Les archives communautaires

« objets inanimés, avez-vous donc une âme , » se lamentait le poète.

 

Je ne parle pas ici d’objets tels que les livres ou les disques, dont le contenu souvent prime sur le contenant et nous les faits percevoir de manière faussée.

 

Une boîte, un coquillage, un bonnet... toutes ces petites choses insignifiantes qui envahissent nos demeures, indispensables puisque futiles et que nous traînons avec nous les long de nos existences, au cours de nos voyages, ou qui sommeillent dans un coin de pièce ou de notre mémoire. Pas des fétiches, seuls nous, individuellement, leur accordons une importance, mais plutôt des repères, fruits de hasard, de rencontres, de désirs.

 

Certains nous sont vitaux, signifient pour nous un état, marquent un lieu, une fonction quotidienne : le rond de serviette dans le tiroir de gauche qui, s’il n’est pas à sa place, nous fait tourner en bourrique et nous obligent à les chercher toutes affaires cessantes, quitte à laisser cramer le steack.

 

D’autres s’attachent à nous, sans que nous les désirions, mais stagnent et encombrent mais ne peuvent disparaître : l’écharpe que untel à oublié un jour, que vous oubliez de rendre, qu’il a oublié de reprendre bien que vous l’ayez laissé bien en vue au milieu de la table, et qui est en instance de partance depuis des lustres.

 

D’autres encore focalisent nos pensées, désirés, patiemment acquis, pour finalement ne pas nous importer tant que ça, disparaissant à la poubelle un jour de nettoyage de printemps, puis regrettés durant une décennie : le blaireau en pur poil de blaireau (arf) qui devait adoucir l’agression de la mousse à raser quand vous vous rasiez encore.

 

Il y a aussi ceux qui s’imposent à vous, évidents, s’intègrent à votre intérieur de manière définitive alors que vous n’y avez jamais songé : la boite vide de cigarillos qui fait pile poil la taille idéale pour y ranger votre nécessaire à couture.

 

Ceux qui me fascinent le plus restent ceux auxquels vous êtes parfaitement indifférents, dont la perte vous laisseraient insensibles, qui seraient immédiatement jetés s’ils étaient dégradés et qui, pourtant, vingt ans plus tard, sont toujours là, vous narguant de la perfection de leur immobilité : la tasse de votre thé matinal quotidien.

 

Bref voilà un forum loin de la prévention, de la maladie, de la souffrance, un forum sur nos vies : comment percevez-vous vos objets ?

Commentaires

Portrait de milodemavie

Il doit être sur le bureau quand je rentre...
Il doit être dans ma poche gauche de mon blouson l'hiver, dans la poche droite de mon jean l'été...

Mais dans le fond je le vois jamais...
Il est toujours en aléatoire...

Enfin c'est mon objet à moi !
Portrait de Marbouillat spirit

Portrait de saraconor

qui va avec dans la Medina?
Portrait de Marbouillat spirit

j'ai dans le coeur la maison où est né ma maman , des souvenirs d'enfances de vacances ,des sons , des musiques , des odeurs !  et les cornes de gazelles , ses gateaux preferés et les miens ! reste l'accueil ,la chaleur  du sud ,des suds

Portrait de frabro

En peluche de préférence. C'est toujours de bonne humeur, c'est doux et tendre, et ça a comme un parfum d'enfance inoubliable.

Celui-ci représente bien autre chose de ma vie d'adulte, mais me suit partout depuis 17 ans, avec ses copains et copines.

 

et celui-là me suit encore plus puisqu'il est toujours dans ma voiture et me rappelle Lyon ou je me plaisait beaucoup, et mon équipe de foot préférée :

 

 

J'en ai plein d'autres mais gardons en pour plus tard ! 

Portrait de Marbouillat spirit

Objets inanimés, avez-vous donc une âme
Qui s'attache à notre âme et la force d'aimer? - Lamartine
Portrait de moajdi

Je la vois depuis l'enfance. Elle m'attire depuis l'enfance. Je l'ai vu se déplacer ; être posée presque oubliée dans un coin ; puis trôner avec discrétion sur un chevet, pleine de bijoux ; passer dans un carton aux cours de déménagement ; disparaître au fond d'une malle ; subir les caprices de son destin de bibelot...

Elle est en peau de mamelle de chamelle séchée, décorée au henné, légère et rigide, conservant un reste d'odeur des épices qu'elle a transporté. Elle me plaît. Elle appartient à Môman. Enfin, appartenait.

La voyant dans l'entrée, cet hiver, au moment de les quitter pour rejoindre Paris, je le lui ai dit, pour la première fois (au bout de 43 ans, tout de même).

« Bin, prends-la ! »

Elle est chez moi.

la blonde

Portrait de ganesh

j'en ai pas mal qui me suivent depuis des annees mais j'ai une preference pour mon ipod source d'evasions avec des musiques de tous les genres..et mon appareil photo!! important pour regarder et revivre les moments que j'ai capture avec les gens que j'aime ou des endroits de reves.........ganesh
Portrait de parisien-breton_en_ligne

Je fais partie, du côté de mon père, d'une famille nombreuse : ils étaient neuf enfants dont huits mariés et nous sommes vingt quatre cousins et cousines.

Les dimanches après midi, nous allions régulièrement prendre le goûter chez Pépé et Mémé, mes grands parents.

Vous imaginez les tablées... Pour le café, nous avions des bols : tous identiques en porcelaine blanche, un filet doré et une tête de Bretonne avec sa coiffe... tous identiques sauf deux : sur chacun, un couple de Bretons différents...

A chaque goûter, c'était à savoir qui aurait un de ces deux bols. Et souvent, ça finissait en dispute entre enfants, voire en larmes et ces deux bols restaient dans le buffet : "comme ça, y aura pas de jaloux" nous disait on...

Vingt ans après, au retour des obsèques de ma grand mère (qui avait 91 ans), nous nous sommes retrouvés en famille pour un dernier goûter dans la maison familiale. Une de mes tantes, pendant ce goûter, a lancé à la cantonade : "est ce que quelqu'un veut prendre quelque chose dans la maison, un souvenir  ?" ; j'ai eu, peut être plus vite que les autres, le réflexe ; en tout cas, du fond de mon être, est sortie une voix "oui, moi, je voudrais bien les deux bols avec les couples"...

Notre enfance nous est apparue comme par magie...mes cousins et cousines étaient "verts" : personne n'y avait pensé mais, une fois que je l'ai dit, tout le monde en avait envie, de ces deux bols... 

les bols

Aujourd'hui, ça reste mes bols du dimanche que je n'ose même pas mettre dans le lave-vaisselle de peur de gomer les têtes qui me rappellent mes six et sept ans...

Je me suis fait confirmer par mon père : ces bols sont plus vieux que moi...

Portrait de jean-rene

Moi, j'ai une histoire de tasse mais, comme je suis infoutu de faire apparaître une photo sur le site, je vais me contenter de mots.

Ma grand'mère maternelle, orpheline à 11 ans, avait été mise dans un pensionnat de bonnes soeurs. A 21 ans, au sortir du pensionnat, elle fut mise comme bonne chez une riche américaine qui avait une dame de compagnie allemande. Elle y rencontra mon grand-père maternel (orphelin de mère et abandonné par son père) qui travaillait là comme plombier. Ils décidèrent de se marier (vers 1910).
La riche américaine et sa gouvernante allemande leur offrirent, comme cadeau de mariage, des tasses dépareillées. Mes grands-parents les conservèrent religieusement, comme un cadeau de la "classe  supérieure" aux prolétaires qu'ils étaient; et ces tasses trônaient sur le buffet de leur "salle à manger". Ils moururent, puis ma mère mourut et je dus faire, il y a 4 ans le tri de l'appartement de ma mère.
Lorsque je découvris, dans un placard, ces tasses que ma mère avait conservées, je fus très ému, surtout lorsque je reconnus l'une d'entre elles: une tasse en forme de fraise, rouge et verte avec écrit ""Gruss aus Hannover. Herrenauser Allee" au dessus de la reproduction peinte d'une avenue bordée d'arbres de Hanovre.
Je l'ai toujours.

Cette tasse est pour moi à la fois le symbole de la modestie de mes grands parents, de leur reconnaissane à l'égard de ces riches patronnes (un état d'esprit qu'on imagine plus maintenant) et de la fidélité qu'ils gardèrent à l'égard de la gouvernante allemande malgré deux guerres qui nous opposèrent au pays de Hanovre.