"Il y a toujours la même stigmatisation face au sida":

Publié par jl06 le 23.07.2023
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Dix-neuf ans à la barre, capitaine du navire Fight Aids Monaco, et fidèle au poste. La princesse Stéphanie ne s’est jamais détournée d’un des ses plus anciens engagements pour lutter contre la propagation du virus du sida et accompagner les personnes vivant avec le VIH.

 

Un combat qu’elle a mis en lumière en Principauté, en arrivant petit à petit à fédérer la communauté monégasque autour d’elle. Vendredi soir, le gala de Fight Aids Monaco - ayant trouvé sa place pour de bon dans le calendrier estival du pays - a fait salle comble au Sporting.

Une manière "de remercier nos donateurs et d’en convaincre d’autres", a rappelé la princesse Stéphanie, juste avant de rejoindre sa table.

Fière du chemin accompli pour épauler les personnes touchées par cette maladie en Principauté, tout en faisant fonctionner la Maison de vie de Carpentras fondée par l’association il y a douze ans. Pensée comme un havre de repos dédié aux femmes et aux hommes vivant avec le VIH. Avec le franc-parler qu’on lui connaît, la princesse Stéphanie a aussi pris le temps de rappeler, que le combat n’était pas fini. Interview.

 

Vous avez lancé l’association Fight Aids Monaco en 2004, près de vingt ans plus tard, l’engagement est toujours nécessaire ?

J’étais bien consciente au commencement qu’il faudrait toujours accompagner la cause et se relever les manches. Mais je ne pensais pas devoir répéter et répéter toujours les mêmes messages de prévention.
Je ne pensais pas, non plus, que la discrimination soit toujours aussi présente, voir encore plus puisqu’elle est accompagnée d’une recrudescence d’homophobie dans la société qui est scandaleuse. La pandémie n’a rien arrangé. On a parlé que de Covid pendant presque trois ans et on a fait des pas en arrière sur le sida.
Des gens vivant avec le VIH ont manqué de traitements, ont manqué de soins. C’est terrible.

Les messages de prévention élémentaires face au sida ne semblent pas traverser les générations, et beaucoup de jeunes populations ne se sentent plus vulnérables face à la possibilité d’être touché par ce virus…

C’est pourtant primordial d’éduquer les jeunes. Certains se protègent surtout pour ne pas mettre une fille enceinte. Au moins ils se protègent ! Ça n’empêche, beaucoup d’hépatites, plus mortelles que le VIH. Je me souviens d’une année, où nous avons fait les mêmes interventions de prévention à Monaco et à Carpentras [où l’association possède sa Maison de vie N.D.L.R.]. Et nous avons été étonnés que les jeunes en France aient moins d’informations.
À Monaco, nous sommes un petit pays mais on fait de grandes choses. Et nous faisons beaucoup plus pour le VIH, pour la prévention, pour l’information que de grands pays qui se voilent la face.

L'essentiel, aujourd'hui, c'est le dépistage

Quel est votre message pour les jeunes ?

C’est de lire ou de voir des témoignages de personnes qui vivent avec le VIH. Pour comprendre à quel point ils sont enfermés dans une solitude, ou vivent dans le secret de ne pas pouvoir le dire par peur d’être rejetés. Certains ont vécu ce rejet de leur entourage, parce qu’ils ont dit qu’ils étaient séropositifs.
Des gens qui ont tout perdu à l’annonce de la maladie, non pas à cause de VIH, mais à cause du regard des gens et de la bêtise de certains autour d’eux.

 

À Genève, un patient ayant subi une greffe de moelle osseuse vient d’être déclaré en rémission de son sida. Six cas similaires sont recensés dans le monde. Ce message scientifique, dans votre rôle d’organisme de prévention est-il un espoir ou brouille-t-il le message ?

Quelque part, cela brouille le message. Car certains peuvent se dire : on en guérit. Mais ce n’est pas six cas sur des millions qui peuvent faire une généralité. C’est à double tranchant. Nous l’avons vécu lors de l’arrivée des trithérapies. Ce ne sont pas des médicaments qui permettent de guérir, ce sont des traitements à vie. L’essentiel, aujourd’hui, c’est le dépistage, car nous avons en Europe les moyens pour endiguer la pandémie.
Avec les nouveaux traitements, une personne porteuse du VIH n’est plus contaminante. Si les gens se font tester et sont dépistés positifs, ils prennent un traitement et peuvent avoir une vie normale. Sur le continent africain, d’autres problématiques entrent en jeu, mais les gouvernements doivent s’y mettre.

Les préjugés demeurent tenaces autour du sida... n’est ce pas désespérant ?

On en est toujours au même point en termes de stigmatisation et de discrimination. On a trop entendu que c’était un virus qui ne touche que les homosexuels et les toxicomanes.
Aujourd’hui, plus de 50 % vivant avec le VIH sont des femmes.
Le sida touche tout le monde, arrêtons de vivre avec des œillères. Et ayons une ouverture d’esprit, ayons de la compassion pour ceux qui vivent avec cette maladie. Je le répète depuis vingt ans maintenant : le VIH ne s’attrape pas avec un sourire.

Et vous continuerez à le répéter longtemps encore…

Peut-être… J’espère que mes enfants prendront ma suite !

Michael Jackson était "un être si puissant sur scène, si vulnérable dans l’intimité"

The magic of Michael Jackson... le titre du spectacle prévu pour le gala de Fight Aids ce vendredi soir était sans équivoque. Et rendait hommage au roi de la pop avec une troupe d’artistes l’interprétant à différentes époques de sa vie.

Dans la salle aussi, plusieurs convives avaient joué le jeu du dress code MJ. De la discrète paire de chaussettes blanches pour certains. Au complet look du clip de Thriller pour d’autres, blouson de cuir rouge compris.

Un duo en 1991

Une seule personne dans la salle pouvait se targuer d’un lien particulier avec le roi de la pop : la princesse Stéphanie.

 

En 1991, quand parait l’album Dangerous, c’est elle la "mysterious girl" créditée ainsi dans le livret, qui chante en duo avec Jackson sur le titre In the closet.

Un privilège car le chanteur disparu en 2009 n’a gravé sur disque que peu de duos dans sa carrière. "Le temps que j’ai passé avec lui en studio pour enregistrer cette chanson, je m’en souviens comme d’un moment privilégié où nous avions beaucoup parlé", raconte la princesse Stéphanie qui, a l’époque, sortait de l’étourdissant succès de son tube Ouragan.

Trois décennies plus tard, elle garde une image duelle de la star. "Sur scène, il renvoyait une puissance avec sa musique, son engagement, c’était vraiment le King of the pop. Une image en total contraste avec qui il était dans l’intimité où il me donnait l’impression d’être un petit oiseau tombé du nid. Un garçon extrêmement fragile et vulnérable qu’on a envie de protéger. J’aurais voulu, j’aurais pu peut-être faire plus pour lui. Mais les choses sont ainsi, c’est la vie."