Les archives communautaires

je ne voudrai pas pas que ce texte soit pris comme une attaque...c'est juste une réflexion personelle.

Je m'interroge personnellement sur la politique de prévention dite "réduction des risques".

 

Pour ce qui est des usagers de drogue celà me parait une évidence: si l'on remplace une seringue qui a déjà servi par une seringue neuve le risque d'attrapper la maladie (pas celui de se faire une overdose, hélas) disparait totalement.

Mais si on remplace une sodomie avec préservatif et gel  par une sodomie avec un tube de hyalomiel et rien d'autre, on ne passe pas à une anihilation du risque. Et ceux qui sont toujours en train de vous dire "c'est pas prouvé" (quand on parle de surinfection et de coinfection par exemple) n'ont certainement pas organisé de cohortes avec 100 personnes se faisant sodomiser avec capotes, cent à sec, et cent avec beaucoup beaucoup de gel. Je ne trouve pas ça souhaitable d'ailleurs.

 

Personnellement je ne suis pas encore revenue de ma contamination. Et je ne suis pas revenue de cette scéne quelques années avant ou une amie médecin m'a dit, quand je lui ai parlé de fellation protégée ou non : "Tu dois gèrer tes prises de risques". Je l'ai pris comme une autorisation. Et le résultat ne m'enchante pas (comment ne pas être alarmiste, expliquer que mes gencives saignent facilement sans avoir l'air d'une pousse au crime?)

 

Je me rappelle de l'époque, avant l'arrivée des tri-thérapies, où mille rumeurs couraient. Je me souviens du "pas la peine de se faire dépister, y'a pas le médicament!". C'était une connerie monstrueuse: autour de moi des amis sont mort qui, dépistés, auraient pu soigner leurs affections opportunistes, par exemple des tubercoloses, et attendre la venue des remédes. A l'époque les rumeurs mortifères venait de l'extérieur du monde du Sida.

 

Aujourd'hui ce sont des (je ne fais pas de généralités)  membres de la sidacratie, des salariés,  qui vous expliquent que sous traitement on n'est plus contaminant (à partir d'une étude faite sur des hétérosexuels en couple stable, on se garde bien de préciser les bémols à cette étude), que s'enculler sans capote c'est pas grâve il suffit juste de mettre beaucoup de gel, bref qu'il n'y a plus que les imbéciles  (''tradipréventionnistes") qui mettent le préservatif. A ce titre là on se demande pourquoi Aides distribue des capotes sur ses stands, pourquoi on se bat pour qu'il y ait des distributeurs de préservatif dans les lycées...

Personnellement je m'interroge: sur un site fréquenté en majorité par des seropositifs certains discours (et certaines censures) ne poussent-ils pas au passage à l'acte?

 

Arnold Schoenberg disait "on écrira encore beaucoup de belle musique en do majeur", lui qui avait fait péter la tonalité avec son école de Vienne. Moi je pense qu'il y a encore de belles choses à faire avec le préservatif, et que la réflexion sur la phobie de la capote mériterait d'être dévelloppée.

 

Maintenant certains ici vont surement prendre ces lignes pour une attaque personnelle. Moi même j'ai mis du temps (et des séances de pys) avant d'accepter la part de responsabilité que j'avais dans ma contamination. Et si je leur dit le contraire , qu'on est dans la même galére, qu'on souffre des même chiasses, des mêmes lippo-dystrophies, des mêmes faiblesses, du même rejet , ils ne voudront pas m'entendre. Et si je leur dit que mon angoisse, ma terreur, c'est de contaminer quelqu'un d'autre vont-ils me rire au nez?

Commentaires

Portrait de maya

pendant un bon moment(difficile à quantifier trop loin) après avoir appris être séropo, je ressentais ça, je m'imaginais mon sang comme pollué.

sentiment qui revenait en force lors des relations sexuelles.

 

Portrait de skyline

Merci à Ecceomo, Jckbrun, Vincent58 et Kaaphar pour leurs réponses (d’ailleurs Kaaphar, où en est ton hép C ?). Je ne reviendrais donc pas sur le bareback en tant que tel car vos argumentations étaient suffisantes. Comme quoi, les barebackers sont les mieux placés, les mieux expérimentés et les mieux outillés pour construire la prévention des rapports sexuels sans préservatif. Mais je tiens à revenir tout de même sur certains commentaires.

 

A Maya je répète (on en a pourtant déjà parlé) :

Act Up traitent les gens qui baisent sans capote d’ASSASSINS ! C’était encore le cas lors du zap du Banque Club…

Act Up a inventé le sérotriage afin de diviser pour mieux régner (surfer sur le politiquement correct afin de garantir ses subventions) plutôt que de s’intéresser aux raisons sociales et émotionnelles qui amenaient certaines personnes à sérochoisir leur sexualité et leur vie affective.

Je rappelle que c’est une association communautaire soi-disant représentative de TOUS les homos (sic.). Malgré tout ce qu’Act Up a fait de bien et continue à faire de bien, il faudra quand même un jour qu’elle admette ses erreurs et les terribles conséquences qu’elles ont eu :

-       10 ans de retard dans la mise en place de la RDR sexe : combien de contamination aurait-on pu éviter ?

-       Une structuration sociopolitique du cadre symbolique (le « séropo contaminateur ») qui a conduit à la pénalisation de la transmission du VIH et considérablement altéré le concept de « responsabilité partagée ».

-       Une scission terrible dans la communauté associative LGBT et séropo qui a enrayé notre lutte unitaire pour l’égalité des droits juridiques et sociaux des LGBT et des séropos.

Ca aurait pu être une autre association, mais il s’agit d’Act Up relayé par le très gay-normatif Têtu, et il ne faudrait pas oublier cela au profit du reste. Chacun doit assumer ses responsabilités, où qu’il soit. Il me semble que sur Séronet, Aides soit pas mal critiquée aussi… Alors pas la peine de réifier Act Up sur le thème « ils ont tellement fait pour nous ». Je m’en branle vois-tu, et ce qui m’intéresse c’est l’efficacité préventive, pas les états d’âmes des moralistes coincés qui ont malheureusement encore un pouvoir médiatique et politique qui les dépasse.

 

A Léa, je réponds :

Ce que vous dites à longueur de forum n’est rien d’autre que le discours officiel d’Act Up. Alors peut-être que vous ne voulez pas entrer dans le jeu de « mon association est meilleure que la votre », mais objectivement vous ne réussissez pas. Et puis c’est absurde. On est tous influencé par des idéologies plus ou moins radicales, plus ou moins exclusives, plus ou moins objectives et pragmatiques. Il faut l’assumer. En termes de prévention, je préfère lire Seronet, Warning, Aidsmap ou Fréquence VIH plutôt qu’Act Up, le Kiosque Sida-Info-Service ou l’INPES. Car faire du discours « tout capote » à mes ami-e-s barebackers et/ou hétéros n’aide en rien et ne les protègent pas plus. C’est de ces gens là dont il s’agit, pas des adolescents qui entrent dans une sexualité active et qui connaissent tous et toutes le pourquoi et le comment du préservatif, même si l’éducation sexuelle reste assez pitoyable en France et leur utilisation du préso pas très continue dans le temps.

Vous parlez d’autre part (à la suite de Maya) de présophobie. Présophobie ne veut rien dire ! S’il vous plait Léa, vous avez pourtant l’air d’être cultivée avec tous les bouquins que vous avez lu, alors ne reprenez pas des concepts qui ne veulent rien dire sémantiquement et ne correspondent pas à la réalité sociale ou au vécu des personnes concernées. Je n’ai rien contre les néologismes, au contraire ; ici au Québec on peut les utiliser et en inventer à notre guise, car la langue française n’est pas coincée dans le carcan d’une académie réactionnaire. Et puis, c’est tellement dénigrant de dire cela ! Une phobie engendre une peur panique de l’animal, de l’objet ou de la situation à laquelle elle est reliée. Personne n’a de peur panique du préservatif, mais un problème physiologique en matière de confort. Cela semble plus fréquent chez ceux qui n’ont pas appris leur sexualité avec le préservatif. C’est bien pour ça que l’on encourage les adolescents à essayer les préservatifs avant leur première relation sexuelle : pour des raisons techniques mais surtout des raisons charnelles ! C’est comme la masturbation, il n’est pas rare qu’un homme ou une femme qui ne se masturbent pas adolescent-es aient par la suite des problèmes d’éjaculation précoce ou de frigidité.

Pourtant vous persistez et signez : « L'argument de l'inconfort du latex je n'y crois pas. Ou vraiment pour des gens qui ont des problèmes dermatologiques (ou qui bandent mou).  Je suis persuadée que c'est autre chose qui m'anéantit et que  je n'arrive pas à cerner (et puis chez chacun c'est différent) ». Que diriez-vous si j’écrivais : je ne crois pas qu’on puisse se sentir homme dans le corps d’une femme… Vous diriez que ce n’est pas une question de croyance. Et à mon avis vous auriez raison. Je ne suis pas barebacker et je n’ai pas de problème avec le préso ; dès 12 ans je me suis branlé avec et je rêvais de voir un mec l’enfiler devant ma bouche ébahit et mon cul encore tout serré de par sa jeunesse ; bref, j’ai appris à l’érotiser (pas grâce au porno ça c’est sûr, ta remarque Kaaphar était tout à fait pertinente). Mais je suis quand même objectivement obligé de reconnaître que c’est plus agréable et que je bande mieux sans capote. Alors franchement je ne comprends pas qu’à propos des homos qui aiment les relations sexuelles sans capotes, vous utilisiez le vocable et les analyses psychiatrisantes de leurs détracteurs alors que dans le cas des trans’ vous luttiez à raison contre la psychiatrisation des comportements sociaux et des identités de genre. Il y a là une contradiction que je ne saisis pas et je ne crois pas que c’est la première fois que je vous en fais part. Et puis ceux qui bandent mou ont le droit à une sexualité tout aussi satisfaisante que ceux qui bandent dur, non ? Pourquoi alors leur refuser la RDR si c’est la seule solution qu’ils ont trouvé pour jouir c’est la sexualité no capote ?

Pour finir, car il ne faut tout de même pas l’oublier. 30 % des gays ne se protègent pas systématiquement pour la sodomie, 6 % des gays utilisent systématiquement un préservatif pour la fellation. Quant aux hétéros, les chiffres sont encore pires. Alors Léa, que proposez-vous pour ces gens qui n’utilisent pas toujours une capote ? Ne rien leur dire à propos de la multi-factorialité de la transmission du VIH ? Leur cacher la réalité de l’échelle de risque ? Oblitérer leurs vécus et leurs désirs ? Revenir 25 ans en arrière quand le sida était un « cancer gay » lié à l’immorale promiscuité sexuelle des pédés ? Franchement, ne tiennent pas la route. Que diriez-vous à un trans’ noir bisexuel barebacker ? Mets une capote ou crève ? Fais comme Michael Jackson, change de couleur ? Mari-toi et devient une bonne femme au foyer monogame ?

La prévention doit être construite pour et par tout le monde, de quelque minorité que l’on soit ou pas. La prévention n’est pas faite pour être en adéquation avec vos pratiques personnelles ou votre orientation intime individuelle. La prévention doit être pour toutes les personnalités quelque soit leurs individualités. La prévention ça n’est plus aujourd’hui un dogme urgentiste mais un ensemble de stratégies cumulatives. Oui la capote a atteint ses limites. Il serait temps de s’en remettre et de passer à autre chose : construire la prévention du 21è siècle par exemple, au lieu de ressasser la norme préventive de la fin du 20è, quand on crevait à la chaine. La RDR ce n’est pas que pour les barebackers, mais aussi pour tous ceux qui vivent des vulnérabilités individuelles, sociales, culturelles, économiques, territoriales face au risque VIH ; ceux qui n’ont ni capote ni traitements : les africains, les prostitués du monde entier, etc…

En tout cas je ne laisserai pas les tradipréventionnistes réactiver les logiques de contrôle social vis-à-vis des générations futures. Je suis peut-être jeune et con, mais je veux que mon jeune amoureux ou mon petit frère vivent une sexualité épanouie, c’est-à-dire à moindre risque et respectueuse de leurs désirs, fantasmes et plaisirs, que ça vous plaisent ou non. Je reste persuadé que les individus sont assez matures pour comprendre que le risque zéro n’existe pas et qu’ils doivent alors réfléchir aux risques qu’ils sont prêts à prendre pour eux-mêmes et pour leurs partenaires, à condition de leur offrir une information objective, scientifique et actualisée (parfois contradictoire). Choisir où ils veulent se placer dans le continuum des pratiques avec ou sans capote, entre risques statistiques et risques individuels.

 

Pour conclure je réponds donc à la question que vous avez posée dans ce post : vive la capote et vive la réduction des risques !

Portrait de sentierquibifurque

Justement, cher Skyline, nous avons ouvert un sujet de forum consacré à la RDR gay auquel Kaaphar et JCKBRUN, alliant le geste à la parole, participent déjà, par des questions pertinentes ou des conseils concrets, au-delà des polémiques et des invectives. Evidemment tous ceux qui le souhaitent, et toi-même donc, sont invités à y apporter leur précieuse contribution. Car comme tu le dis toi-même, "la prévention ça n’est plus aujourd’hui un dogme urgentiste mais un ensemble de stratégies cumulatives". Lesquelles justement concrètement ? Et, d'autre part, "je reste persuadé que les individus sont assez matures pour comprendre que le risque zéro n’existe pas et qu’ils doivent alors réfléchir aux risques qu’ils sont prêts à prendre pour eux-mêmes et pour leurs partenaires, à condition de leur offrir une information objective, scientifique et actualisée (parfois contradictoire). Choisir où ils veulent se placer dans le continuum des pratiques avec ou sans capote, entre risques statistiques et risques individuels." Oui, c'est cela exactement : "une information objective, scientifique, actualisée (...) entre risques statistiques et risques individuels". Alors nous t'attendons sur le forum indiqué ci-dessus dans cette réponse...

Cordialement

Portrait de Sophie-seronet

Au risque de paraître naïve, je ferme ce fil de discussion.

 

Pour le débat sur les associations, c’est là :

 

http://www.seronet.info/billet_forum/remise-en-cause-des-associations-pa...

 

Pour celles et ceux qui souhaitent dépasser ce débat, ainsi que celui du bareback contre le tout capote, qu’elles ou qu'ils ouvrent de nouveaux fils de discussion en parlant de leur vécu.

 

Le site ne sera jamais que ce que vous en ferez...

 

Sophie-seronet