Prévention : Act-Up versus Favereau
Tout commence par la publication d'une tribune d'Eric Favereau le 30 mars dans Libération sur les limites du "dogme de la capote" et, plus généralement la pauvreté en France, du débat autour de la prévention. Dans son texte, Eric Favereau explique ainsi : "Enfermer le débat autour du seul préservatif est contre-productif. Ainsi que dire à un gay qui explique combien il est difficile pour lui de mener toute une vie sexuelle sous préservatif ? Lui répéter "ce n’est pas grave, vous en mettez un quand même" ? Et s’il n’en met pas ?" Son texte met aussi en cause le blocage qu'entretiendraient certaines associations, Act Up par exemple, sur ce sujet. "En France, à force de fermer tout débat, la contamination se poursuit", assène le journaliste de Libération.
Act Up-Paris décide de réagir et propose le 7 avril une tribune en réponse à cette mise en cause. Une tribune que Libération garde sous le coude. Le 20 avril, Eric Favereau qui tient, par ailleurs, un blog, "La plume et le bistouri" sur le site Internet de Libération, traite de la nouvelle mission officielle sur les nouveaux outils de prévention en matière de VIH/sida. Eric Favereau écrit notamment qu'"après bien des hésitations, Roselyne Bachelot, ministre de la Santé, a décidé de passer outre aux réticences de certains activistes contre le sida. Et de lancer un travail de recherche sur "les nouveaux outils de prévention" en matière de VIH."
La tribune d'Act Up Paris est finalement publiée le 21 avril. Elle est signée des deux nouveaux co-présidents, Safia Soltani et Stéphane Vambre, que l'association a récemment élus. Intitulée du "Du dogme au comptoir", la tribune est une réponse au texte d'Eric Favereau sur la vacuité des débats français sur la prévention du VIH. Act Up estime que c'est tout le contraire et que "les discussions et les recherches sur la prévention sont vives". En fait, l'association entend surtout rappeler au journaliste de Libération d'abord et aux autres ensuite que "faire croire aujourd’hui à des alternatives efficaces à la capote est mensonger et dangereux." Bien sûr, elle concède qu'"enfermer le débat sur le seul préservatif est certes contre-productif", mais c'est pour mieux affirmer qu'il "n’existe, jusqu’à présent, aucune méthode alternative viable au préservatif." De même, Act Up écrit : "Prétendre aujourd’hui qu’une personne sous traitement ne serait "quasiment plus contaminante" n’est pas sérieux. La commission suisse de lutte contre le sida qui a émis un avis dans ce sens, l’a clairement limité aux couples stables hétérosexuels [limitation qui n'est pas indiquée dans le document suisse], en l’absence d’IST et avec un traitement efficace depuis plus de six mois. Surtout, comment ignorer ici les multiples prises de positions médicales soulignant le manque de fondement scientifique de cet avis ?" Dans sa tribune, Eric Favereau écrit : "Il y a, aujourd’hui, d’autres outils. Et d’abord le traitement, qui peut être la meilleure des préventions. En raison de l’efficacité des molécules antirétrovirales, une personne qui prend son traitement n’est, en effet, quasiment plus contaminante. Mais voilà, il ne faut pas le dire, il ne faut surtout pas affaiblir le dogme du tout préservatif."
Qu'on ne s'y trompe pas, derrière ce qui a les apparences de sempiternels chicayas, se noue, en fait, la question de ce que sera demain la prévention et de qui permettra ou pas son émergence. Pour Eric Favereau il n'y a pas suffisamment de débats sur la réduction des risques. Or la réduction des risques sexuels se situe dans une approche où la capote n'est plus, à elle seule, la pierre angulaire de la prévention. Elle propose une approche où différents outils (de la séroadaptation au traitement) interviennent en complémentarité avec la capote.
Pour Act Up, le discours est autre. Il se fonde sur la primat du préservatif et entretient une suspicion constante à l'égard de la réduction des risques. L'association explique ainsi dans son texte : "Cette question fait l’objet d’une vive polémique entre les associations depuis 2001. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle, il y a bientôt 4 ans, Act Up-Paris a demandé la création d’un groupe d’experts au ministère de la santé pour se pencher sur la validité de messages qui relèvent pour nous de fausses croyances" (sic). Tout est dit dans cette dernière phrase. Pour l'association, il y a donc danger à laisser prospérer le discours et la réflexion sur la réduction des risques sexuels dont chaque avancée est prise, comme l'écrit Eric Favereau, comme un "trou dans le message essentiel : mettez un préservatif."
Le journaliste de Libération explique d'ailleurs qu'Act Up use de son influence pour contraindre voire empêcher le développement de la réduction des risques et retarder la mise en œuvre d'outils de prévention alternatifs au préservatif. Une critique qui, curieusement suscite l'ironie d'Act Up-Paris. L'association devrait plutôt se satisfaire d'avoir (encore) l'oreille des pouvoirs publics et d'entretenir le mythe qu'elle est légitime à tirer les oreilles des autres au nom de ce qui relève de "sa" vérité en matière de prévention. C'est de cela aussi dont parle les deux textes d'Eric Favereau et c'est pour cela qu'Act Up a décidé de "tancer", façon maîtresse d'école, " les égarements d’Éric Favereau sur la prévention du sida" comme le dit si obligeamment le dernière communiqué de presse de l'association.
Pour lire le texte d'Eric Favereau du 30 mars 2009 :
http://www.liberation.fr/societe/0101558918-le-dogme-de-la-capote
Pour lire la tribune et réponse d'Act Up-Paris :
http://www.actupparis.org/spip.php?article3691
Pour lire le blog "La plume et le bistouri sur le site de Libération :
http://societe.blogs.liberation.fr/
Crédit photo : Jonathan_W
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Commentaires
Merci Libé ......merci Favereau
les couilles tronquées de favereau...
En lisant bien la tribune publiée par Liberation et en comparant avec la tribune envoyée on voit bien qu'elle a été entièrement réécrite par la rédaction de Liberation. Que JFL approuve ce genre de méthode donne une drôle d'opinion de sa déontologie. Eric Favereau à la sortie du Rose et le noir, le livre de Frederic Martel qui imputait aux gays eux-même les retards des gouvernements devant la pandémie, a publié un article claironnant que c'était un "document essentiel " (je cite de mémoire). Pour donner une idée de ce livre il y était écrit que Guy Hocquenghem "ne se serait fait dépister que sur le tard" ce qui est complétement faux.
Aprés avoir aplaudit les thèses comme quoi les activistes gays étaient les grands responsables des retards de la prévention (le président d'Aides avait condamné cette thorie à la télévision) et ne s'étaient pas battus pour la capote assez tôt, aujourd'hui Favereau défend le no-capote=plaisir. Formidable! A-t-on jamais dit à JFL que dans le journalisme sérieux -je ne parle pas des gratuits à distribuer dans les saunas- il est d'usage de rapporter les arguments des deux parties?
Capote = Chasteté = Frustration = Refus de la réalité
Pour une prévention axée sur le nokapote?
Si j'ai bien compris...
Pschittt...
je n'ai jamais dit
Divagations...
Skyline et la violence du controle social.
Je vous cite: "J'ai l'impression que vous pensez que la présophobie se soigne, comme certains le pensent de l'homosexualité ou du transexualisme". Je pense juste qu'une campagne de prévention ciblée peut la faire reculer. L'homosexualité ni la transsexualoté n'altèrent la santé comme le Sida.
Je vous cite "je ne crois pas à cette théorie du contrôle social" "la légitimation du contrôle social." Cher Skyline , en fait, si je vous comprends bien, vous êtes ennemi de TOUTE prévention, puisque ça représente "la violence inouie du "controle social". Aller distribuer des préservatifs aux jeunes, c'est la violence inouie du controle social, donner des conseils à des jeunes filles "si un mec veut baiser sans préso c'est qu'il l'a déja demandé à une autre, dit qu'il faut la mettre, que tu ne prends pas la pillule pour pas le véxer", encore la violence sociale?...Il y a une époque ou la violence du corps social c'était de laisser crever les séropos et laisser l'épidémie se répandre. Maintenant c'est de faire des campagne de prévention pour éviter que les jeunes se contaminent et se co-inféctent et se sur-contaminent, la violence sociale.
"Je représente aussi un peu les séropos de la deuxième génération, ceux d'après les trithérapies, qui en ont marre de la dictature du morbide et de la peur". Peut-être qu'aprés dix ans de trithérapie (avec ou sans Interféron en plus?) vous penserez autrement. Avec mon préso, dondaine, je me sens du côté de la vie,dondon, pour les autres et pour moi , dondaine, c'est peut-être la vie qui vous fait peur. Quand à votre fixette AUP Vous en arrivez à inventer que c'est à cause d'Act-up qu'on pénalise la transmission du VIH, alors que la pénalisation de la transmission existe dans nombre de pays qui ne connaissent même pas cette association. Par contre ceux qui sont allés raconté à la télé que contaminer les autres c'est fun, ils n'ont aucune responsabilité? Vous vous imaginez les dégats si un journaliste s'empare du "plaisir=noKpote?"
dernière citation: "Pas facile de se démarquer lorsqu'on peut se retrouver stigmatisé, traiter d'assassin et de criminel, par le simple fait qu'on s'interroge sur une réalité sociale et psychologique" Charmant euphémisme: revendiquer la baise sans capote avec une personne dont on ignore le statut serologique c'est "s'interroger sur une réalité sociale et psychologique". C'est drôle vous m'avez l'air plutôt de vous en foutre de la dite stygmatisation: c'est pas ça qui vous empêchera de dormir, non? Ce n'est pas mon but en tout cas. Encore hier je me suis trouvée confrontée avec un jeune co-infecté Sida et VIH, trop amoché, pour travailler, moi ça me désole et quand je me dis qu'il aurait suffit d'un préso pour lui éviter ça, je suis triste.