qu’il s’agit pourtant d’un enjeu fondamental sur lequel il est important que l’ensemble des acteurs du monde de la santé se prononce. Ce projet prévoyait ni plus ni moins que de supprimer le remboursement d’un dispositif de soins et de télésurveillance aux patients jugés non suffisamment observants. Les prémices de ce que certains ont appelé "l’assurance-maladie conditionnelle", ou l’idée que pour être remboursé un patient devait offrir des "garanties" à l’assurance maladie.

"Une assurance maladie sous conditions"

Nous constatons aujourd’hui que certains acteurs justifient une assurance maladie sous conditions et laissent entendre que l’efficience en santé ne peut être fondée que sur la sanction financière, pour ne pas dire la "punition" des personnes malades considérées comme non-observantes. Ces mêmes personnes estiment ainsi que les patients sont toujours responsables, sans s’interroger sur d’autres raisons provoquant la non-observance d’un traitement ou la non-utilisation d’un dispositif. Les associations de personnes concernées par des maladies chroniques et les acteurs de la lutte contre le VIH/sida ont montré les réussites d’un malade acteur de sa santé, impliqué dans son propre parcours de soins et son protocole thérapeutique. L’observance aux traitements est une condition indispensable à la réussite de la stratégie thérapeutique et à son efficience. L’observance et la non-observance ne disent rien de la volonté de la personne malade de se prendre en charge et oublient notre lutte quotidienne pour concilier maladie, autonomie et qualité de vie.

De l’accompagnement, pas des sanctions

Nous affirmons que tout ce qui peut être fait, notamment à travers des dispositifs techniques innovants (santé connectée, biologie délocalisée, télésurveillance, etc.) pour favoriser l’observance des personnes doit être mis en place. Mais nous pensons que ceci doit être fait dans une optique d’accompagnement des personnes et non de sanction, principe réaffirmé dans la Loi HPST [Hôpital Patients Santé et Territoires, ndlr] de 2009 et dans les derniers rapports sur l’accompagnement et l’éducation thérapeutique.

En posant une condition de performance individuelle à l’accès aux dispositifs de soins, l’assurance maladie fait dériver notre modèle vers une pratique punitive du comportement individuel. Aujourd’hui, c’est l’apnée du sommeil qui est concernée. Ne peut-on pas penser que demain seront visées les personnes diabétiques qui auront mal utilisé leurs dispositifs (pompes à insuline ou lecteurs de glycémies) ou les personnes en insuffisance rénale chronique qui seraient obligées d’accepter un type de dialyse imposé par l’assurance maladie, mais non adapté à leur état de santé ?

L’abrogation définitive de l’arrêté

Nos collectifs considèrent que l’arrêté du 22 octobre 2013 contient en germe une remise en cause des principes fondamentaux de notre système de solidarité, issu du préambule de la Constitution de 1946. Le TRT-5 et le collectif [im]Patients, Chroniques & Associés demandent à Madame Marisol Touraine l’abrogation définitive de cet arrêté.