Quels lieux de vie pour les personnes séropositives ?

Publié par Emy-seronet le 08.12.2010
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états généraux VIH en Ile-de-Francemobilisation
« Le rapport Yéni rappelle que la réussite thérapeutique est dépendante des conditions de vie et de la situation sociale des personnes ». Cet argument, avancé par le groupe de travail « Lieux de vie » des Etats généraux 2010 sur la prise en charge globale du VIH en Ile-de-France (26-27 novembre), s'appuie sur un constat : les conditions de logement de nombreuses personnes séropositives sont extrêmement précaires, et ce facteur affecte leur accès aux soins.
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« Nous logeons une dizaine de personnes dans des appartements. Il y a deux semaines, on a reçu une lettre nous disant qu’à partir de janvier on ne pourrai plus garder ces appartements, » explique Andréa, médiatrice culturelle à l’association PAST. « On se demande ce qu’on va faire des personnes hébergées. Ce sont des étrangers, certains sont sans papiers…, » alerte la jeune femme. Comme les « locataires » d'Andréa, ils sont nombreux à connaître une situation d'urgence. Interpellé sur la question des lieux de vie, Claude Evin, directeur de l’Agence régionale de santé (ARS) d’Ile-de-France promet qu’il va lancer des appels à projet pour que les personnes séropositives aient un meilleur accès au logement. Mais plusieurs participants le rappellent : sans un réel engagement de tous les politiques concernés, ces projets ne pourront être financés.

L'hébergement ? Peu accessible et souvent inadapté

Appartements de coordination thérapeutique (ACT) ou appartements relais, les dispositifs d'hébergement doivent s'adapter aux besoins de la personne. « En général, les ACT, c'est pour les personnes seules ou les couples. J'ai fait une demande mais on est cinq ou six à attendre un appartement familial, » explique Zina, célibataire avec enfants. « Le compagnon, même s'il est séronégatif, devrait pouvoir intégrer l'ACT avec la personne séropositive », ajoute un autre intervenant. « Les ACT n’ont pas tous le même fonctionnement, » regrette Fatima. « Certains nous interdisent les voyages à l'étranger pendant la période d'hébergement, la plupart nous interdisent d'héberger quelqu'un... Cela renforce l'isolement. »

Il faut plus d’appartements, mais il faut aussi plus d'ACT accessibles aux personnes à mobilité réduite. Et, comme « en colocation, on est souvent obligé de cacher ses traitements », les personnes séropositives doivent être prioritaires dans les logements individuels des centres d'hébergement. La santé doit faire partie des missions des centres d'hébergement, avec l’insertion sociale. En parlant d’insertion sociale, la prostitution et la consommation de drogues ne doivent plus être un frein pour accéder à un hébergement. « Il faut aussi intégrer les appartements relais dans un cadre de financement pérenne qui permettrait, par exemple, de rénover les plus vétustes, » explique Michel-Ange qui insiste sur les manques de moyens. Autre consensus : faciliter l’accès à un logement social stable doit rester l’objectif numéro un afin que les structures d'hébergement restent une solution de transition...

Certains sont bloqués dans un établissement spécialisé...

Ce logement stable, les personnes séropositives ne pourront l’obtenir qu’avec le soutien des élus locaux et des bailleurs. « Je m’évertue à demander un place en HLM depuis des années, » explique Jacko. « Je vis en ACT alors que ma santé est redevenue bonne. J'y suis bloqué alors que d'autres attendent pour y rentrer. » Si les appartements du parc privé étaient aménagés, de nombreuses personnes à mobilité réduite bénéficieraient également d’un logement stable.

Interdire aux banques et aux autres organismes de prêts d'exiger un test du VIH lorsqu'une personne souhaite souscrire à un emprunt : plus qu’une proposition, c’est un appel contre cette mesure discriminatoire. Financer des programmes interassociatifs spécifiques à l'accès au logement, tels que la Plateforme Logement et Sida (Paris) : d’après les participants, c’est particulièrement efficace. Et, si les réservataires et les bailleurs se décident à élaborer et à signer des conventions avec la Plateforme Logement et Sida, on touche presque au but...

... pendant que d'autres sont forcés d'en intégrer un

Les prestations d'aide à domicile existent mais les personnes porteuses du VIH ne remplissent pas toujours les critères pour y accéder. Prendre en compte la fatigabilité qu'entraîne la maladie sur les personnes séropositives permettrait à un grand nombre de bénéficier de l'aide dont elles ont besoin lors des tâches quotidiennes, et de ne pas être obligées d'intégrer un établissement spécialisé.

Des disparités d'accès aux dispositifs de maintien à domicile ont été recensées d'un département à l'autre, d'une région à l'autre. Le groupe de travail souligne l'importance de réduire ces inégalités qui affectent les personnes lors de leurs démarches et créent le trouble quant aux droits auxquels elles peuvent prétendre. Enfin, les Services d'accompagnement médico-social des adultes handicapés (SAMSAH) et les Services d'accompagnement à la vie sociale (SAVS) ont pour vocation de maintenir les personnes dans leur lieu de vie « naturel » : les MDPH doivent prendre moins de temps pour orienter les personnes vers ces structures.

Personnes malades et malades qui viellissent

« Une question se pose avec les fermetures de services d’aide à domicile, » souligne un participant au sujet des personnes invalides forcées de quitter leur logement. « Des patients vivent parfois sept ans à l’hôpital, et l’hôpital n’est pas un lieu de vie. » De toutes façons, le groupe de travail le rappelle : les lits d'hospitalisation aussi se font de plus en plus rare. La prévalence des patients « neuro-sida » (qui souffrent d'une démence causée par la maladie) est en augmentation ; il leur faut également un lieu de vie. Quant aux soins de suite et de réadaptation (SSR), leur fonction n’est pas d’héberger les personnes en situation d’urgence.

Il faut favoriser l'ouverture d'établissements accessibles aux personnes précaires, tels que les établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Et, pour que ces établissements acceptent d'accueillir « ceux qui coûtent cher, » il faudrait intégrer le coût des molécules onéreuses au prix de la journée. Enfin, dans tous les établissements susceptibles d'accueillir des personnes séropositives, il semble indispensable de former le personnel aux spécificités du VIH. « Les personnes qui prennent en charge des personnes séropositives dans les maisons de retraite ne connaissent rien au VIH mais elles ne demandent qu'à être formées, » confirme, par exemple, Jean-Marc Bitoune du Corevih Nord.

Commentaires

Portrait de maya

« Les personnes qui prennent en charge des personnes séropositives dans les maisons de retraite ne connaissent rien au VIH mais elles ne demandent qu'à être formées, " pourquoi elles ne sont pas formées serait la question à 1 euro quand on a 25 ans de recul sur la maladie ?